Pourquoi ?
Parce que je connais bien Florian Viel qui expose en ce moment à la Galerie Patricia Dorfmann à Paris. L'exposition porte le titre de Eight Days in L.A, a postcard project et forme une sorte de travel guide de son voyage aux U.S.A et particulièrement autour de Los Angeles.
Comme de nombreux artistes, parfois bien parfois pas bien, il utilise la référence à la carte postale pour rendre compte de sa perception de la ville, des paysages et des personnes rencontrées. Nous avions particulièrement aimé ici la grande qualité de regard photographique visible sur son blog dans lequel il était parti à la recherche de sa Pamela : Where is my Pamela ?
Ici c'est une sélection un peu drastique qui nous est proposée de ces vues ayant donc eu la chance d'être choisies et éditées d'une manière qui s'apparente beaucoup à des cartes postales du moins dans leur présentation car l'ensemble de la pièce de Florian Viel tient bien dans une installation de portants, de distributeurs de cartes postales.
Et même si l'épaisseur des images mises à disposition, l'unicité des vues par distributeur ne permet que peu de se reconnaître et de s'imaginer sur le trottoir en train de choisir une carte postale, il est bien question ici de faire image de cette pratique.
Pourtant le verso ne comporte pas les traditionnels signes de la carte postale et reste donc un objet photographique mystérieux alternant entre photographie contemporaine, carton d'invitation, et carte postale. On pourrait dire qu'il s'agit avant tout, d'une collection... Même si le titre de l'exposition fait bien référence à la carte postale.
Voyons les images.
On s'autorise à penser que ce qui a guidé au choix de celles-ci est une certaine idée qu'il faudrait se faire de L.A, pleine d'artistes contemporains au travail et rencontrés par Florian Viel. Pris sur le vif, dans des actions, ils (elles !) sont là comme des visiteurs d'images démontrant bien que le jeune artiste a réalisé là un Artist Tour, voulant aussi voir la ville au travers de ce prisme particulier. On regrettera que la profusion d'images du blog ne soit pas ici rendue perdant ainsi un peu son œil sur la ville, le regard si juste de l'artiste même si le projet initié par Jonathan Chauveau n'a duré qu'une semaine. Sans doute que le travail en commun avec Jonathan Chauveau (ayant opéré le choix de la carte postale), choix fait à quatre mains n'a pas autorisé Florian Viel à jouer plus avec son propre répertoire pris sous le feu croisé d'un projet artistique partagé et d'un désir d'autonomie de ses images. Sans doute aussi que le travail de textes sur ces images choisies et qui n'est pas présenté aurait permis une compréhension plus grande encore de ce choix. C'est dommage.
Mais reste une impression de ville, de paysage bien particulier. La difficulté de ce paysage tiendrait bien d'ailleurs dans cette difficulté à le saisir, puisqu'une forme d'étalement urbain, d'absence de centre historique, de lumières étranges ne sachant si elles sont artificielles ou naturelles n'offrent en fait que peu de manière pour l'appréhender. Comment rendre compte en même temps d'une sorte de profusion visuelle et d'une sorte de rareté monumentale ? Comment raconter la route infinie, l'espace des automobiles, la laideur utilitaire de l'architecture sans tomber dans le piège d'une histoire de la photographie contemporaine comme celle si nostalgique de Stephen Shore ?
C'est bien ce qu'arrive à faire Florian Viel, échapper à ce piège de la référence facile des lieux vides si argumentée aujourd'hui par une multitude de petits photographes contemporains. Il arrive dans une forme certes de rareté à sans doute nous rendre la spatialité de ce paysage américain fruste, vide et en même temps riche d'une sorte de profusion inutile. Tout tient dans d'infimes détails, des constructions poétiques et ironiques, des atmosphères poudreuses et aussi dans un humour sans cynisme. La gageure n'était pas simple et, de sa jeunesse d'artiste, on comprend déjà que Florian Viel a su là imposer tout de même un rythme que, sans doute, son binôme n'a pas su suivre.
Alors je vous invite vivement à aller voir cette exposition, à revoir son blog qui sera un complément indispensable à la compréhension de son regard.
Et, dès l'entrée de l'exposition, vous pourrez si vous êtes curieux, voir d'étranges Oiseaux de Paradis saisis dans leur ombre, encerclés de lumières et qui découpent comme un Matisse au cinéma, un dessin simple et pourtant sophistiqué : celui sans doute, par projection, d'une belle ambition.
Bonne visite.
On notera que les cartes postales sont en vente permettant pour une somme très modique d'acquérir une édition d'artiste !
Eight Days in L.A
Galerie Patrica Dorfmann
61, rue de la Verrerie, Paris 04.
Jusqu'au 21 septembre 2013
Hiding in Joshua Tree (with Julien Berthier), 2013. |
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