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mardi 19 août 2025

Système Bérard ? Attention ! Travaux !

Avant de vous livrer cet article, je veux bien évidemment faire un signe à François Chaslin disparu il y a peu. Je pense à lui et à l'importance immense qu'il a eu pour ce blog. Je ferai à la rentrée une Chronique Corbuséenne sur Radio On que je lui consacrerai. En attendant, et malgré tout, je poursuis ici mon travail, avec toujours au dessus de moi à la fois sa confiance, sa gentillesse, sa rigueur, ce qui fut aussi à mon égard sa disponibilité et ses compétences.

Merci pour tout Monsieur Chaslin.


 Dans le fantasme du collectionneur de cartes postales d'architecture, il y a toujours le désir et la joie de trouver une carte postale montrant le chantier. Le chantier est impermanent et la photographie en figeant cet état permet de tenir le temps et de comprendre souvent la construction, les méthodes du bâtir. Mais le chantier, c'est aussi une poésie, une fragmentation, une ruine à l'envers.
Je vous chantais, il y a peu, le plaisir de ma découverte du Système Bérard et la richesse de sa présence à Migennes-Laroche. On est certes dans les prémices du béton armé (encore appelé ciment) mais comment ne pas évoquer cette technique sur ce blog !
Voilà que deux occasions de se régaler nous arrivent en même temps après quelques recherches. D'abord la carte postale du chantier de l'église Notre-Dame-de-l'Assomption de Rungis qui nous permet de voir le montage des plaques préfabriquées au pied du bâtiment, prêtes à l'emploi. On ne voit pas de machine de levage, serait-il donc possible que les maçons montaient les plaques une à une par les échelles ou avec l'aide de simples cordages ? 
Quelle chance en tout cas d'avoir ce genre de document, une fois encore les éditeurs de cartes postales, dans leur infini désir de tout montrer, ont bien travaillé pour l'Histoire.
On notera d'emblée que cette église est inscrite depuis 1999 aux monuments historiques. Ouf....




L'autre occasion vient d'une revue cette fois-ci, d'un fascicule de "le Monde et La Science" qui évoque le Chantier Moderne (sic) et toutes les inventions et quelques modèles. On y retrouve bien en place le Système Bérard et quelques photographies nous permettent de voir la construction de notre église de Rungis. Voilà qui est bien instructif.
Vous trouverez ici toutes les informations et il semble que l'église soit en excellent état aujourd'hui.
On s'en réjouit.










vendredi 18 juillet 2025

Ricardo Porro enfin !

 Je suis tellement heureux d'avoir l'occasion de vous parler d'un architecte assez rare et peu connu du grand public et qui, pourtant, a construit une oeuvre réellement fascinante, étrange, baroque.
Cet architecte c'est Ricardo Porro.
J'ai de la chance car dans ma région proche, à Canteleu exactement, Ricardo Porro et Renaud de la Noue (ne pas oublier son alter ego) ont bâti un lycée hôtelier incroyable. Mais ce n'est pas ce bâtiment que je trouve miraculeusement édité en carte postale mais le collège Elsa Triolet à Saint-Denis et cela avec en plus une photographie superbe de André Lejarre qui, si vous êtes un amateur de photographie d'architecture devrait sans doute vous en rappeler une autre, celle de Martine Franck pour la bibliothèque de Clamart :



Cette carte postale-ci est une édition du Conseil Général de la Saine Saint-Denis, il ne fait donc aucun doute qu'elle fut diffusée à des fins de promotion de la politique scolaire du département. C'est donc une carte postale de communication introuvable sur les tourniquets des bars-tabacs. D'ailleurs ? Comment était-elle donc diffusée ? 

Étrangement André Lejarre ne se souvient pas bien de cette photographie ni de son moment. Une petite interview au téléphone me permet donc de l'entendre me dire que ce n'est même pas pour lui l'une de ses photographies préférées. Et bien moi je pense que je suis bien heureux de la voir et de vous la montrer. Cette carte postale me permet aussi d'évoquer le travail photographique de Monsieur Lejarre. En tout cas, il s'agit bien d'une carte postale institutionnelle. Le photographe m'indique qu'il doit y en avoir d'autres car un reportage entier avait été réalisé. Que j'aimerai trouver cet ensemble !

Cette contre-plongée en dit long en tout cas du regard du photographe. Il s'agit bien entendu de faire sentir la surprise des espaces et des circulations, les deux petites têtes d'adolescents semblant surgir des formes complexes comme des petits diables d'une boite. Ils donnent l'échelle et permettent de comprendre une certaine complicité du regard des adolescents avec le photographe. Difficile de savoir si les gamins ont été sollicités ou si le hasard de leur apparition nimbée de blancheur a produit le déclenchement chez le photographe. On peut affirmer que, même si cette photographie rentre donc dans un plan institutionnel (une mission photographique) il semble bien que les deux architectes, Ricardo Porro et Renaud de la Noue, ne soient pas intervenus sur les choix et manières de faire image avec leur architecture. En tout cas, André Lejarre ne s'en souvient pas, pas plus de comment il fut ainsi commandité.

Nous sommes donc au collège Elsa Triolet à Saint-Denis, la carte (un peu plus courte qu'une carte normale) fut expédiée en 1994. Que sont donc devenus ces deux adolescents ? Se souviennent-ils d'avoir ainsi été immortalisés dans une carte postale ? Ont-ils profité de l'aubaine pour en envoyer à tout le monde ?

J'aime l'extravagance de Ricardo Porro presque trop décidé à faire spectacle, à faire étrange. On pourrait bien là y voir un symptôme de la nécessité d'un architecte a posséder un style. On dira pour faire chic : une écriture. Mais ce trouble hyper sensuel des courbes et des volumes comme surjoué ne doit pas faire oublier que Ricardo Porro a d'abord fait de l'architecture, jouant des fonctions, des rôles des espaces pour inventer un moment, une promenade, une expérience spatiale. Rien à voir ici avec le baroquisme débridé de papier froissé d'un Gehry dont le défi structurel d'ingénieurie apparait comme le ressort passionnel du génie démiurgique.  Autrement dit : 

-Ingénieur ! Je veux. Tu dois pouvoir. Tu vas devoir. Tu vas faire

Dans ma bibliothèque sont rangés quelques volumes de la très belle collection d'ouvrages sur l'architecture publiés sous le titre : Architecture et Cie, État et Lieux, par Hubert Tonka et Jeanne-Marie Sens aux éditions du Demi-Cercle.

Il faudra un jour revenir sur cette très belle collection d'ouvrages sur l'architecture contemporaine d'alors, la fin des années 80 et le début des années 90. Une magnifique promesse éditoriale. Il se trouve qu'un volume de cette collection est consacré à ce collège Elsa Triolet. C'est avant tout un superbe livre d'images et de photographies de Anne Favret et Patrick Manez. Malheureusement, on est peu aidés par les textes, par quelque déclaration que ce soit...On notera aussi que, à la différence de André Lejarre, les photographies sont totalement vides de vie, aucune ne montre le collège Elsa Triolet en action, au travail. Le choix d'une bichromie très contrastée renforce surtout l'expressionnisme du dessin des architectes peut-être un peu au détriment de la vie et des surprises des successions d'espaces. L'usage passe un peu en arrière plan des images. Mais quelle belle édition ! Que c'est beau ce travail ! Là encore on regrette que les photographes ne nous donnent pas l'occasion par un texte de comprendre leurs objectifs dans le lieux, leur désir d'images et comment ils ont travaillé avec les architectes. On ne peut que se reporter à l'implacable beauté des formes. Certainement aussi que, déjà au début des années 90, il pouvait être difficile de faire des photographies animées par les adolescents sans autorisation. Qui sait...

Reste que cet album est magnifique (comme tous les autres) et que c'est une chance d'avoir ainsi cette collection de constructions dont les mythiques H.L.M de Bernard Saillol à Montignac. Qui (un étudiant en archi ?) pour nous raconter cette aventure éditoriale ?

Enfin, je dirai que l'un de mes bâtiments préférés de Messieurs de la Noue et Porro c'est sans doute la caserne des C.R.S de Velizy. Un monstre expressif ! Une mante-religieuse ! Absolument génial !
















lundi 23 juin 2025

Wogenscky à peine lisible

 

Oh oui ! On pourrait bien passer à coté. On pourrait bien vite ranger cette carte postale dans le classeur en surpoids du Hard French en ne voyant là qu'une petite cité de plus dans la production française d'après-guerre. Il faut le dire rien de bien particulier nous attache à cette image aérienne, cette carte postales des éditions Combier.
Nous sommes au-dessus de Yutz, plus précisément au-dessus du Quartier des Provinces. La vieille ville est un peu au loin (Thionville ?) et le quartier moderne est venu comme souvent se greffer d'un coup, un peu loin, comme pour ne pas déranger. Le trouble de l'image nait bien de ce contraste de l'implacable rangement des petites barres un rien tassées et des toits de hasard du reste de la ville.
Alors, parfois, souvent, il faut remercier les éditeurs de cartes postales de nous dire de regarder autrement. En effet, sur cette carte postale Combier le nom de l'architecte est écrit même si il l'est avec une faute d'orthographe ! On ne lui en veut pas. Moi-même j'oublie de bien orthographier parfois ce nom si célèbre de l'Architecture Française. Mais depuis cette photographie, vous avouerez qu'il reste difficile de comprendre l'originalité et la force de l'écriture architecturale de Wogenscky. On y voit surtout que les barres sont vraiment les unes sur les autres. C'est assez radical et honnête, ce n'est pas tant là que se dessine la qualité de l'architecture. On remarque aussi que sur une telle parcelle, l'architecte aurait pu faire le choix d'immeubles plus hauts pour libérer plus de terrain. Le peu d'étages de ces petites barres (4) doit certainement vouloir tenter une approche plus...humaniste, plus tranquille moins effrayante que les Cités Radieuses de son maître adoré...



Mais tout cela produit surtout une image rayée d'horizontales dans sa moitié basse. C'est assez impressionnant ce désir de tout tenir ainsi, règle en main. Oh non ! Ne croyez pas que vous allez avoir de ma part un texte dénonçant le fascisme de la ligne droite ou de la géométrie ! Ce serait bien indécent ! Je ne suis pas de ceux qui voient dans un angle droit l'émergence d'une pensée raide ou autoritaire ! Nous laisserons cela aux critiques d'architectures et historiens un peu perdus voulant que l'on parle d'eux. J'ai, pour ma part, le sentiment et même la certitude qu'il n'y a aucune raison de faire ce genre de lecture et que l'oeuvre entière de Wogenscky prouve son attachement humaniste. 
Depuis cette image au moins, la seul lisibilité du travail de Wogenscky pourrait se produire dans les tous petits points de couleurs des entrées : oranges ou bleus. Wogenscky à peine lisible est-ce le signe de moins de Wogenscky ? Sans doute pas. Cette discrétion est plus le choix d'une certaine élégance de la grille, le désir de ne pas faire une architecture tonitruante affirmant haut et fort sa Modernité. Une discrétion sensible.
Sauf erreur de ma part, je ne vois aucune mesure de protection ni Label pour cet ensemble. Quelqu'un pour, heureusement, me contredire ?
Ma promenade sur Google Map me rassure peu sur l'état de l'ensemble.
Il ne fait aucun doute que les autorités patrimoniales de la Région, que les amateurs de Wogenscky feront rapidement le nécessaire pour soutenir et inscrire cette belle écriture dans notre temps présent.
Enfin...on espère.








vendredi 30 mai 2025

mega-structure pour la glisse

 Il y a des rencontres avec des images qui confinent au mystère. Une sensation singulière qui fait que, immédiatement, l'oeil perçoit le potentiel d'une photographie, raconte l'envie d'en dire quelque chose. On le sait les patinoires, les piscines, les salles de sport d'une manière générale sont des objets obsédants pour les architectes car il faut toujours montrer qu'on a trouvé une solution pour recouvrir une grande surface sans , bien entendu, faire descendre des points d'appui au milieu des bassins ou des terrains...Il faut donc projeter les forces des couvertures sur les bords, les obliger à s'exporter sur les limites. Il faut donc avant tout soigner la structure.
Ce matin, devant cette carte postale Iris pour Cap-Théojac c'est à tout cela que je pense. Et je crois que j'aime l'architecture surtout pour les réflexions des structures. Ici, je suis gâté.



La patinoire de Villard-de-Lans nous montre en effet un superbe et assez incroyable jeu de poutres se croisant et se reposant sur des piliers recevant toutes les forces. C'est absolument magnifique ces étoiles de béton. Car il s'agit bien de béton, j'ai cru un court instant à du lamellé-collé mais non...On pourrait presque regretter que ce que porte justement ces magnifiques poutres soit aussi peu intéressant. La couverture ne semble pas très intéressante, tout cela sent un pragmatisme bien appliqué comme si l'architecture et son défi tenaient tout entier dans le croisement justement de ces poutres. Est-ce que, comme moi, vous imaginez immédiatement le moment du chantier où seules les poutres de béton étaient en place laissant le ciel passer au travers des triangulations ? Comme cela devait être magnifique !
On pourrait encore réactiver la vieille querelle entre oeuvre d'architectes et d'ingénieurs et se demander si, là, précisément, il ne s'agit pas essentiellement d'une œuvre d'ingénierie où le calcul des reports de masse, des épaisseurs, des triangulations l'a emporté certainement sur le registre formel ici réduit à la beauté d'une structure brute laissée dans la poésie de sa visibilité presque comme le serait un brutalisme du génie civil si souvent mal aimé en France et si peu regardé.

N'ayant malheureusement pas trouvé le nom des créateurs de cette belle structure, je ne pourrais départager entre ingénieur et architecte mon admiration, je ne pourrais remercier personne...

On notera que le choix aussi de montrer cet équipement sportif de l'intérieur est sans doute lié au fait que cette patinoire de Villard-de-Lans est particulièrement enclavée et que faire une photographie depuis l'extérieur semble difficile et peu probant pour en montrer ses qualités constructives. Enfin...c'est ce que je crois.

Pour être complet, la carte postale ne nomme pas le photographe ni l'architecte et n'est pas datée.



samedi 17 mai 2025

C'est un peu partout la Pologne

 Il fait bien frais ce matin à Oissel. Un seul stand me propose des cartes postales modernes perdues au milieu de plusieurs classeurs de cartes anciennes. La conversation s'engage avec un monsieur qui cherche des cassettes audio et qui veut savoir "si ça vaut le coup d'apporter des cartes postales sur un vide-grenier". Le vendeur-collectionneur et moi-même lui répondons que oui ! On s'amuse alors de mes recherches, les deux messieurs ont l'air intrigué de me voir ramasser les cartes postales qui suivent. Je tente une explication rapide. "Faut de tout pour faire un monde" me rétorque alors mon vendeur. Un euro plus tard, je glisse mes cartes dans ma poche. Oh...rien de bien rare mais, par contre, d'assez typique d'une certaine production architecturale et éditoriale qui d'ailleurs par son esthétique laisse croire à mon vendeur qu'il s'agit de la banlieue parisienne. Cette reconnaissance d'une certaine typologie m'intéresse et elle est la preuve d'un certain partage culturel entre la France des années 50 et 60 et la même période en Pologne, puisque ces cartes postales viennent bien de ce pays. Il y a donc chez tout le monde des images-types qui font vibrer un commun des images et de l'architecture. Il faut être assez clair d'ailleurs sur le fait que ces modèles architecturaux et les conceptions qui s'y rattachent furent bien diffuser dans l'Europe entière et ailleurs également. En ce sens, le chemin de grue et la préfabrication lourde (système Camus par exemple) furent bien une orientation générale au lendemain de la seconde guerre mondiale. Il n'y a donc rien d'étonnant qu'on s'y retrouve, qu'on s'y perde, qu'on aime se faire avoir sur la localisation de ces typologies (pour parler comme un artiste contemporain ).
Il fut une époque aussi où on trouvait régulièrement et assez facilement sur les vides-greniers des cartes postales du bloc de l'Est. Il était aisé, il y a dix ou quinze ans de faire une collection de ce genre de cartes. Sans doute qu'il y avait eu des agences de voyages, des échanges, des séjours organisés qui voulaient montrer l'essor des pays de l'Est en en montrant les qualités de sa Modernité. On a du mal à croire que aujourd'hui la Pologne se laisserait ainsi représentée...
Mais qu'importe ! Régalons-nous de ces beaux blocs, de ces belles façades géométriques, de ce Plattenbau soviétique si cher à mon ami Nicolas Moulin ! Il me faudra finalement faire un classeur pour les ranger toutes ces cartes postales qui sont, pour l'instant, dans une boite Ikea, agissant comme un retour amusant de l'Histoire.



On commence avec cette magnifique carte postale de Poznan dont la photographie est de Jablonskie. La vie semble radieuse...Et comment ne pas remercier la chance de vivre une époque où, en deux cliques sur un moteur de recherches, on trouve le nom des architectes de cette superbe façade : Jan Weclawski et Jan Ciezlinski.  La carte non écrite et non datée est une édition Ruch. On aime aussi la tour-signal qui serait du même duo.
Allez faire un tour sur ce beau blog (Louis, tu devrais adoré) :



Des mêmes architectes, le très graphique et moderne hôtel Mercury dont rien que l'auvent de l'entrée donne envie d'y aller dormir. On note que c'est le même éditeur et photographe qui travaillent. On imagine dans le milieu des années soixante l'arrivée en bus à cet Hôtel dans la Pologne soviétique. Ça devait être quelque chose comme expérience. La façade courbe avec son damier fait toute l'écriture de cette beauté. On adore.



Et voilà la pureté du Plattenbau, de la préfabrication lourde, tout ce que j'aime. Les dalles ont gardé la lecture de leurs joints, la répétion des petits blocs (quatre étage seulement), le bleu qui pourrait bien être en carreaux de céramiques, les petits balcon très Bauhaus, tout cela m'enchante. J'aime la colorimétrie générale que la qualité un peu pauvre de l'édition tire sur le bleu. Nous sommes toujours à Poznan, toujours avec le même éditeur et le même photographe. 
Comment ne pas se régaler ainsi de cet héritage moderne de la Pologne qui semble donc, si on en croit l'existence du blog nommé plus haut, bien étudié et surveillé. Ouf...Espérons que l'ANRU ne s'installe pas en Pologne...


mardi 12 novembre 2024

Mon Japon est comme ça

 Donc... j'ai acheté aussi un petit lot de cartes postales du Japon. Je me suis laissé dériver dans mes achats passant un peu outre la définition de ma collection pour me laisser happer par des images réjouissantes, m'offrant en quelque sorte l'idéal de ma vision d'un certain Japon, mega-urbain presque dystopique ou très cinématographique.
Un Japon de rêve.
Les plus fidèles de mes amis ont déjà une idée de l'autre Japon que j'aime :

Alors pourquoi ne pas passer un petit moment dans ces images, dans ces villes, au milieu d'une histoire déjà lointaine, très lointaine. On essaiera au passage de trouver quelques pistes d'architectes si possible mais ce ne sera pas très grave si on n'y arrive pas. On fera semblant que tout cela n'est qu'imagination.

Et voilà :


On ne peut rêver mieux que cette vue d'autoroutes qui se chevauchent, qui se mêlent, qui dominent presque les habitations et dont on ne peut croire à aucune logique urbaine précise. Au fond, domine une tour d'une grande banalité dont on nous apprend en français qu'il s'agit du gratte-ciel Kasumiga-seki.
Ce gratte-ciel a le droit à une belle page Wikipédia ce qui m'étonne, tout comme sa date de construction : 1965-1968.
L'éditeur porte un nom qui me réjouit et ouvre encore plus mon imaginaire du lieu : Nippon Beauty Colour !

Du même éditeur :



Là encore on dirait que l'on veut nous donner une leçon d'urbanisme. Au premier plan de minuscules constructions aux toits de tôle et au loin, comme une promesse à venir, des tours et des barres qui surgissent au dessus. Un peu de verdure, un ciel parfaitement bleu et voilà une image assez spectaculaire. Mais on ne nous donne pas les noms des tours et des architectes de ces monstres peu fantaisistes.
Celui de gauche est le fameux Sunshine 60. Il est encore bien isolé. Mais qui est celui tout blanc à droite ?
Il s'agit du Prince Hotel dont je ne trouve pas l'architecte.

Et là ? Vous comprenez le point de vue, ce qu'il veut nous raconter du Japon ? Regardez bien ce qui est visé. Vous voyez ?


Alors j'imagine que tout comme moi vous avez d'abord visé les immeubles dressés dans une concentration déjà impressionnante ! Regardez-moi ce prospect hyper-serré des deux tours dont la fameuse et si belle tour Sinshuku Sompo Japan ! On dirait qu'elles vont se toucher ! Être au sol entre les deux et lever le nez doit être une sacrée expérience ! Mais voyez-vous le Japon ? Je veux dire : voyez-vous son essence ? Oui ! Le Mont Fuji tout au loin ! Et bien évidemment il n'est pas dans le cadre pour rien...Et j'aime aussi ce tapis urbain qui coure devant les tours et qui se poursuit derrière presque jusqu'au pied du Mont Fuji. Incroyable. On devine aussi le chantier d'une tour en construction.



Les immeubles ont bien poussé ! Vous voyez, on retrouve le Sompo derrière ! On pourrait se croire à La Défense. Comment ne pas aimer ce rassemblement de buildings tapant dans un bleu un rien exubérant. On ne pas dire ici encore que ces tours réclament à être vues. Elles sont tout de même assez attendues dans leur grille, pas trop de fantaisie là encore. Pourtant je ne peux m'empêcher de trouver leurs variations comme un jeu optique, comme l'envie tout de même de faire vibrer les fonds d'oeil. Aucun nom d'architecte là encore pour cette belle carte des éditions Nippon Beauty Color

Pour finir voici deux vues aériennes montrant le bazar des petits immeubles et petites constructions qui semblent naitre comme ça sans aucune réponse les unes pour les autres, sans planification particulière, une sorte de souk urbain fabriqué par des autonomies architecturales. On note juste une certaine hauteur à peu près respectée. Pour le reste...c'est confus visuellement et j'adore ça.
Il y a pourtant une icône qui traine dans ce foutoir. Si...si...saurez-vous la retrouver sur la première carte ?




dimanche 10 novembre 2024

Alger, des vues indépendantes

 Hier matin, dans la boite à chaussures d'un vendeur que je vois régulièrement, je me décide pour une série de cartes postales du Japon et d'Algérie. Nous avons déjà évoqué ici un certain point de vue sur l'Algérie, je vous laisse le lire ou le relire.



La carte postale que je fus alors le plus heureux de retrouver fut celle, bien entendu, de l'Aéro-Habitat puisque, vous le savez, j'ai fait une demande d'inscription au Label Architecture Remarquable pour des logements ici dans ma ville, logements dessinés par le même architecte : Louis Miquel.
Ne dirait-on pas, si on regarde vite, la façade d'une Cité Radieuse ? 
La carte postale est une édition Jomone (où sont vos archives ?) qui ne nomme ni le photographe ni l'architecte.



Je trouve à nouveau cette belle carte postale de la Cathédrale d'Alger et j'aime bien retrouver mes icônes. Comment résister ? Ici une belle édition Jefal non datée, sans le nom des architectes : Herbé et Le Couteur que nous connaissons bien au Mans.



Mais voici une carte moins commune nous montrant la Cité universitaire d'Alger (Ben-Aknoun). On y voit un pavillon pour Jeunes Filles et cette fois le nom d l'architecte est bien indiqué : François Bienvenu.
Et elle est bien belle cette petite barre qui se courbe ! Le dessin évoque un peu l'architecture des maisons de repos ou des stations thermales. L'écriture est résolument moderne, on sent un peu un Art Déco finissant et on comprend que François Bienvenu a voulu offrir à chaque chambre un balcon qui fait office de coursives (?) et une orientation identique pour tout le monde. Magnifique petite construction et découverte !
Vous trouverez sur site un grand plein d'informations d'époque sur cette Cité universitaire :



Pour finir, un vrai monstre.
Cette carte postale Jefal nous montre l'Hôtel Aurassi qui est un archétype d'une architecture internationale. Il s'agit d'une icône de l'architecte au modernisme baroque : Luigi Moretti !
On pourrait être au bord de la Mer Noire, au Brésil...mais on est bien en Algérie. Ce qui est beau et impressionnant c'est bien l'articulation des deux blocs l'un sur l'autre et cette rampe qui amène les autos dans le parking. Quelle grosse machine autoritaire, brutale, franche ! J'adore ! Comme souvent avec ce genre de monstre il est difficile d'en rendre compte en photographie car il faut, pour l'appréhender en entier, se...reculer et donc ne pas très bien permettre d'en lire les détails. J'aurai bien aimé trouver d'autres points de vue et aussi des vues de l'intérieur...Pour une autre fois ?





mardi 29 octobre 2024

Pour fabricants d'atlas et blanchisseurs de ciel

 Alors que je cherche mollement une nouvelle proposition d'article pour ce blog, j'hésite entre vous parler d'un V.V.F en Bretagne ou vous parler d'un Hôtel de Ville dans l'Indre. Je ne sais pas trop ce qui me fait penser que vous pourriez préférer le deuxième mais c'est bien celui que je choisis. Peut-être que par sa représentation, il affiche certainement bien plus la forme idéale de ce que vous attendez ici sur ce blog : une grosse machine un peu moderne, un peu brutaliste, passant un peu à coté de l'histoire mais ayant tenté (et réussi ?) à combler un besoin et à répondre à un programme en Province avec une certaine fierté imposante, celle d'une architecture volontairement contemporaine, presque trop définitive.

La voici :


Vous aurez compris que je ne peux pas laisser passer une telle représentation et donc une telle architecture ! Alors j'adore bien entendu ce genre de carte postale nous montrant de front de beaux blocs s'articulant avec bonheur sur un coin de rue, construisant en quelque sorte la ville autour d'eux. On notera aussi que le jeu des couleurs (tout est adouci de blanc) rend l'ensemble assez lumineux, assez clair, assez limpide presque amical. J'aime surtout la massivité et l'audace un peu bravache de ce morceau d'architecture qui voudrait un peu trop affirmer qu'il existe. "Regardez-moi" en quelque sorte.


Difficile de chanter une qualité particulière mais on sent tout de même là un vrai désir de faire travailler l'angle de la rue et de jouer avec la parcelle bien ingrate. Il fallait être malin pour, à la fois, faire une architecture qui se raconte (sa fonction d'Hôtel de Ville oblige à une certaine puissance) et faire un nouveau morceau de ville articulant justement, à la ville ancienne, cette nouvelle plate-forme de services.

Et cela remplace quoi ?

Le photographe qui est aussi l'éditeur, Monsieur M. Roussel (de Chateauroux) a fait le choix d'une vraie carte postale : frontalité, verticales redressées, ciel bleu, soleil franc et vide relatif de l'animation, seule une dame traverse la ville vide en visant la présence du photographe Mr Roussel. Et voilà ! Cliché parfait, presque trop, d'une certaine idée de la France et de son architecture de Province si décriée aujourd'hui, voir moquée au second degré par une certaine vision bourgeoise de la Photographie Contemporaine.
Vous savez tous maintenant de qui je parle, vous savez les fabricants d'atlas et les blanchisseurs de ciel.
Sur le magnifique et colossal site PSS, je trouve la liste des architectes de ce beau morceau : Pierre Bouguin, Gisèle Fiaud, Jean Maret, Marc Mogenet.
Si on en croit ce site, il semble bien que Pierre Bouguin ait rempli la ville de Chateauroux de son architecture et notamment d'un Hard French de bon aloi amoureux des grilles et des orthogonalités. C'est presque un archétype du genre. Je me précipite dans mon classeur Hard French mais je fais chou blanc...Tant pis ! Pour une autre fois.
Alors la question reste posée : comment regarder et appréhender ce genre d'héritage aujourd'hui ? Au delà du jeu des images aussi poétiques et bavardes soient-elles, il est difficile de penser (surtout pour l'héritage du Hard French) que le travail à Chateauroux d'un architecte de Province, Mr Bouguin, résiste à l'histoire. On verra...
Non, c'est tout vu.






dimanche 8 septembre 2024

Royan, Nouvelles Vagues...

 Je ne compte plus les articles sur mon blog relatifs au Front de mer de Royan encore actuellement totalement défiguré et dont le portique a disparu.
Alors quand j'apprend qu'enfin les travaux vont commencer et que les "vagues" vont disparaître, je ne vais pas bouder mon plaisir et je vais féliciter la mairie de Royan de prendre les choses en main.
Reste à voir ce qui va prendre place...
Là...
Si on en croit ce qui est présenté, il ne s'agira pas de revenir à un état d'origine mais bien de céder à un nouvel ordre moral bien marqué par les questions contemporaines que l'on nous inflige un peu partout : le Patri-washing.
Notamment la fameuse végétalisation qui viendra donc littéralement ré-encombré l'espace, encombrement accentué par la construction de pavillons devant le Front de mer...On devine bien comment cela va finir.
L'impression que donne ce nouveau projet (SCE Ateliers Up+) c'est celui d'un nouvel encombrement, certes, cette fois, "végétal" et qui donc ne souffrirait d'aucune critique (puisque dans un certain air du temps) mais bien d'un encombrement tout de même ne permettant pas plus que les vagues, une lecture franche et directe de l'architecture, c'est à dire que nous assistons à une éradication du sens premier de son urbanisme et de ses circulations. Le bannissement de l'automobile (et ce malgré l'apparition magique d'une Ford Mustang sur les documentations de communication de l'agence SCE Ateliers Up) est le signe d'une dégradation du sens premier de l'architecture du Front de mer. Le cruising, spectacle de l'auto, avait son sens dans la fabrication de ce Front de mer. C'était un héritage à prendre en compte.

On peut, bien entendu, le remettre en cause. Mais si la réponse c'est une forêt "tropicale" d'influence brésilienne (si si c'est ce qu'on nous raconte...) on ne va pas rire longtemps. 
Ce qui m'inquiète le plus ceux sont les "bijoux d'architecture" à "l'écriture patrimoniale" prévu donc devant le Front de mer et en lieu et place du portique. J'en imagine déjà la qualité architecturale genre découpe au laser et blancheur avec un toit plat, les images de communications en ce sens sont épouvantables ! De faux pavillons bas de gamme de Jean Prouvé : c'est déjà ignoble. Pourquoi, au lieu de singer l'architecture des Trente Glorieuse ne pas alors oser la fabrication d'un nouveau Patrimoine à venir en confiant ces pavillons à de grands architectes ? En faire une sorte de collection de pavillons contemporains ? Comment l'A.B.F peut laisser passer ça devant le Front de mer ?
Et la présence de ces pavillons et ce qui les accompagnera (chaises, tables, parasols, panneaux racoleurs des restaurants) finira bien par ne plus laisser respirer l'espace soi-disant libéré et à produire un nouvel écran à l'architecture.
Comme je ne suis pas royannais, et qu'il y a peu de chances maintenant que je le devienne, je ne sais plus très bien ce que je dois penser des avancées ou des retours patrimoniaux sur cette ville. Peut-être que je n'arrive tout simplement pas à renoncer à un fantasme, un rêve, une impression. La mairie a l'air de vouloir être dans une énergie et c'est déjà formidable.

Mais je crains que l'enfer soit pavé (littéralement) de bonnes intentions, de petits signes patrimoniaux, de couleurs locales pour faire "années cinquante" en lieu et place d'une véritable écriture moderne se stratifiant sur l'héritage au risque d'un fantôme de ville, certes bien ombragée mais n'étant plus que de citations. Comme un nouveau bombardement d'idées reçues sur les qualités d'un écologisme simplet fait de plate-bandes filtrantes ou de copies décevantes des pavements de Roberto Burle Marx...Faire des signes urbains n'est finalement peut-être pas plus radical et nécessaire que des vagues bleues des années 90.

Alors...j'abandonne encore un peu mon lien avec la plus belle ville du Monde. 
On "verra". 
David Liaudet

Voilà la présentation du projet. Amusez-vous à compter les marinières framboise et les doudounes bleu marine et la jeunesse, ce qui induit, de fait, une certaine idée de la praticabilité attendue de la ville et de ses usages :

Je fais un choix de deux cartes postales qui montrent bien la simplicité et la radicalité du rapport entre architecture, plage et circulation à l'époque : une certaine horizontalité franche, presque une minéralité admise et souhaitée aujourd'hui complètement rejetée et détruite dans le futur projet "végétal" et animé de signes patrimoniaux.
On rigole à gorge déployée quand, avec beaucoup de sentiments sans doute, un habitant lors de la réunion, réclame un pavillon qui rendrait hommage au casino disparu...On se demande lequel en fait...celui d'avant-guerre sans doute...

Pour revoir Royan sur mon blog (bon courage...) c'est ici :
ou encore :
Pour revoir mes cartes, allez à Royan, elles ont toutes été données à la Ville.
Sinon...trouvez et lisez mon livre....

Une édition Chatagneau Elcé (où sont vos archives ?) expédiée en 1961 :
Une édition Bauch, expédiée en 1958 :





vendredi 30 août 2024

L'Abbé Pierre aimait les maisons en béton



Non, non, je ne serai pas de ceux qui courent après l'Abbé Pierre au nom d'une sainteté présumée qu'il n'a jamais réclamée. Non, l'Abbé Pierre a fait assez de bien dans sa vie pour qu'on retienne surtout cela même si, bien entendu, cela justement n'enlève rien à ses mauvaises actions. 

L'Abbé Pierre était chrétien, accordons-lui ce qu'il réclamait pour les autres: compassion, compréhension, pardon d'un simple pécheur parmi d'autres.

Voilà. On parle architecture ?


Je n'en reviens pas que le témoignage des cartes postales permet , une fois encore, de se saisir d'une certaine histoire du logement social et d'urgence. Nous avions, (pour les plus fidèles d'entre vous dont vous êtes) pu voir comment à Brignais l'expérience des Maisons Ballons de l'Abbé Pierre a été enregistrée. Mais ici, ce qui me séduit particulièrement c'est que l'on voit les Maisons Ballons dans leur espaces et qu'elles sont habitées et aussi que c'est Combier qui enregistre cette expérience grâce à son si célèbre service de vues aériennes. Il est donc certain pour cette carte postale, par rapport à celles que nous avions publiées, qu'elle fut bien diffusée régulièrement dans les lieux habituels de vente de cartes postales ce qui implique une certaine reconnaissance au moins locale de l'expérience. On note que la carte postale est affranchie en 1971 mais est bien plus ancienne. Une main attentive a noté que les maisons furent détruites dès 1973 ce qui leur fait un temps de vie très court...Pourquoi donc ?

Quand on regarde cette carte postale, on pense immédiatement aux Maisons Ballons de Dakar et il ne fait alors aucun doute qu'il s'agit bien là du système de maisons de Wallace Neff, système de béton projeté sur structure gonflable et réutilisable.

Restent des questions ouvertes à des chercheurs, des historiens de l'architecture : comment l'Abbé Pierre a cru trouver dans ce modèle une solution au logement d'urgence ? Comment donc furent commanditées ces constructions ? Avec la participation de Wallace Neff ? Le lotissement photographié ne comporte que cinq Maisons Ballons sur un terrain dont les jardins sont à peine esquissés. Comment les familles furent choisies ? Quelle réception positive ou négative ces maisons si particulières ont reçu de la part de leurs habitants et du reste de la ville de Brignais ? Et pourquoi cette histoire, il me semble, est complètement oubliée alors que la Maison des Jours Heureux de Jean Prouvé pour le même Abbé Pierre est devenue une icône malheureusement inutile à sa cause ?

En regardant au compte-fil, je remarque devant l'une des Maisons-Ballons une silhouette qui regarde l'avion passer au dessus d'elle. C'est touchant cette présence.

Alors ? Combien encore de surprises aussi importantes pour l'Histoire de l'Architecture aurons-nous à découvrir ? C'est bien ce qui semble un infini qui nous donne encore cette énergie et la certitude que les cartes postales sont bien une source plus qu'à privilégier dans des recherches. C'est une forme presque neutre pour des archives joyeuses, populaires, accessibles à qui s'en donne la peine.

Qui à Brignais, qui à la Fondation Abbé Pierre sera raconter cette histoire ?

David Liaudet




Pour voir ou revoir les Maisons Ballons de Brignais ou d'ailleurs :

https://archipostalecarte.blogspot.com/2023/10/lautre-maison-experimentale-de-labbe.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2022/05/des-bulles-de-beton-pour-les-sans-abri.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2019/08/labbe-pierre-et-sa-boule-zero.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2015/02/wallace-neff-est-gonfle.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2021/01/y-bon-nichonville.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2013/06/dair-et-de-beton-wallace-neff-dakar.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2022/11/maisons-ballons-demandez-miguel-mazeri.html