3 fois Ronchamp aujourd'hui.
Merci à Daniel Leclerc pour cet envoi.On aura sans doute peu de choses à dire sur l'architecture que nous ayons déjà dites. Reste la question de la représentation et là, c'est l'infini des cartes postales qui pourrait nous limiter !
Et les jugements à l'emporte-pièce de certains photographes seront une fois encore remis en cause.
D'abord nous regarderons deux cartes postales de la même période, le milieu des années 80. L'une réalisée par une grande maison d'édition et l'autre se voulant plus exclusive.
Commençons :
Chez Combier on tient à une certaine forme de la carte postale. Ici La Chapelle de Ronchamp est prise depuis l'avion, de très proche finalement, pour sans doute l'inscrire dans son paysage et sur sa butte. La vue d'avion, c'est une déclaration générale, une attention plus ouverte, une appréhension globale. On ne joue pas ici à l'originalité, on donne à voir la construction dans son environnement. Mais... c'est bien évidemment une vue inconnue de la majeure partie des visiteurs qui sont des piétons ! Il y a donc aussi dans cette vue une originalité particulière et l'acheteur cherche sans doute aussi là une compréhension de la construction, un saisissement je me répète de l'architecture. C'est le même point de vue de celui qui observe la maquette du projet. La vue d'avion donne à voir (et c'est important pour Ronchamp !) la chapelle dans son entité même si ici l'architecture religieuse de Le Corbusier semble encore rétive à ce saisissement. Ceux qui ont fait l'expérience de Ronchamp savent la difficulté de lecture du dessin de l'architecture-sculpture qui semble se réinventer à chaque pas. L'avion fige un peu, solidifie la perception mais cela n'est pas inutile à sa compréhension. Cela permet aussi de voir l'ensemble du programme architectural dont la chapelle n'est qu'un des éléments.
Cette autre carte postale nous donne cette fois le nom de son photographe : Marc Paygnard.
D'un peu plus loin que l'édition Combier précédente, Marc Paygnard cadre la chapelle de Ronchamp au centre d'une mer verte au ciel un peu pâle. La lumière douce ne laisse qu'à la blancheur des murs la chance de s'exprimer. Il s'agit bien d'un objet posé là, à la fois sur une hauteur et dans une clairière. L'angle de vue est quasi similaire à celle de Combier. On perçoit une végétation bien plus dense, il ne fait aucun doute que l'image est bien plus récente ce qui prouve que la carte Combier est une édition tardive d'un cliché plus ancien !
On notera que le photographe est nommé à l'exact de l'architecte comme pour signifier l'importance de ce regard sur cette architecture, ce qui est mérité. On ne sait rien des conditions techniques d'une telle carte postale. Marc Paygnard est-il aussi le pilote ? Agit-il sur commande ? A-t-il maîtrisé son point de vue ? Est-ce une commande ? A-t-il réalisé beaucoup de clichés pour choisir celui-ci ? Quelle connaissance avait-il de l'architecture pour en décider une telle image ?
On a vu ici des conditions bien extravagantes à la réalisation de clichés sur Ronchamp !
Rien de tel je crois ici mais la réalisation d'un cliché qui sait rendre discret son photographe et qui place au sens propre comme au sens figuré l'architecture de Le Corbusier au centre du projet photographique. Marc Paygnard fait le choix d'une discrétion subtile à l'éclairage adouci. C'est délicat.
Plus rude ?
Nous sommes encore chez Combier éditeur.
Pourtant cette carte postale en noir et blanc n'est pas ancienne, elle donne même l'année de son cliché : 1973. Encore imprimée ainsi, il s'agit bien d'une carte postale jouant sur l'aspect artistique et nostalgique et qui, par son noir et blanc et la pureté supposée de celui-ci serait plus proche ou plus attentive à l'architecture. On connaît bien cette idée qui veut que le noir et blanc dans l'extinction des couleurs obligerait le regard à une appréhension plus attentive du dessin et des qualités propres de l'architecture. Pour ma part, je doute que cela suffise à faire une image plus juste et je crois à l'inverse que parfois la couleur est même l'objet de particularités de l'architecture. La question reste soulevée d'une juste globalité plastique d'un regard. Je vois en couleurs...
Mais cette photographie, cette carte postale n'est-elle pas belle même si elle reste malheureusement anonyme ?
Très bas sur le sol, le photographe se laisse prendre par l'élan de la proue de la Chapelle qui fend le ciel nuageux. Un grain un peu sensible me fait songer à un possible agrandissement. On regarde aussi comment le banchage sur le retour du toit est très lisible ainsi et comment il contraste durement avec la blancheur surexposée dur reste de la construction. La Chapelle semble bien dans son élan faire le lien entre un sol étendu et égal et un ciel tourmenté ! On ne sait rien des collines et du paysage ici ! C'est une image du soleil au zénith. les ombres accusent l'astre d'être à sa plus grande hauteur.
On invente ici une icône.
Il suffit de regarder, Monsieur.
Merci encore à Daniel Leclerc pour ce bel envoi.
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