jeudi 24 septembre 2020

Ambiance jeune et moderne à Ronchamp

 J'aurais tout aussi bien pu titrer cet article : Ronchamp par le menu ! Car c'est bien finalement ce que je vais vous donner à voir pour cette première carte postale qui n'en est pas une. Voici :


D'abord nous nous réjouirons pour une fois de voir moins La Chapelle et un peu plus l'abri du pèlerin car c'est bien lui le roi de cette photographie qui reste anonyme. Pourtant, le photographe fait attention à bien cadrer son abri avec La Chapelle derrière lui en reculant de quelques pas. Cela lui permet aussi de nous mettre en scène les deux constructions de Le Corbusier comme surgissantes dans une trouée végétale. Ah le plaisir du premier plan arboré ! Merci Monsieur Poussin. Le Y du chemin permet de choisir soit d'aller vers la droite et l'abri, soit d'aller directement vers La Chapelle de Ronchamp. Mais voilà le collectionneur de cartes postales bien piégé par cet objet. Tout y indique une carte postale sauf que le dos de cette photographie nous dit qu'il s'agit d'une note permettant de faire l'addition du repas ou du séjour ! On s'amusera des termes utilisés comme cuisine familiale qui est associé à prix modérés... On note que même là, sur le dos d'une addition, il faut bien que le nom de Le Corbusier soit inscrit quelque fois que, fatigué, harassé, en attente d'un réconfortant déjeuner le visiteur aurait oublié à qui il doit tant de beauté. Et Messieurs-dames, l'Ambiance est jeune et moderne ! Alors quoi ? Vous reprendrez bien une petite bière et un jambon-beurre ! Le client devait être content de repartir avec une telle note comme souvenir. Celle-ci est donc restée vierge.



Peut-être qu'avant d'arriver, notre visiteur aura vu La Chapelle de Notre-Dame-du-Haut comme ça :


Perdue dans les branchages, bien loin, on notera que le photographe aura eu l'audace de presque oublier le punctum de son image. Car il faut bien que l'objet de l'image soit connu pour se permettre de ne pas le montrer complètement. Le caillou superbe est donc posé dans l'herbe, petit rocher vers lequel on monte, rappelant que, sans doute, le rôle essentiel de La Chapelle n'est pas tant finalement de la voir que de faire le chemin vers elle. On notera qu'une fois encore le photographe reste modeste car il n'est pas nommé. Charles Bueb ? Qui sait... Mais méfiez-vous, vous n'êtes pas tant que ça dans une nature éloignée de la vie moderne, des fils électriques passent bien dans les branchages.

Revigoré par sa pause à l'abri du pèlerin, il entre enfin dans La Chapelle :


Comment se sent-il pris sous le rouleau, la vague du toit qui roule au-dessus de lui ? Comment cette lumière puissante dont il ne perçoit pas l'origine le touche et fait vibrer en même temps le grain du mur et son sentiment de stupeur ? Quel est donc cet indicible espace sacré dont un petit cube marque l'importance ? L'effort est-il judicieusement récompensé ? L'éditeur nous indique que nous sommes devant La Chapelle Nord, que nous sommes en 1969 mais oublie encore de nous dire qui cadre ce moment. Modestie ? Oubli ? Nécessaire attitude offrant à tous l'occasion de croire qu'il est le premier à voir et regarder ? Seul le nom de l'architecte est imprimé dans un caractère gras qui le fait passer devant les autres informations. Que voulez-vous, la coquetterie trouve toujours son chemin ?

pour voir ou revoir d'autres articles sur Ronchamp :

https://archipostalecarte.blogspot.com/2019/05/avec-des-planches-du-courage-et-du-genie.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2019/10/et-sur-cette-pierre-je-batirai-mon.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2018/06/la-fatigue-ronchamp.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2018/07/les-missiles-sur-ronchamp.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2020/01/ronchamp-du-signe.html

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