lundi 25 février 2019

Je Bandol Dubuisson


Pardon...
Un intérieur cosy, un peu moche, surtout dans le choix du mobilier n'ayant pas su avoir la radicalité moderniste ou la simplicité du confort. Il se la pète un peu ce mobilier, voulant jouer à plus jeune qu'il n'est vraiment. Pourtant ça ne manque pas de clarté, murs blancs, mobilier clair. Mais, dans la teinte marronnasse des sièges, dans la mollesse de la moleskine, quelque chose d'un EHPAD ou d'une clinique privée, quelque chose de peu vivant, de déjà mort. Je reconnais immédiatement sur le mur une reproduction des chevaux rouges de Franz Marc et la netteté de la tasse de thé vide me dit que personne ne vit vraiment là. Nous sommes à Bandol, dans la Résidence "Le Bosquet" dans l'un des studios photographiés par les éditions Aris. Au stylo-bille une main anonyme a écrit Juin 83 sans autre précision. On devine que le studio laisse les couchages derrière un meuble bas ne séparant pas la pièce. C'est lumineux, comme on dit.
Alors donnons-nous rendez-vous là :

Les glaïeuls font le spectacle, petit feu d'artifice de couleur jeté au milieu du salon de la Résidence. Les gros fauteuils un rien mémère anglaise sont disposés pour une conversation sur le temps qu'il fera demain. Personne... pourtant quelqu'un a allumé la petite lampe. Une bibliothèque remplie de livres achetés au mètre, quelques bibelots censés rappeler le Sud, le santon, la cruche, terminent la décoration de ce lieu de convivialité collective. Pourtant un seul élément de mobilier donne soudain à ce salon une nécessaire attention et une curiosité, c'est la table basse en bois et son plateau en céramique....
Roger Capron ?
Bingo !


On la retrouve sur ce site de Brocante !
Courrez vite à Bandol la récupérer !
Au fond de l'image, quelques imitations de mobiliers modernistes à pied tulipe, sans doute aussi à récupérer !
Il fait beau, allons en terrasse :


Que la vue est belle !
Ne jamais oublier cela, l'architecture se regarde aussi du dedans vers le dehors. Admirons les magnifiques poutres de liaisons blanches venant cadrer le paysage, affirmer une géométrie dans le ciel. L'architecte de cette Résidence "Les Bosquets" a certainement tout fait (et bien fait) pour servir cette vue, ce paysage. Il a donné aux résidents l'espace infini d'un horizon lointain, cela permet certainement d'oublier le mobilier.
Et, finalement, le séjour, là, suspendu dans le ciel, sur une terrasse proprette doit être bien agréable.
Une femme écrit au dos de cette carte postale dont la photographie est de Mr Guinet que "chaque studio est séparé, l'entrée est sur la rue, il y a un escalier qui arrive sur la terrasse et le studio. Je suis complètement seule."
Nous n'arrivons pas à savoir si cette solitude est négative ou positive, nous essayons avec Jean de lire tour à tour ce texte avec des tonalités différentes pour comprendre...
Prenons le chemin, descendons :


C'est beau non ?  Ces bandeaux qui s'étirent en courbe ?
On devine bien les petits volumes cubiques reliés entre eux par ce travail de filtre que forment les poutres affirmant avec force la courbure de la construction et, en quelque sorte la dessinant à elles seules. On devine aussi un travail sur une intimité de chacun, chaque cube étant isolé de l'autre par des murs profonds. On voit l'escalier évoqué plus haut par la correspondante. Le jardin est tout neuf, espérons qu'il n'a pas trop bouché la lumière et la vue en grandissant.
Mais voilà, pas de nom d'architecte sur ces cartes postales nous montrant pourtant un très bel ensemble, bien construit, donnant au paysage sa chance et aux résidents à la fois l'intimité et la rencontre.
Il est aisé de savoir qui est venu là, en un seul clic vous trouverez la très belle fiche rédigée par Pascale Bartoli (merci !)  pour  la DRAC Provence-Alpes-Côte d'Azur qui vous donnera Jean Dubuisson comme architecte... Oui, rien moins que l'un des plus grands...
Lisez l'histoire :
http://www.culture.gouv.fr/Regions/Drac-Provence-Alpes-Cote-d-Azur/Politique-et-actions-culturelles/Architecture-contemporaine-remarquable/Le-label/Les-edifices-labellises/Label-Architecture-contemporaine-remarquable-Var/Bandol/Bandol-Residence-Les-Katikias-et-residence-hoteliere-Le-Bosquet

Mais à Bandol, Jean Dubuisson n'a pas construit que "Les Bosquets", il a même un peu avant, comme nous le raconte Pascale Bartoli, construit l'ensemble "Athena", incroyable barre de logements venant mourir dans le rocher, comme un coin dans une buche. Comment peut-on faire plus radical comme geste, plus serein, plus violent aussi ! Quelle beauté contextuelle ! Quelle intelligence de ce que l'architecture se doit au paysage ! Et Paf ! La barre rentrera dans la géologie ! Paf !
Regardez ! Une édition Aris expédiée en 1979 :



Qu'il doit être curieux d'ouvrir sa fenêtre directement contre la pente du terrain ! La radicalité des Modernes c'est bien celle-là, l'expression, non pas d'un dédain pour le paysage mais la construction assumée d'un nouveau, accordant à la nature et au bâti une correspondance de force, d'action, d'ombre et de lumière.
Qui mieux que le grand Jean Dubuisson pour nous offrir cette radicalité. Là, à Bandol, par deux fois, il signe d'un geste architectural son sens du paysage, de la vue. Là suivant les courbes naturelles du terrain ou ici enfonçant avec force sa barre dans cet autre terrain. La géométrie c'est aussi cela, fabriquer des récifs de béton pour la vue et la joie, la Modernité c'est donner au plus grand nombre la chance de ce contact avec ce qu'aujourd'hui on appelle les éléments. 
Merci Monsieur Dubuisson. Merci.
Et rêvons, rêvons que la Ville de Bandol déclare son attachement à cet exceptionnel héritage, que la Ville de Bandol fasse de ces ensembles son Patrimoine, et que, rapidement, une protection leur soit accordée.
Walid Riplet, J-J Lestrade (surtout Walid en fait..., Oh l'autre ! Non mais je le crois pas... si, si...)

Pour voir ou revoir des articles sur Jean Dubuisson :
https://archipostalecarte.blogspot.com/2017/04/dubuisson-bicyclette.html
https://archipostalecarte.blogspot.com/2016/03/dubuisson-sur-la-crete.html
https://archipostalecarte.blogspot.com/2016/01/dubuisson-uckange-grille-chatoyante.html 
https://archipostalecarte.blogspot.com/2015/04/le-surmale-dubuisson.html




























Dernière minute ! Dernière minute ! Dernière minute ! Dernière minute !Dernière minute ! Dernière minute !Dernière minute ! Dernière minute !Dernière minute ! Dernière minute !Dernière minute ! Dernière minute !

Nous avons oublié deux cartes postales de ce programme ! Merci David pour ce rappel !
Sur la première, on nous donne à voir un "studio" dont on devine la petitesse car le lit, la table de salon et ses chaises et le coin repas sont réunis ensemble derrière l'immense baie vitrée. Le choix de la couleur corail orangé nous fait penser au Japon tout comme le dessin des petits fauteuils à la structure noire mat. On aime que l'ensemblier ou la décoratrice ait su faire de ce petit espace un lieu complet et chaleureux, les rideaux sont assortis aux coussins ! Sur la terrasse, la poutre vient bien là aussi dessiner le paysage et la vue, visibles pourtant encore depuis cet intérieur.
La seconde nous montre un espace bien plus grand et plus clair puisque le blanc est dominant dans cette carte postale. On note un gros bloc de service au fond de l'image faisant cuisine et placard. Difficile de savoir ce qui se passe derrière la porte, entrée ou salle d'eau ? La lumière est partout et nous aimons les petits objets au dessin bien marqué qui nous font penser immanquablement au Design italien mais aussi à Morandi. Sur la table basse, David nous signale que le livre est celui des recettes pour la cocotte-minute Seb !
C'est bien entendu un appartement-témoin. Les deux cartes postales sont photographiées pour les éditions Aris par C. Guinet. Qu'il (ou elle) nous écrive !
W.Riplet




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