jeudi 1 mai 2025

le goût des églises rudes

L'effet de masse de mes classeurs où sont rangées les églises modernes et contemporaines me permet d'avoir une appétence  pour une certaine école, une certaine typologie de l'Art Sacré du Vingtième Siècle.
On sait que ces églises dans cette période ont eu le droit à toutes les formes et toutes les écoles possibles : du béton rationaliste d'un Auguste Perret, de la fantaisie lyrique d'un Le Corbusier, ou du génie constructif d'un Gillet, la multitude des formes et des écritures est à son comble. Mais il y a donc aussi une école d'une écriture plus modeste, plus paysanne, plus historiciste voulant concilier la Modernité à une tradition, une volonté de modestie un peu revancharde qui, à force de vouloir jouer la carte de l'effacement, hurle un peu trop ce désir de tradition pour ne pas dire de réaction
Il n'y a peut-être pas pire que cette modestie face à l'Histoire, modestie qui voudrait surjouer sa disparition, une architecture d'églises un peu taiseuses, églises un peu rudes, revêches se refusant un peu ostensiblement aux gesticulations modernistes ( et à Vatican 2 ?) ce que par ailleurs, à la vue de certaines expériences, on peut comprendre. Faire la messe dans un bunker est certes l'une des plus belles et subversives idées mais n'est pas forcément une expérience qui est nécessaire à tous et toutes.
Suivez mon regard à l'oblique...

Alors je tente un rapprochement qui je l'espère sera bien compris non comme une vérité mais bien plus comme une certaine sensibilité à cette écriture. Maurice Novarina est sans aucun doute le chef de file de ce genre. Et quelle chance de le revoir, puisque je dois justement ranger ces deux cartes postales de l'église Notre-Dame-des-Alpes à le Fayet.



Cette très belle carte postale des éditions Yvon est imprimée en héliogravure certainement pour l'économie de son édition, la carte postale servant à envoyer un don à l'Abbé Domenget. On note que la carte nous donne quelques précisions architecturales qui semblent importantes à donner aux visiteurs : perron entouré de jardinière, immense toit d'une seule tenue descendant très bas et recouvert de tuiles vieillies, claustra de 10m2 d'ouvertures, clocher en forme de cheminée de chalet savoyard. Oui !

On devine facilement que tous ces détails tentent bien de montrer que l'église hésite entre sa modernité et des signes de la tradition, on dirait aujourd'hui son intégration ou mieux sa...contextualisation...Par contre, le nom de Maurice Novarina comme architecte est absent...L'ensemble est massif, volontairement très ancré dans le sol, la pierre apportant à l'oeil ce sentiment de solidité, de construction faite pour durer, une permanence qui devra traverser le temps des Hommes. On pourrait presque la croire fortifiée, le rapport entre les surfaces et les ouvertures ne laisse que peu de place à un accueil généreux même si les deux cylindres de l'entrée font croire à un geste d'ouverture. 


Cette autre carte postale nous montre que l'église joue avec son terrain en pente. Là encore, tout respire la massivité et la couleur ne permet pas de relativiser ce sentiment, au contraire même. C'est quand même un rien raide. Aujourd'hui, une visite sur Google Maps nous fait comprendre que l'église est littéralement encaissée, enchâssée dans un creux très peu amène à nous laisser rêver à un quelque élan que ce soit. Au contraire, l'église est comme tapie dans son trou. C'est assez triste...ou, au contraire, à l'image de ce désir d'indifférence au Monde. Cette carte postale C.A.P nomme bien l'architecte Novarina mais pas son photographe. La carte fut expédiée en 1964 avec le beau timbre de Jean Cocteau. 



Vous ne lui trouvez pas un petit air de famille ? Cette fois, nous sommes en Bretagne à Vannes-Trussac dans le Morbihan devant l'église Notre-Dame de Lourdes par l'architecte Meyer qui est bien nommé sur cette belle carte postale coloriée Artaud. On retrouve ce sentiment de rigueur, d'âpreté que la pierre massivement utilisée renforce. J'adore ça ! Ça se refuse un peu, ça ne veut pas tout donner de suite ! Car les images de l'intérieur sont assez spectaculaires surtout pour ce qui est du traitement superbe de sa charpente. Rien ne doit être plus étonnant que le contraste entre le dehors et le dedans au moment du passage du porche. On a l'impression que le toit sous son poids a enfoncé les murs dans le sol. Toute la place est donnée au toit et au jeu des tuiles. Est-ce que la Bretagne et la Montagne se retrouveraient sur le terrain d'une certaine rigueur de la Foi ? Est-ce que Meyer connaissait les églises de son camarade Novarina ? Sans aucun doute...



Cette autre carte postale, Combier cette fois, nous permet de mieux apprécier les proportions de l'église et donc la place gigantesque accordée au toit devenu l'épiderme essentiel de la construction. Notez à nouveau le beau jeu des tuiles agissant comme des pixels éparpillés. Les huisseries des portes en bois massif et appliques de métal forgé ne laissent aucun doute sur le désir d'historicité du lieu. Il faut sans aucun doute que l'église Notre-Dame de Lourdes donne immédiatement à l'oeil son sentiment de solidité. J'aime beaucoup ce dessin très épuré, très radical, un peu générique et sans fioritures dont le seul agrément est la lumière qui fait friser les ombres des pierres qui s'opposent au lisse des tuiles faisant image. On sent sous la main le grain des blocs de pierre. C'est une déclaration claire et un peu appuyée d'un désir d'appartenir à une histoire du granit.



Beaucoup plus modeste, voici donc La Chapelle de la Toussuire en Savoie. l'architecte est nommé sur cette carte postale Combier, il s'agit de Mr Toulouse, architecte à St-Jean-de-Maurienne. 
Quel objet modeste ! Quelle plaisir de voir sur un si petit projet cette envie tout de même de faire signe, de porter à la fois un élan et un abri, presque une cabane, un refuge. Le pignon et le petit campanile en pierres brutes font tout le travail de sa radicalité, on devine à l'arrière un travail de parpaings ou de béton. Cette Chapelle est donc un lieu et un signe. D'ailleurs, maintenant, elle s'appelle Notre-Dame du...ski !
Vous trouverez ici des images de son intérieur et les amateurs de design devraient en aimer les chaises...
Il s'agit donc bien d'un lieu d'accueil dont la modestie de son architecture correspond parfaitement au désir d'abord d'une altérité, d'un lieu simple mais chaleureux de repos et de recueillement. En ce sens, son architecture remplit son rôle et c'est très bien comme ça.

Pour revoir Novarina si joyeusement présent sur ce blog :
...et sur le premier volume :

Pour les églises modernes allez-là, 166 articles vous attendent...
...ou encore là...où 110 autres articles vous attendent également :


lundi 28 avril 2025

Cette image pue le sexe

 Il y a certaines images portées par des cartes postales qui semblent tenir un monde, une fiction, un certain imaginaire avec lesquels je comble les vides du réel disparu. Il semble bien que le Club Méditerranée soit aussi, rien que dans sa prononciation, l'occasion d'une culture commune qui se met en place à son invocation. Et puis, depuis Houellebecq ou depuis les Bronzés, ces lieux portent aussi une certaine attente de libéralité des moeurs.

Cette image pue le sexe :



Plein de couples alanguis sur des poufs Design écrasés par le poids des corps jeunes, des bras passés par dessus des cous, des mains qui se touchent...La charge érotique retrospective et plaquée ne fait pour moi aucun doute. Comment ne pas se laisser déborder ainsi par ce que nous avons pris l'habitude de croire bien plus que par ce que nous voyons (ou pas) de cette image.

J'aime surtout, je l'avoue, le moustachu à droite, son avant-bras puissant, sa solitude, son regard franc. Il n'y a aucun doute sur ma projection. On pourrait aussi, sérieusement, pour faire genre études supérieurs ou historien du Design s'attarder sur l'agencement mobilier de cet espace. On pourrait en décortiquer les signes de la modernité, d'un esprit chaleureux du moment : couleurs chaudes mais atténuées, boules de papier en grand nombre, oeuvre murale géométrique, cendriers oranges, murs blancs. Et...bien entendu...les fameux sièges qui ressemblent à quelque chose entre les Togos de Michel Ducaroy et les sièges automobiles genre Matra de l'époque. Très bas, très mous, je le redis, ils ne sont pas fait que pour s'asseoir. Non, je ne crois pas seulement projeter mes propres désirs mais je pense bien simplement souligner ici un esprit du corps de l'époque : avachi. Le corps glisse alors vers le sol, il ne peut lutter contre un allongement, cherchant avec les talons à retenir la glissade entre le Skaï des assises et le Tergal des pantalons. Je n'ai pas retrouvé l'éditeur de ces chauffeuses furieusement seventies. 

Vous remarquerez que tout le monde sait que nous sommes là, que le photographe fait son image, on devine même que certains prennent une pose clairement signifiante des rapports qu'ils entretiennent les uns, les unes et les autres. On fabrique là un souvenir, on fait acte d'une déclaration de proximité sensuelle. Laissez-moi le croire (et donc le voir).

Par exemple, la jeune femme du fond est à la fois collé au jeune homme à sa gauche alors que celui à sa droite pose son bras dans son dos. On remarque que les chauffeuses semblent trop grandes pour une seule personne et trop petites pour deux, obligeant les couples à des proximités très marquées. J'adore ces agencements d'espaces, le jeu des jambes, des bras devant trouver de la place, tentant de se toucher.

Et même si, finalement, au vu de ma projection, l'origine de cette image n'a pas beaucoup d'importance, sachez tout de même qu'il s'agit d'une carte postale G. Carminati non datée pour le Club Méditerrannée de Livigno.

articles à relire :

https://archipostalecarte.blogspot.com/2018/08/very-hard-design.html

https://liaudetlithographies.blogspot.com/2024/08/houellebecq-chroniques-martiennes-sur.html





vendredi 25 avril 2025

Paris, deuil, demi-deuil

 Un petit lot de cartes postales de Paris me rappelle les anciennes enveloppes bordées de noir pour annoncer les deuils. Et, étrangement, ces cartes postales nous montrent effectivement un bâtiment qui risque de disparaitre sous son allure actuelle pour une autre bien plus problématique. C'est à dire en fait...disparaitre : la Tour Montparnasse.

Il y a dans ce petit lot acheté d'un coup quelque chose de très nostalgique, de nocturne, comme un crépuscule tombant sur la ville.




Les cartes postales bordées de noir sont de la maison d'éditions Image'In dont on sent le désir de faire de la carte postale un peu différemment, un rien plus classe. Rien que le nom de la maison d'édition en dit long de ce désir de faire autrement. Le bord noir surligné d'une couleur agit comme un encadrement offrant un contraste avec la photographie. Oui, c'est ça, c'est un peu chic. On notera que la cohérence visuelle ainsi désirée ne correspond pas avec un seul désir d'image car les photographies ne sont pas signées des mêmes photographes. La cohérence graphique de la maison Imagine'In tient donc essentiellement de ce cadre noir mais peut-être aussi du choix des monuments photographiés. Il faudrait voir leur fonds pour le savoir. Mais où est-il ?

Trois cartes nous montrent donc la magnifique Tour Montparnasse dans sa livrée brune, marron glacé. Comme j'ai déjà raconté ma crainte de son avenir, je ne le referais pas ici et maintenant. Je dirais simplement que ces cartes postales seront bientôt des archives d'un monde architectural disparu, détruit, éradiqué, massacré. 

Autre monde détruit : le Forum des Halles. Dans ce lot se glisse donc cette carte postale comme le signe d'un rassemblement pompidolien : une réunion de famille d'un Paris détesté qui c'était voulu moderne. On note que la maison d'éditions Chantal (où sont vos archives ?) donne bien le nom des architectes C. Vasconi et G. Pencreac'h et celui du sculpteur, Julio Silva. La photographie de ce lieu disparu est de D. Barbier qui a choisi la nuit et les lumières chaudes pour nous donner à voir cet espace qui ainsi ne manquait pas totalement de grandeur et de poésie. Et, là, du coup, pour cet espace, c'est bien un Paris maintenant en deuil qu'il nous faut saluer.

Pour revoir le Forum des Halles sur ce blog :

https://archipostalecarte.blogspot.com/2019/03/les-halles-cest-vachement-bien-rate.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2014/04/un-forum-ou-des-halles-pour-la.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2015/01/chose-perdue.html
https://archipostalecarte.blogspot.com/2015/10/fabio-rieti-lhomme-qui-marchait-sur-les.html 
https://archipostcard.blogspot.com/2010/07/lettre-de-monsieur-pencreach-au-maire.html 
https://archipostcard.blogspot.com/2011/12/le-trou-desdedans-la-memoire.html
https://archipostcard.blogspot.com/2008/09/faire-le-plein-par-le-trou.html




lundi 21 avril 2025

Ce n'est pas un chantier, c'est une promesse



Finalement qu'est-ce qui me pousse à m'installer dans l'exploration de photographies dans lesquelles je ne suis pas ? Pourquoi cette joie étrange de vouloir y entrer, en reconnaitre les détails, d'y projeter mon imaginaire dans des signes imprimés sur un papier ? Qu'est-ce que cela remue en moi de si important, de si urgent, nécessaire et aussi un peu vain ?
Cela doit remplacer quelque chose. Une réalité peu magique ?
Imiter une vraie présence sur place, dans le temps précis du moment, dans une déambulation réelle...?

Croyez moi ou pas mais j'entends distinctement le bruit des voitures, les pneus font crisser le gravier qui reste sur le Boulevard Gambetta qui vient juste de recevoir son asphalte. Je sens sur ma tête le soleil un peu direct, un peu trop franc et pourtant si recherché pour la langueur qu'il impose. Difficile de ne pas s'interroger alors sur le temps qu'il faudra aux arbres maigrelets tout juste plantés pour offrir une ombre nécessaire au plaisir de la promenade, du lèche-vitrine. En regardant mieux, je m'aperçois que les vêtements ne sont pas ceux de l'été.
Les commerces ne sont pas tous encore ouverts, les galeries sont encore en chantier. Comme il devait être passionnant et troublant de circuler ainsi dans une ville toute neuve, pleine de l'espoir d'effacer le drame récent de sa disparition. La netteté des lignes, la blancheur des matériaux, la franchise d'un plan d'urbanisme devaient donner le sentiment d'un exotisme assez étonnant. On participait à quelque chose, comme un enfant lorsqu'il sort le jouet tout neuf de sa boite. Savoir que l'on va vivre avec son usure à venir, la fabriquer même.
Bien entendu je crois fermement derrière cette image que la tranquillité que je ressens est réel. Aucun drame ne passe sur cette figuration d'un certain bonheur retrouvé. C'est limpide.
Presque vide, comme pour Urbino et ses villes idéales. Le papier-journal sur les vitrines ou le blanc de Meudon peint à la va-vite seront bientôt retirés pour laisser place, enfin, à l'apothéose des Trente Glorieuses.
J'admire que le photographe des éditions Berjaud (où sont vos archives ?) ait pu trouver un point haut pour photographier cette rue, ce Boulevard Gambetta. J'aime qu'il y ait vu un potentiel marchand, un sens à la ville, un désir d'en partager ainsi sa modernité. Savait-il qu'il produisait aussi une archive ou, mieux encore, un paysage pour mon coeur ?

Ce point de vue est rare. Il fallait un certain culot pour penser ainsi, qu'au bord de la mer, les vacanciers ou habitants seraient heureux de trouver une représentation de la ville. Que cela méritait d'être communiqué. Une rue, des commerces, un certain ordre du Monde offrant à voir la résurrection de Royan. Un élan.
Et la dame qui devant le trottoir encore tout défoncé fait le tour pour ne pas abimer ses escarpins doit tout de même se dire que c'est bien pratique de trouver en ville un nouveau marchand de chaussures, un opticien, une boutique de mode parisienne. Il parait que l'on y vend aussi d'extraordinaires chapeaux de paille pour la belle saison. Il faudra y aller avec Josette, demain, en remontant de la plage avant d'aller au marché.

Ma carte est un peu abimée, certes, mais je ne pouvais la laisser dans la boite à chaussures. Je me moque de cet état, presque cela me ravit. Le ciel est ainsi habité d'un orage. Royan ? Royan ?...j'arrive...

mardi 15 avril 2025

La main de Fatima El Khili risque d'être bien lourde pour Marcel Lods à Rouen

En France, il y a donc un club très fermé d'élus qui rêvent de devenir des stars par la destruction ou l'éradication de Monuments Historiques. Faire du bruit autour serait leur manière d'accéder à un certain statut social, d'être repérés en quelque sorte. Fontainebleau, Clichy, Grand Quevilly, Nanterre...Et maintenant Rouen.

On sait que les Lods de Rouen, aussi appelés "verre et acier" n'ont jamais été compris par les bourgeois rouennais. Voici, alors même que les derniers exemplaires sont protégés au titre des Monuments Historiques qu'il y a donc des personnalités de la petite bourgeoisie locale assez courageuses pour se croire plus aptes à juger de leur importance historique. Sans doute une manière de venger sa classe comme dirait Annie Ernaux.

En l'occurence, on sait qui se croit ainsi investi de ce pouvoir de jugement historique : Madame Fatima El  Khili.

C'est cette dame, rappelez-vous en, la veste verte c'est pour faire écolo-responsable et qu'on la reconnaisse dans la rue, genre méthode Tondelier (puissance de la sémiologie, Barthes aurait adoré) :



Tout le monde sait comment cette personnalité est une spécialiste de l'Architecture Moderne, comment elle est une grande connaisseuse des enjeux patrimoniaux. On le sait. Remarquez que l'on n'attend plus grand chose de la politique écolo-socialiste de la Ville de Rouen en matière de Culture. Allez faire un tour dans la cour de l'Aitre St Maclou pour vous rendre compte de comment un cimetière chargé d'histoire est devenu un petit centre commercial sans âme pour artisans potiers babacool, ce qui est un comble pour un ancien cimetière et une ancienne école d'Art. Regardez comment la Ville de Rouen a laissé le Palais des Consuls être totalement dans les mains de la grande Hôtellerie qui en a fait... 

La Ville de Rouen en ce sens est bien écolo-socialiste c'est à dire qu'elle fait semblant. Et ce que Madame Fatima El Khili appelle une verrue (c'est pas bien d'attaquer le physique) est juste l'un des plus beaux et rares exemples d'architecture métallique et préfabriquée de France, certes, architecture qui a tendance à prendre feu facilement quand elle dérange les plans des aménageurs de territoire et promoteurs immobiliers...oups...oh...mince...trop tard...quel hasard...on voulait justement s'en débarrasser...vraiment...c'est ballot...

Pendant des années, les "Verre et Acier" ont marqués l'histoire d'un aménagement humaniste et moderne de la Ville de Rouen. Pendant des années, ils ont participé à l'Histoire de l'Architecture, au point donc qu'une commission des Monuments Historique avait cru bon de les protéger comme un exemple à maintenir sous les yeux des français. Mais voilà, Madame Fatima El Khili elle, elle sait, elle est une personne qui a du pouvoir, qui veut exister politiquement en étant celle qui aura pris la responsabilité de détruire du Patrimoine Rouennais, rien moins qu'un Monument Historique ! Faut en vouloir en terme d'ambition personnelle, le matin, se lever et pointer du doigt ainsi un coupable. Ne rien avoir à faire d'autre ?

Et rassurez vous, Fatima El Khili, les cathédrales brulent aussi. Voulez-vous aussi, au nom de la sécurité, les détruire toutes ? Les cathédrales ? Vous voyez ce que c'est, les cathédrales, y en a une à Rouen qui d'ailleurs a pris feu il y a peu.

Nous espérons donc que les autorités patrimoniales de la Région Normandie auront le même courage que pour le classement en s'opposant le plus rapidement possible à ce désir fou et ridicule qui disqualifie de fait ceux qui y pensent. Déclasser un Monument Historique voilà donc la ligne de l'écolo-socialisme à la rouennaise. Le maire a les dents longues on le sait, ses conseillères municipales ont les mains lourdes et les idées courtes. Tout est donc avec l'écolo-socialisme rouennais une question de longueur, de longueur de point de vue.

Et Madame El Khili qui disqualifie donc la parole des spécialistes du Patrimoine nous dira en quoi son "opinion" vaut jugement et de qui ou de quoi elle croit en avoir l'autorité. Vous verrez, elle nous répondra "mandat électoral", un truc démagogique comme ça. Il faut dire que pour fabriquer de telles verrues, il faut un peu d'intelligence conceptuelle et ça ça ne se trouve pas au fond d'une urne apparemment. Il s'agit bien de sa part et de celle de son équipe d'une attaque culturelle et politique, de rien d'autre.

L'écologie en actes à Rouen c'est donc détruire des Monuments Historiques ! Bravo Madame !


Pour revoir Marcel Lods sur ce blog et défendre l'héritage colossal qu'il a laissé dans l'agglomération de Rouen : 

https://archipostcard.blogspot.com/2012/11/territoire-marcel-lods.html








lundi 14 avril 2025

La ville moyenne, l'architecture moyenne

Il est parfois difficile de comprendre la raison exacte de l'existence de certaines cartes postales, de saisir leur destinée en quelque sorte. C'est bien le cas pour celle que je montre à l'instant :


Dans le paquet de cartes postales que je fouille hier à la Harengère (environ 2000...) je n'en sélectionne pour vous (et pour moi) qu'une quarantaine et celle-ci fait bien exception à plus d'un titre et à même soulever un sourire de doute en la trouvant. Comment aurais-je pu croire que je ferai encore ce genre de découverte étrange ? Nous sommes donc devant une carte postale qui nous montre un plan de masse d'une ZAC, celle de Petite Bretagne à Chevilly-Larue. Au verso, la carte postale sans nom d'édition nous révèle même le nom de l'urbaniste-architecte auteur de ce plan de masse : D. Binachon. Mais pourquoi donc (et surtout pour qui ) a-t-on pris la décision de publier ainsi et de diffuser un tel plan de masse ? Qui pour regarder cela, qui pour sélectionner cette image pour une correspondance ? Pourtant un monsieur a bel et bien envoyé cette carte ce qui me vaut de la trouver et de vous la montrer. Comment et où a-t-il trouvé cette carte postale ? La carte fut expédiée en 1994 mais semble un peu plus ancienne mais pas tant que ça. On est donc bien loin du désir de chanter la Modernité comme nous avons pu le voir avec certaines cartes de maquettes par exemple. Il s'agit bien plus d'objet communicationnel édité par la municipalité pour diffuser son action. Mais depuis où ? La Mairie ? Le café-tabac du coin ? Comment cela était diffusé ? Bien entendu, mon premier geste fut d'aller chercher des informations sur ce D. Binachon et j'ai fait chou blanc. Rien...L'autre réflexe évident c'est de faire un petit tour sur Google Map pour voir si tout cela fut bien réalisé et voir aussi à quoi cela ressemble dans le réel de la ville de Chevilly-Larue...Et là...Comment dire...Il est d'ailleurs difficile de penser que depuis ce plan de masse de la ZAC on puisse rêver à une telle réalité, alignement d'une banalité assez triste, on dirait du Jacques Riboud...Tout est éteint, tout a subi une puissance émoliente éradiquant tout geste de contemporanéité au profit d'un dessin sage pour ne pas dire ennuyeux. Le plan semble vouloir mettre en avant une certaine idée de la rue, alignement de plantations d'arbres et de quelques mouvements d'ouvertures créant aux carrefours quelques percées (des places) pour que l'oeil se repose. Et qu'est-ce que cela remplace ? Tout cela sent bien le désir d'une ambition pépère, proprette, une ville adoucie, molle, un rien démagogique dont la banalité n'aurait d'autre ambition que de faire taire une autre idée de la Ville. C'est moyen en quelque sorte mais d'un moyen revendiqué, c'est presque un style, celui d'un compromis par le bas. Mais quoi faire d'autre que ce désir de village éternel ? On note une attention à la végétation retenue dans des jardinières, on note quelques circulations piétonnes bien senties, on note des façades toutes identiques comme produites par un logiciel mêlant les entrées suivantes : balcons, petits immeubles, peu de hauteur, style indéfinissable, couleurs éteintes (beigeasse), netteté des crépis. Un bonheur de ville...Peut-être que ce n'est déjà pas si mal ?

Dans le même lot de cartes postales, je tombe sur ces deux cartes postales de Créteil. Je sais alors que je trouve-là la dernière envolée du désir de faire des cartes postales de la ville moderne. Je montre à mon amie Rose qui m'accompagne comment c'est sans doute-là les dernières productions d'éditeurs sur des villes nouvelles. Il ne fait aucun doute que depuis (la fin des années 80) on ne chantera plus par les cartes postales les avancées des recherches urbanistiques et architecturales. Et cette esplanade des Abymes de Créteil est bien à l'image de ce dernier geste, geste ayant perdu tout son souffle, épuisé par l'histoire, reluquant sur les signes d'une ville faussement éternelle : arcatures, petits toits, chiens-assis, bow-windows, couleurs fades et petit fronton ayant une ambition sculpturale ratatinée. On fera un portique, on pavera de pavés parisiens, on illusionnera le piéton comme un Port Grimaud du pauvre. J'ai, malgré  tout, encore un peu de tendresse pour ce style, cette tentative urbaine. J'y vois un décor certes mais sans doute aussi possiblement, avec le temps, une griffe urbaine qui devra se patiner. Que voulez-vous...je veux rester optimiste.



La première carte est une édition rayon (où sont vos archives ?) avec une photographie de J.-N. Duchateau que l'on a déjà rencontré sur ce blog.

La deuxième est une édition Abeilles-Cartes (où sont vos archives ?) avec une photographie de P. Viard.


dimanche 6 avril 2025

Bel air et désir d'un dimanche d'Art Sacré

 Mon frère Christophe aime aussi me ramener de ses promenades sur des foires à tout quelques images glanées pour moi. Je n'ai donc même plus besoin de me lever tôt pour ramener sous vos yeux quelques belles cartes postales d'architecture moderne. Quelle chance !

Alors comme je ne maitrise pas les choix qu'il fait pour moi, les cartes arrivent dans des ensembles un peu disparates constitués par ce que mon frère croit (justement) être mes désirs d'images. C'est toujours intéressant de ce voir ainsi imité.




Dans ce petit paquet de cartes postales, j'ai envie de commencer par cette belle barre à la grille magnifique dont le désir de crier sa modernité est poussé dans une forme de paroxysme allant de la belle typo du nom de l'Hôtel Bel Air au bleu d'un ciel un rien forcé. Magnifique lumière. Malheureusement, pour l'instant, je n'ai pas trouvé le nom du ou des architectes de cette merveille moderniste, affirmant avec force son ambition d'être dans un style international bien reconnu. On aime que la façade de verre soit absolument et parfaitement occultée par tous les rideaux tirés. Un désir du photographe ? Pas de nom d'architecte donc, pas plus de nom de photographe, il s'agit d'une édition Anjalik Giftshop. Mais où vais-je ranger cette carte postale ?


D'un tout autre programme, voici donc une très belle carte postale d'une église, celle de Caudan dans le Morbihan dont nous connaissons au moins l'un des architectes. En effet, cette église est signé de : Guillou et Lindu. Tout est à l'unisson d'une image parfaite : modernité tranquille d'une église qui laisse son toit se poser sur le sol, couleurs pastels adoucies et tendres (le champ élargi du bleu et du gris), silence de l'espace vide. Comment ne pas tomber amoureux immédiatement de cette belle carte postale des éditions France Publicité qui ne nomme pas son excellent photographe.

Vous trouverez toute l'histoire de ce magnifique lieu d'Art Sacré ici : https://www.paroisse-caudan.fr

Pour finir sur une très belle note de béton comme on l'aime ici :


L'église St-Désir de Lisieux est l'oeuvre de rien moins que Robert Camelot, architecte. Les vitraux sont de Max Ingrand. On remarque que cette carte postale est cadrée dans la verticale pour une construction tout en longueur, comme si le photographe voulait lui redonner de l'élan. Comment ne pas tomber sous le charme de ce très beau bloc parfaitement dessiné jouant des occultations et des fermeture et dont l'épiderme de béton brut fait toute la radicalité. Cela me donne furieusement envie de retourner à Lisieux pour l'explorer ! Il fait...beau...

On note une chose étonnante : le premier plan ! Regardez cette petite troupe d'animaux en faïence posés sur le gazon...j'avoue ne pas bien comprendre leur présence, leur rôle, leur sens. Cette très belle architecture est donc servie par un bon éditeur : Alfa.



Pour revoir le travail merveilleux de Robert Camelot sur ce blog :

https://archipostalecarte.blogspot.com/2018/05/en-cachan-un-beton-technique.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2015/03/ronds-scolaires.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2015/03/a-st-martin-lecole-est-bienfaite.html

https://archipostcard.blogspot.com/2008/03/affaire-non-classe.html

https://archipostcard.blogspot.com/2012/11/le-lievre-et-la-tortue.html

https://archipostcard.blogspot.com/2010/11/altra-au-sicob.html

etc.....