dimanche 3 novembre 2019

Marcel Gascoin à la ferme

Aujourd'hui, je ne vous proposerai pas de carte postale mais un article paru dans la revue Le Pèlerin en 1949.
Cette revue provient une fois encore de la collection de mon frère Christophe. Qu'il en soit ici remercié.
En double page centrale, on trouve donc un article dans cette revue encore très pauvre sur la Reconstruction et notamment, pour une fois, sur la Reconstruction en milieu rural qui est souvent oubliée dans les livres d'histoire alors même que la France est encore largement paysanne. D'ailleurs le titre de cet article 3 millions de fermes à rénover permet de comprendre la tâche à accomplir.
Bien entendu, ce désir de faire de ce chaos une chance pour une agriculture moderne rappelle les désirs de Bézard et de Le Corbusier à Piacé. Mais on devine rapidement que là où le duo d'avant-guerre repense totalement l'organisation professionnelle et son rôle dans la société, allant du détail du mobilier aux jonctions routières, ici, dans cet article il est certes question d'architecture rationalisée et de mobilier mais moins d'une redistribution du rôle des campagnes dans la vie nouvelle. Il s'agit aussi surtout de revoir les dispositions du travail des femmes dans la ferme, les tâches y étant sexuées : l'extérieur et la culture aux hommes, l'intérieur et le foyer aux femmes.
Mais ne soyons pas trop rapidement des juges de cette réalité et de cette disposition d'esprit, il faut toujours tenter de voir dans ce qui nous étonne ce que signifie aussi pour nous, aujourd'hui, notre point de vue.
On note par contre que Marcel Gascoin utilise les mêmes dispositifs rationnels pour permettre une libération des espaces avec son architecte M. Maître. Les circulations y sont particulièrement étudiées, les espaces ouverts et là-aussi, l'économie des efforts particulièrement bien étudiée. Le passe-plat attribué à Corbu et Perriand trouve aussi ici son rôle. On note aussi un désir moral de faire du mobilier et de la maison moins un patrimoine familial mais plus un outil pour vivre mieux, plus sainement mais aussi dans le désir d'un équilibre des tâches et des fonctions plus marqué. On ne sait pas, par contre, comment Marcel Gascoin a étudié la vie dans les fermes, comment avec M. Maître, ils ont ensemble réuni les informations et les souhaits des uns et des autres même si, en 1949, la vie à la ferme est encore bien partagée par tous et visible.
On note que les images sont des dessins très sobres, très clairs. Une grande netteté y domine, un vide décoratif presque monacal. Couleurs et lumière dessinant les espaces dans lesquelles les pièces de mobilier viennent se poser doucement. On reconnaît d'ailleurs parfaitement le type du mobilier de Marcel Gascoin et son rationalisme adouci.
Il est difficile aussi de savoir si, par hasard ou par recherches, Marcel Gascoin et M. Maître ont eu connaissance du projet de Piacé. Ce qui est certain c'est que tout cela révèle un état d'esprit, une certaine idée de ce que doit être une fonction. Mais aussi de ce que cette Modernité demande d'abandon à une certaine tradition patrimoniale et cela à l'intérieur d'une revue catholique dont on peut aujourd'hui s'étonner qu'elle ait pu faire écho à cette Modernité : ici, non pas au nom d'une révolution sociétale nécessaire mais au nom simplement de ceux qui vivent ces espaces et ces fonctions. Une dignité retrouvée, sans doute.
Je vous donne ce lien vers un excellent article de Patrice Gourbin écrit pour le CAUE 14. Vous y verrez quelques images du travail de M. Maître, architecte et y comprendrez, par une belle analyse le beau Patrimoine de cette Reconstruction dans le Calvados. Voilà du beau travail.
http://caue14.com/wp-content/uploads/2014/01/architecture_urbanisme_de_la_reconstruction_dans_le_calvados.pdf

Je vous rappelle aussi ce blog, celui qui, en quelque sorte a réinventé Marcel Gascoin, c'est là encore un excellent travail :
http://art-utile.blogspot.com/2012/11/marcel-gascoin-interview-1963.html

Bonne lecture... Bon courage à ceux qui vont prendre leur voiture pour chercher, au fond d'une grange du Calvados, un buffet ou un siège de Marcel Gascoin...

























































































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