Encore un été où je ne serai pas allé à Royan. La plus belle ville du monde s'éloigne de plus en plus et ce n'est pas les routes qui se dégradent c'est le prix de l'immobilier qui devient fou.
Il y a donc un moment dans la vie où il faut se résoudre à comprendre que malgré le travail que l'on a effectué sur son histoire, que malgré les attaches familiales qui vous lient à elle, une ville ne vous appartient plus, vous tourne même le dos ostensiblement pour vous dire que vous ne la méritez plus. En fait, il y a donc des lieux où habiter veut dire autre chose que les aimer et les comprendre.
La promesse que je m'étais faite à l'été de mes douze ans sur la plage, cette promesse essentielle et qui a certainement fondé plein d'autres choses que je suis devenu maintenant, une promesse constructive donc, je me dois maintenant, aujourd'hui d'y renoncer.
Est-ce grave ? Certes non mais c'est au mieux triste, c'est aussi le ferment bien puissant d'une dépression en attendant que cela tourne en colère.
Je ne vivrai pas dans l'espace que j'ai appris à définir, dans celui que j'aime, dans celui qui fut le moteur de beaucoup de mes joies intellectuelles et points de vue que vous lisez sur ce blog.
Faut-il vraiment habiter ce quelque part pour que ce lieu vous appartienne ? Ou, mieux, faut-il vraiment habiter un lieu pour que vous lui apparteniez ? Finalement, si j'en crois mon ressentiment : oui.
Car ce qui remplace cette promesse c'est un point fixe, un retour, une indigénéité peu amène de me consoler puisqu'elle sonne comme, non pas un retour aux sources, mais comme une glue, comme si mon envol était contrarié par mes pieds pris dans le béton. Un poids donc.
Chaque fois que je trouve une carte postale sur Royan aujourd'hui, je ressens ce poids, je revis cet échec. Je sais que ces cartes postales ne seront plus des promesses mais des pis-aller, des écrans à une dépressive nostalgie, la pire, celle du ressentiment donc et aussi, je l'avoue, d'une forme d'injustice qui fonctionne par le pouvoir d'achat et non par le pouvoir d'aimer.
Parfois, je m'en veux même d'avoir popularisé cette ville, de l'avoir rendue attrayante, d'avoir trop chanté sa beauté. C'est ma calanque de Marseille à moi.
Je vais tout de même continuer de vous montrer des cartes postales de Royan. Je vais continuer d'y croire, de faire marcher ma lanterne à projections intérieures. Je voudrais fondre sur la ville comme les bombes en 1945.
J'ai, je crois maintenant, bien fait de donner ma collection de cartes postales de Royan aux archives de la ville. Aujourd'hui je n'y arriverais plus, je n'en aurais certainement plus la force à moins que, surtout, en lieu et place d'un sacrifice cela serait perçu pour moi aujourd'hui comme un abandon.
Voilà donc ce qui s'apparente à un relevé de compteur. Le compteur des jours heureux que j'aurais dû y vivre :
Je commence par cette carte postale des éditions Cap très abimée mais qui possède un puissant détail : Notre-Dame y est en chantier. On note aussi que le Portique est encore présent qu'il n'a pas été détruit par l'équipe municipale stupide de l'époque mais il sera un jour reconstruit ce portique, je vous le promets. Pour info, cette carte postale fut expédiée en 1958.
Poursuivons avec cette carte postale moins commune d'un morceau de la rue Gambetta par les éditions d'Art Videau. La ville est à son apogée, tout y est encore beau, de cette beauté de la rigoureuse et moderne Reconstruction.
Encore un beau morceau de ville avec cette carte postale des éditions de l'Europe expédiée en 1961. Notre-Dame est achevée mais on note que le chantier de la barre de Foncillon, lui ne l'est pas. Petite précision postale pour les collectionneurs, cette carte fut tamponnée avec une représentation du Palais des Congrès pour un salon international des fleuristes !
Et voilà la plus belle ville du monde depuis son ciel. On peut facilement en comprendre le plan d'urbanisme et sa grand clarté. La Poste n'est pas encore défigurée. Une très belle vue aérienne des éditions Berjaud.
Voilà le Portique ! Comment a-t-on pu croire que c'était une bonne idée de détruire ça, faut-il être con mais con. C'est n'avoir rien compris au sens de la ville, à son dessin, à la construction d'un chemin de vision sur la ville et la mer. Au fond, on devine le marché encore en construction et l'ancien centre commercial provisoire. Une magnifique édition Combier.
Et dans l'autre sens, ça donne ça ! Le marché est achevé, sa blancheur fait toute l'image de cette carte postale Artaud pour Gaby. On connait le nom du chanceux pilote photographe : Michel Le Collen ! Quel veinard vous faites ! La carte fait l'effort de nommer l'un des architectes du marché : Monsieur Ursault.
Redescendons et retrouvons le marché grâce à cette carte postale des éditions de l'Europe. Rien à ajouter que le frottement de l'horizon sur le haut des courbes.
Voilà la Poste au temps de sa gracilité. On note que le photographe a pris un peu de hauteur depuis les appartements en face. Il va ainsi chercher Notre-Dame au bout de la courbe. C'est malin. Cela permet aussi de bien comprendre le rôle urbain de ce morceau d'architecture séparant le balnéaire à gauche de la ville à droite.
Jour Nuit sur le casino disparu. Massacre patrimonial organisé par Monsieur Jean-Noël de Lipkowski maire alors de Royan. Une faute très grave, très très grave de ce monsieur qui restera dans l'histoire surtout comme le destructeur d'un des plus beaux morceaux de sa ville. On a la postérité qu'on peut Monsieur de Lipkowski.
Le jour c'est une édition Théojac, la nuit c'est une édition du célèbre Monsieur Chatagneau. Où sont vos archives Monsieur Chatagneau ?
Pour finir avec une note optimiste :
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