D'abord elle me fut offerte par Claude Lothier (merci Claude !) et rien qu'à ce titre mérite attention mais ce qui en fait aussi sa valeur ce sont ses destinataires : Messieurs Heaume et Persitz, architectes. Cette carte postale appartient en effet à un lot de cartes postales toutes adressées à Monsieur Persitz que Claude avait chinées par hasard... On sait que Monsieur Persitz était le rédacteur en chef de la revue l'Architecture d'Aujourd'hui dont on sait aussi l'importance pour la diffusion de l'architecture. Or, au verso de cette carte postale on trouve bien évidemment la correspondance ici d'une femme nommée Christina dont je ne sais rien, l'adresse de l'agence Heaume et Persistz à Paris mais aussi des tracés de lignes, des mesures qui évoquent un recadrage...
Eh bien oui... j'ai la preuve maintenant que ce recadrage est bien celui opéré pour la diffusion de cette photographie ainsi retaillée dans la revue l'Architecture d'Aujourd'hui... Il m'a suffit de chercher dans ma collection de revues et j'ai retrouvé à l'identique ma carte postale agrandie mais bien recadrée suivant les indications au verso de ce document populaire !
Cela signifie bien que la carte postale servait de base photographique à l'une des plus grandes revues d'architecture et qu'elle offrait, au-delà des représentations cadrées par Le Corbusier une source iconographique valide !
Quelle découverte !
On peut donc maintenant visiter à nouveau ce fonds iconographique de la revue à l'aune de cette découverte et s'amuser à penser que, même si de très grands photographes ont bien marqué la revue de leurs clichés (Lucien Hervé, Pierre Joly et Vera Cardot etc...) la revue ne se privait pas de piocher aussi dans des représentation plus anonymes, populaires et disponibles quand cela était nécessaire. Cela replace donc également parfaitement la carte postale dans l'histoire de la représentation de l'architecture. Nous avions bien déjà vu des rapprochements de points de vue, nous avions déjà même vu comment l'Architecture d'Aujourd'hui s'amusait des éditeurs de cartes postales dans un article mais nous avons ici la preuve de l'utilisation directe de ce type de document. C'est juste, pour moi et pour ce blog une information primordiale sur le regard posé sur ce type de document. On notera que l'article ne nomme pas l'éditeur de cette carte postale indiquant seulement : photo SPADEM...
Et je crois qu'il me faudra maintenant faire une comparaison de l'ensemble des cartes postales du lot Persitz pour le comparer aux publications de la revue. Il faudra de même s'interroger sur la constitution non pas par hasard de ce fonds mais peut-être simplement, de la part des collaborateurs de la revue, d'une construction volontaire et exigée par le comité de rédaction d'un fonds documentaire pour cette revue.
Passionnante perspective... n'est-pas Claude ?
Une journée formidable !
J'ai donc en ma possession un original d'un document publié dans l'Architecture d'Aujourd'hui en 1961.
Quelle émotion de pouvoir mettre côte à côte le document d'origine et sa représentation dans la revue.
Et quelle merveilleuse introduction à ce séminaire doctoral dont voici, pour les plus courageux, le programme ! Peut-être, nous verrons-nous à Villeneuve-d'Ascq !
Feuilletons ensemble la revue de Juin/Juillet 1961 :
Séminaire doctoral 2013-2014 domaine histoire
Des sources secondaires, ou les possibilités de nouveaux récits
Date : Mercredi 8 janvier 2014 14h30-18h30
Lieu : salle Jean Challet (1er étage)
Organisation, conception : Gilles Maury (Lacth)
Chercheur invité : Luis Burriel Bielza (doct. en architecture/Madrid, MA invité ENSA Belleville)
Intervenant : David Liaudet (activiste en cartes postales et en architecture)
Doctorante : Véronique Boone
Durant la seconde moitié du XXe siècle alors qu'elle se constituait lentement en discipline autonome, l'histoire de l'architecture s'est appuyée, suivant en cela les principes établis en histoire de l'art, sur l'examen de sources premières (fonds d'archives d'architectes, correspondances…). Toujours tributaires des conditions à partir desquelles elle s'élabore, se pense et se concrétise, l'histoire de l'architecture reflète sa propre époque. Aujourd'hui, d'un côté les grandes figures historiques que sont Le Corbusier, Mies ou Wright semblent ne pouvoir faire l'objet que de digest ressassant les mêmes documents ou informations ; et d'autre part, le manque de fonds constitués, de sources balisées, pour certains autres héros gêne ou à longtemps gêné la production d'ouvrages de synthèse : de Charles Garnier à Paul Nelson, les exemples abondent
.
Le renouvellement des approches, encouragés par la transdisciplinarité à l'œuvre dans les sciences humaines en France depuis les années 1980, autorise, voire impose, le recours à des sources secondaires autrefois négligées. Dans le foisonnement documentaire produit par le siècle passé, les images en tout genre sont légion (photographie de presse, publicités, documentaires amateurs ou professionnels …) et place souvent l'architecture en arrière-plan, quand elle n'est pas le sujet principal. La mise en intrigue nécessaire au récit historique suppose que ces documents soient analysés, contextualisés, afin d'en tirer les informations pouvant éclairer les hypothèses à l'œuvre.
Pour toutes ces raisons, la carte postale est un médium particulier, dont la richesse sur le plan de la recherche commence à émerger
. L'introduction proposera un balisage de la carte postale en tant que support iconographique complémentaire ou indispensable (de l'œuvre toujours debout à l'édifice disparu), en tant que document aux multiples possibilités (de l'esquisse à la réception, du chantier aux transformations), en tant que document de l'architecture ordinaire ou célébrant l'exception. Elle s'attachera ensuite à dresser un premier système d'interrogation afin d'en faire un outil de recherche.
Intervenants
Luis BURRIEL, architecte, enseignant (Maître Assistant Invité ENSA P-B) et chercheur.
Les cartes postales de Le Corbusier, le regard transversal du monde
Le sujet ici énoncé est parfois apparu dans le monde de la recherche corbuséenne, mais toujours d’une façon fragmenté et tout simplement au titre de source d’appui ou de souvenir. Nous avons dans le fonds Le Corbusier environ 2.300 cartes postales que l’architecte mettra en valeur par le biais de trois fonctions principales attachées : source d’inspiration capable de faire pousser son univers imaginaire créatif, source de formation pour comprendre le monde qui l'entoure et source de vérification et confirmation de ses propres recherches. Elles font foi de son intérêt pour un regard transversal, capable de mettre en résonance des différentes civilisations sous un même sujet dans une approche transculturelle et même parfois atemporelle. Il s’agit en fait d’un autre outil du travail qui établit des rapports puissants avec sa peinture, ses expériences du voyage, ses carnets de croquis, son architecture et ses écrits. La valeur de cette collection ne reste donc pas seulement centrée sur elle-même, mais s'ouvre par la place qu’elle occupe dans un réseau des significations et connections. À défaut de témoignages sur l’état original de la collection du vivant Le Corbusier, l’approche ici proposée s’appuie sur l’idée de «Technique de groupements» énoncé par l’architecte au début des années 1930, que l’auteur développe ensuite vers un concept que nous pourrions dénommer «assemblage poétique» par opposition à une «classification» d’après la discipline philatélique.
Bio-bibliographie : Luis BURRIEL BIELZA est architecte associé de l’Agence SOMOS Arquitectos, qui a remporté des nombreux prix dans les Concours Publics, avec un regard spécifique sur la question domestique et les nouvelles formes pour l’habitat collectif. Il est titulaire d'un doctorat de l'Université Polytechnique de Madrid (ETSAM). En tant que chercheur, ses champs principaux de recherche prennent Le Corbusier et son univers créatif comme point de départ pour creuser le rapport au visuel comme activateur des cinq sens, la structure sous le regard sculptural et la dimension poétique de l’architecture. Il a été le commissaire de l'exposition sur la collection de cartes postales de Le Corbusier au CIVA (Bruxelles) ; Le Corbusier, la passion des cartes, CIVA, Bruxelles, 2013. Il a enseigné dans plusieurs Écoles d’Architecture basées à Madrid et actuellement, il est Maître Assistant Invité en TPCAU dans l’École Supérieure d’Architecture de Paris-Belleville.
David Liaudet, artiste-lithographe, enseignant à l’École des Beaux-Arts du Mans.
Architectures de cartes postales : un blog, deux blogs sinon rien
Depuis 2007, la publication d'articles sur mon blog “architecture de cartes postales” me permet de redéfinir la relation entre l’image et l’architecture essentiellement dans la période des Trente Glorieuses. D’abord comme Martin Parr, en accusant la carte postale de “boring”, puis au fil des articles, elle semble bien plus proche Tom Phillips qui la trouve “gripping”.
Ce changement de statut s’appuie sur une analyse des qualités plastiques, historiques et conceptuelles de ce type de document populaire et détaché des architectes et de leurs propres désir d’image. Il s’agit de dire que la carte postale est bien moins un cliché qu’on ne le pense, qu’elle offre une richesse photographique inouïe et qu’elle a su, sans remord, mettre l’architecture moderne et contemporaine à la portée de tous. Il s’agit aussi d’aimer apprendre par ce média cette histoire de l’architecture et aussi, en s'appuyant sur la richesse iconographique inventer récits, narrations et fictions.
Bio-Bibliographie : David Liaudet est artiste, dessinateur d’un complément d’illustrations au Dictionnaire Larousse. Il enseigne les pratiques de l’Estampe et de l’image imprimée au sein de l’école des Beaux-arts du Mans. Il intervient également au près des étudiants sur la question de la représentation de l’architecture.
Membre du Comité de Vigilance Brutaliste, il est aussi à l’origine du classement au titre des Monuments Historiques du centre commercial de Claude Parent à Sens. http://archipostcard.blogspot.fr,
Véronique Boone, doctorante
Documents filmiques et télévisés : de l'enthousiasme à la méfiance. Le cas de Le Corbusier
Documents assez oubliés, Jacques Barsac réalise en 1987 trois vidéos, Le Corbusier par lui-même, qui rassemblent des films, des reportages et des interviews télévisées qui nous présentent l'architecte. Cette collection de documents nous livre un point de vue personnel de Le Corbusier sur son œuvre, et met en avant le défi de ces sources. D’une part, les sources filmées nous donnent un aperçu inédit sur la personne de Le Corbusier, et nous présentent des appréciations et des perceptions de l’époque, tout comme celles faites lors de son centenaire. 25 ans plus tard, avec de nombreuses bases de données filmiques et télévisées numérisées, d’autres questions se posent par rapport à ce matériau.
Pour la thèse, le film comme source est constamment interrogé à travers ses différentes pratiques, ses techniques et ses possibilités. Cette source a nécessité ses propres méthodes de recherche, de classement et d’interprétation. Elle est non seulement un autre type de document propre à l’histoire moderne et contemporaine de l’architecture, mais elle demande aussi une réflexion critique sur l’historiographie par ces sources.
cette photo/carte postale a souvent été réutilisée. Exemple AA n°249 de février 1987 page 37. Comme aussi quelques brochures, même étrangères, reprenant les mêmes photos...
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