L'hôpital est de celles-là et même l'amateur d'architecture préférera toujours retarder le plus possible le contact programmatique avec l'établissement.
Pourtant, justement par son programme, justement par sa taille et également par l'histoire du genre, l'hôpital est bien un objet passionnant.
Le vingtième siècle hygiéniste, rationnel et progressiste a souvent vu dans l'hôpital l'occasion d'une véritable proclamation de la Modernité : air, espace, soleil, santé, circulation, collectivité. Ce programme était aussi celui des très nombreux et souvent magnifiques sanatoriums construits dans ce siècle.
En France, nous avons la chance d'avoir un architecte qui a composé des hôpitaux d'une très grande qualité ayant remis à plat l'ensemble du programme et ayant construit en quelque sorte autour de lui. C'est Paul Nelson.
La carte postale et ses éditeurs ont vu là, dans des objets modernes et collectifs, un marché permettant à toute la ruche médicale de servir des images à des patients encore à cette époque en long séjour ou à des employés désireux de montrer leur lieu de travail. L'hôpital agit alors, en terme d'image, un peu comme un habitat collectif temporaire de substitution dont on doit pouvoir montrer la forme, mettre une croix sur une chambre comme on le fait sur l'immeuble du hard french.
Regardez :
Vous voyez comme, après tout, la peau de cette image pourrait sans information nous faire croire à un belle immeuble moderniste d'habitation ?
Il s'agit du très bel hôpital de Saint Lô dessiné par Paul Nelson. L'éditeur Gaby ajoute même que Gilbert, Mersier et Sebillotte ont participé à sa construction. Le premier plan herbeux dans lequel errent des enfants indique une construction toute neuve. Qui osera dire que ce document photographique n'est pas d'une très grande qualité ? La gestion de la lumière, de ce ciel tout juste habité nous donnent bien une représentation solide de cet ensemble. Rien depuis ce point de vue ne fait hôpital. Mais le noir et blanc malheureusement ne donne pas sa chance ici à la polychromie très étudiée de chanter sur l'image. On devine pourtant la fresque de Fernand Léger à l'entrée, mais cachée par les automobiles. Je vous donne un extrait du texte d'Anne Pétillot publié dans son superbe ouvrage Patrimoine Hospitalier qui fait comprendre aussi ce désir d'une couleur presque thérapeutique.
Cette autre carte postale des éditions Artaud nous permet de lire le plan d'ensemble et, sans doute de saisir mieux l'objet de cette construction. Ici, pas de doute on saisit bien l'hôpital mémorial France-Etats-Unis de Saint-Lô. Curieusement l'expéditeur y parle de retour de vacances et de soleil...
Et voici un autre exemple :
Cette fois il s'agit de l'hôpital de Dinan dont la carte postale des éditions Jack nous donne aussi Paul Nelson comme architecte. On devine un hôpital sans doute bien moins grand que celui de Saint Lô et aussi, depuis cette photographie bien plus simple du moins dans sa lecture des volumes. Pourtant c'est aussi un objet parfait de recherches et d'articulations dont l'aspect depuis des images ne donne pas entièrement l'intelligence des fonctions. On peut tout de même depuis la vue aérienne regarder avec quel dessin est fabriquée la liaison au sol offrant tout un jeu de terrasses et de niveaux allant du parking circulaire aux entrées ménagées dans le socle.
Patrimoine Hospitalier
Anne Pétillot
photographies de Georges Fessy.
éditions Scala, fédération hospitalière de France
2004
Le parking de l'hôpital de Dinan ressemble vraiment à une roulette de table de casino!
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