Lors de la manifestation Archiweek où j'ai pu parlé de la représentation des cartes postales et du logement, une autre intervention m'a un peu fait peur, intervention pourtant que l'on sentait pleines de bonnes volontés et de bonnes intentions.
En effet, il fut question de l'ensemble les Arcades du Lac de Ricardo Bofill et plus particulièrement de son Viaduc* et de son état inquiétant. Il faut donc dès maintenant s'interroger sur son avenir et sur les manières d'intervenir sur ce très très beau morceau d'architecture préfabriquée dont la poésie, la force et l'étrangeté sont plus que reconnues même par ceux qui, comme moi, ne sont pas toujours convaincus par le travail de l'architecte Bofill capable du meilleur comme du pire. Le pire étant, dans sa spécificité historique, ce qu'il faudra bien patrimonialiser comme tel...
Ce qui est très très inquiétant c'est bien que ce morceau d'architecture, ce Viaduc n'est absolument pas protégé et ne semble bénéficier d'aucune attention particulière de la part de ceux qui sont en charge de sa sauvegarde ( DRAC Ile-de-France). Seuls les habitants et co-propriétaires semblent vouloir être attentifs à cette oeuvre. Pourtant, certains mots, certaines idées, certaines même orientations semblent indiquer un risque de vouloir le "réhabiliter" en lieu et place de maintenir la construction dans un état d'absolue exceptionnalité. Autrement dit, la meilleure chose à faire c'est d'en faire le moins possible et de ne surtout toucher à rien de ce qui est l'essentiel : le dessin et les formes.
Il faut faire attention que, à vouloir bien faire, à vouloir tenir ce monument comme un objet-spectacle de finir par le ruiner et de le désavouer dans une sorte de vengeance contre la politique qui l'a fait naître.
On peut bien bouder Bofill et lui reconnaitre maintenant qu'il est dans l'histoire, la grande, celle des étrangetés, des Folies et vouloir en maintenir chacun de ses détails ou de son ensemble : une silhouette, une surface, une matière, une organisation spatiale.
Pour ma part, je pense qu'il faudrait avoir le courage de suivre les délires de Bofill et de laisser la ruine venir prendre la place de la construction. Car Bofill et son école auraient certainement aimé que le monolithe pourrisse lentement, se vidant des habitants, devenant dans trente ou quarante ans une belle ruine moderne, habitée par les corbeaux, devenant un lieu de culte pour amateurs d'urbex ou de Ruin Porn. Voilà qui serait post-moderne en diable !
Mais je ne crois pas que cette hypothèse soit celle désirée par les habitants et c'est, bien entendu, tant mieux.
Pourtant...Comme cela serait beau une belle ruine de Bofill bouffée par les lierres et les arbres.
Il est donc nécessaire maintenant de soutenir les propriétaires et les agents culturels pour faire tout ce qui est possible pour que rapidement, nettement et avec respect ce monstre de béton iconique et digne retrouve toute la superbe de son arrogance monumentale. Il y a des gens qui habitent là, qui sont heureux d'y vire et on doit remercier Bofill de leur avoir offert un lieu aussi magique.
Mais que font, une fois encore, les responsables de cette protection nécessaire ? Où sont-ils ?
On est en Ile-de-France.
Je remercie donc Donata Merlo et Claire Lavenant pour leur intervention et pour les craintes qu'elles ont soulevées chez moi. Qui prendra en charge, en France, l'inventaire et la Patrimonialisation de l'œuvre de Monsieur Bofill en passe de devenir pour toute une génération l'objet d'un culte déviant à l'architecture ?
Je vous propose donc cette carte postale des éditions La Cigogne qui nous montre le Viaduc de Bofill au temps de sa splendeur. On note que le Studio Mandarine qui a réalisé le cliché laisse l'architecture s'exprimer pleinement dans son horizontalité pour en montrer sans doute toute l'étrangeté de sa forme rappelant à la fois les ponts habités, Chenonceau ou un palais stalinien.
* Montigny-le-Bretonneux
Merci pour votre travail d'utilité publique.
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