dimanche 6 avril 2025

Bel air et désir d'un dimanche d'Art Sacré

 Mon frère Christophe aime aussi me ramener de ses promenades sur des foires à tout quelques images glanées pour moi. Je n'ai donc même plus besoin de me lever tôt pour ramener sous vos yeux quelques belles cartes postales d'architecture moderne. Quelle chance !

Alors comme je ne maitrise pas les choix qu'il fait pour moi, les cartes arrivent dans des ensembles un peu disparates constitués par ce que mon frère croit (justement) être mes désirs d'images. C'est toujours intéressant de ce voir ainsi imité.




Dans ce petit paquet de cartes postales, j'ai envie de commencer par cette belle barre à la grille magnifique dont le désir de crier sa modernité est poussé dans une forme de paroxysme allant de la belle typo du nom de l'Hôtel Bel Air au bleu d'un ciel un rien forcé. Magnifique lumière. Malheureusement, pour l'instant, je n'ai pas trouvé le nom du ou des architectes de cette merveille moderniste, affirmant avec force son ambition d'être dans un style international bien reconnu. On aime que la façade de verre soit absolument et parfaitement occultée par tous les rideaux tirés. Un désir du photographe ? Pas de nom d'architecte donc, pas plus de nom de photographe, il s'agit d'une édition Anjalik Giftshop. Mais où vais-je ranger cette carte postale ?


D'un tout autre programme, voici donc une très belle carte postale d'une église, celle de Caudan dans le Morbihan dont nous connaissons au moins l'un des architectes. En effet, cette église est signé de : Guillou et Lindu. Tout est à l'unisson d'une image parfaite : modernité tranquille d'une église qui laisse son toit se poser sur le sol, couleurs pastels adoucies et tendres (le champ élargi du bleu et du gris), silence de l'espace vide. Comment ne pas tomber amoureux immédiatement de cette belle carte postale des éditions France Publicité qui ne nomme pas son excellent photographe.

Vous trouverez toute l'histoire de ce magnifique lieu d'Art Sacré ici : https://www.paroisse-caudan.fr

Pour finir sur une très belle note de béton comme on l'aime ici :


L'église St-Désir de Lisieux est l'oeuvre de rien moins que Robert Camelot, architecte. Les vitraux sont de Max Ingrand. On remarque que cette carte postale est cadrée dans la verticale pour une construction tout en longueur, comme si le photographe voulait lui redonner de l'élan. Comment ne pas tomber sous le charme de ce très beau bloc parfaitement dessiné jouant des occultations et des fermeture et dont l'épiderme de béton brut fait toute la radicalité. Cela me donne furieusement envie de retourner à Lisieux pour l'explorer ! Il fait...beau...

On note une chose étonnante : le premier plan ! Regardez cette petite troupe d'animaux en faïence posés sur le gazon...j'avoue ne pas bien comprendre leur présence, leur rôle, leur sens. Cette très belle architecture est donc servie par un bon éditeur : Alfa.



Pour revoir le travail merveilleux de Robert Camelot sur ce blog :

https://archipostalecarte.blogspot.com/2018/05/en-cachan-un-beton-technique.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2015/03/ronds-scolaires.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2015/03/a-st-martin-lecole-est-bienfaite.html

https://archipostcard.blogspot.com/2008/03/affaire-non-classe.html

https://archipostcard.blogspot.com/2012/11/le-lievre-et-la-tortue.html

https://archipostcard.blogspot.com/2010/11/altra-au-sicob.html

etc.....

mardi 4 mars 2025

Promenade post-moderne dans l'attente d'une soutenance de mémoire

 Nous avions rendez-vous à l'École Nationale d'Architecture Paris-Val de Seine pour participer à la soutenance de mémoire de Carla Lengrand, mémoire consacré à la carte postale d'architecture. En attendant ce moment sérieux mais aussi joyeux, il m'a fallu déambuler dans un Paris dont je ne me souvenais pas que j'aimais tant m'y perdre, nez au vent, sans but, sorte d'errance d'un piéton baudelairien se laissant emmener ici par une ombre, là par un passage piéton, ou là encore par l'écho d'une lumière reflétée sur une façade. Ah...le romantique que je suis...







D'abord dans le quartier de la Bastille, je voulais revoir le monstre affreux, atroce, génialement moche qui à lui seul me semble résumer toute la politique de Mitterrand : boursouflée de prétentions presque staliniennes mais camouflée derrière des plaques agrafées sur la façade pour en cacher l'épaisseur sans doute somptueuse du béton qui lui structure. Que c'est laid cet Opéra Bastille ! On rêve d'une décrépitude qui lui donnerait dans sa ruine (qui commence si on en croit les filets sur sa façade) une réalité rétro-futuriste de décor pour Star Wars et on attend de voir sur ses marches un Dark Vador en guenilles. Bref...Vous m'avez compris, j'adore le détester. On notera que Madame Dati, n'ayant rien d'autre à faire, est venue, il y a peu, soutenir la Labelisation de cette machine mitterrandienne. Elle a du adorer faire cette révérence à Mitterrand et son héritage Madame Dati !


Sans doute, le plus beau morceau !









Peut-on faire plus accueillant ? Plus ouvert ?

Mais au gré de ma fuite, je tombe sur un clocher un peu vert, un peu neuf, un peu étrange hésitant entre franchise moderne et campanile de campagne : une église ! Immédiatement devant le matériau de sa façade, j'entends mon cerveau qui me sert à l'envie le mot Post-Modernisme. Et je ne sais pas trop quoi faire de ce surgissement qui me semble toujours douteux quand on l'use sur n'importe quelle production un peu étrange et historiciste, architecture qui s'amuse à la fois donc d'un retour en arrière et d'une franchise déguisée. Je crois que notre génération aura eu comme mission de redéfinir (souvent mal)  le Brutalisme, je crois que celle qui vient va devoir se saisir du Post-Modernisme. Il est temps. Mais je me demande bien comment elle va le saisir, comment défendre ce qui, je l'avoue, pour moi, reste une sorte de retour réactionnaire. Mais je me vois, me régalant de cette église, de cette écriture indéterminée, de ce presque mauvais goût ne sachant que faire à la fois de ma jubilation (la surprise) et d'un sourire en coin prenant (avec un peu trop de hauteur de ma part) ce geste architectural que je ne sais pas bien saisir finalement. C'est bien cela qui m'agace. Je fais quelques clichés, je cherche le nom de l'architecte, tout cela dans une église avec ses portes largement ouvertes sur un Paris ensoleillé, accompagné par les répétitions de chants qui rythment ma visite.On peut donc encore vivre ce genre de moment dans ce Paris ! L'église ? C'est Notre-Dame de l'Espérance, l'architecte c'est Bruno Legrand. J'en aime surtout la façade sur la rue du Commandant Lamy. Je comprends pourtant assez vite que ce qui m'agace ce n'est pas tant son dessin mais ses matériaux, surtout l'espèce de couleur un peu molle qui la recouvre. On sent bien un vrai désir de créer une capillarité entre la rue et l'entrée, en ce sens la façade avec son clocher est complexe,  avec un mur de verre assez osé et malin. Définitivement, c'est bien ce matériau et cette couleur que je n'aime pas. L'intérieur tient surtout par un plafond à caisson qui fait le spectacle, le reste est assez dépouillé pour donner au mobilier liturgique toute sa puissance et c'est assez réussi, surtout pour ce qui est du bénitier très spectaculairement positionné dans l'entrée, offrant une vraie rencontre, en faisant un moment-clef de cette visite surtout, comme en ce jour, où les portes sont grandes ouvertes sur le monde. Superbe !


Mais la surprise du jour...ce fut de trouver des cartes postales de l'église en vente à coté des cierges comme au bon temps jadis des églises d'Art Sacré du Vingtième Siècle ! Ouf ! J'ai de la monnaie sur moi et me voilà ravi de compléter ma collection de cartes postales ! J'ai des joies simples, que voulez-vous...On notera que ces cartes se laissent remplir de cette teinte verte très blanchie qui caractérise Notre-Dame de l'Espérance. On note aussi que la géométrie abstraite du mobilier et de l'agencement saute aux yeux tout comme certains gestes architecturaux ne sachant comment faire à la fois sobre ou symbolique. À trop vouloir en faire, on n'en fait peut-être pas assez. Immédiatement, j'y vois l'héritage d'un Szekely. Pour en savoir plus sur cette église : 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Église_Notre-Dame-d%27Espérance_de_Paris




Par ordre d'apparition, deux premières cartes de Dahliette Sucheyre, photographe et les deux suivantes par C. Barriquand-Treuille.

En poursuivant ma promenade, je tombe sur cet hôtel Ibis qui m'amuse avec tous ses efforts pour être une vraie architecture, essayant de camoufler les cellules des chambres superposées les unes sur les autres avec quelques détails qui tentent donc surtout de camoufler la boite à dormir. Vous me trouverez compliqué mais je trouve ça désespérant et touchant à la fois. On appellera ça une gratuité fatiguée.




Pour conclure, je dois d'abord remercier Carla Lengrand pour son mémoire et pour la place qu'elle m'y a accordée. Il est toujours heureux et encourageant de voir les échos du travail qu'on produit et d'avoir entre les mains la réalité de ceux-ci. Bravo Carla pour votre travail !
Ce moment fut aussi l'occasion de se rappeler la place du piéton, sa hauteur, son cheminement dans le bruit, les couleurs, les petits accidents, les collages que produisent les villes. C'est ce qui en fait toute la valeur. Ma promenade m'ayant porté jusqu'aux Tours Duo de Jean Nouvel, je peux vous dire que parfois, il semble bien que les architectes oublient la place du piéton ou nous dirons qu'au moins celle-ci n'est pas la plus primordiale. Pourtant Jean Nouvel a été à l'école de la rupture la plus poétique qui soit du corps qui marche : la Fonction Oblique. Et ce n'est pas les pentes en acier Corten du minuscule jardin tristounet au pied des Tours Duo qui y changent quelque choses. Mais vous me direz que la geste architecturale, son baroquisme obligé par le désir de rester un Star Architecte en modelant bien plus la hauteur que la circulation peuvent aussi sans doute être beau. Des tours un rien dégingandées.
Je ne sais pas bien. Je ne sais pas bien alors depuis quelle vigie on se doit de saluer le génie d'un architecte, d'en saisir le dessin.
Je remercie donc ici aussi Xavier Dousson pour son invitation. Je me suis redécouvert en cette journée comme un marcheur de villes. La solitude ça oblige un certain ordre du mouvement.























vendredi 21 février 2025

La Banlieue c'est le Paradis de Mohamed Bouhafsi et Nathalie Conscience


D'abord, je dois l'avouer, je me suis dit que cela allait être, une fois encore, un film d'un positivisme douteux réalisé par un local ayant réussi, sorte de vengeance de classe, celui du retour de l'enfant prodigue en sa banlieue. On n'échappe pas à quelques amalgames, quelques imprécisions habituelles et qui continuent de m'agacer, on y parle très mal de l'architecture et on y reconnait aucun particularisme, tout valant tout, de Émille Aillaud à Labourdette.

On s'amuse quand Michel Cantal-Dupart nous laisse croire à un rapport entre Kandinsky et l'architecture des angles droits de nos banlieues... Pauvre Kandinsky devenu le fautif ! Franchement...Enfin...pour une fois, ce n'est pas Corbu que l'on traite de fasciste de l'angle droit !

Mais ce qui sauve donc Mohamed Bouhafsi dans sa tentative c'est qu'il est question beaucoup de lui, de sa vie de famille, de son quartier. Il part de quelque part et surtout il part de son histoire. Certes, je l'ai dit plus haut cela ne l'empêche pas de construire un roman personnel voulant collé au roman habituel de la banlieue et des grands ensembles mais cela change vraiment tout. Alors qu'on se dit qu'on va avoir un festival de témoignages de ceux qui en sont sortis jouant les héros de la vengeance de classe voilà que la radicalité de leurs prises de paroles, sans enrobage, dans une honnêteté parfois déconcertante nous donne l'envie de reconsidérer des positions. Il y a là, dans ce film, un vrai effet du réel. Cela nous change un rien de ce que nous avons vu il y a peu.

Et ce n'est justement pas une question de légitimité. C'est ça qui est réussi.

Par exemple les prise de paroles de Sofiane Zermani sont éloquentes, touchantes, dures et âpres. C'est parfait. Quand surgit aussi l'histoire de la violence du père de Mohamed Bouhafsi, là encore on est touchés par la mise en avant directe, presque impudique mais si éclairante d'un cas particulier qui devient universel. On est aussi touchés par le fait que la réalisation et les témoignages savent remercier les agents de leur émancipation. Le témoignage de Anne-Elisabeth Lemoine sur les violences sexuelles est aussi un moment qui nous laisse dans une vraie émotion. Le documentaire tente donc d'une prise de parole  à des témoignages directs de rendre l'écho des politiques de la ville dans les corps de chacun. On note que c'est bien le maillage des petites interventions, des micro-aides, des tentatives individuelles et associatives qui semblent toujours être les seules réponses valides, efficaces et acceptées. En cela aussi, ce film est intéressant. Des actions moléculaires qui produisent de grands effets, une proximité aussi bien mieux acceptée.

Mais d'ailleurs...d'où vient ce désir, en ce moment, de nous raconter l'aventure des grands ensembles et de la banlieue ? Quelle est l'urgence ? Récupération politique ? Tentative de faire d'un corps social complexe, dans son regroupement historique, un corps électoral qui pourra être ramassé autrement que par une extrême gauche devenue démente et absente de ce film ? Est-ce que de Nicolas Sarkosy à Fabien Roussel en passant par François Hollande et Emmanuel Macron (d'ailleurs assez juste à son tour) on tenterait justement de cercler cet électorat dans un front républicain attendri, comme se reconnaissant par son histoire commune et chaotique ?

Qui sait...

Alors il ne fait aucun doute que beaucoup de choses continuent de m'agacer dans ce documentaire. Par exemple, je voudrai rappeler que certes le prolétariat de l'émigration a participé à l'aventure des Trente Glorieuses mais oublier qu'il y avait aussi un prolétariat de souche (je ne sais pas trop comment l'appeler autrement) n'est pas une bonne idée. Le prolétariat n'a pas besoin de ce genre de hiérarchie de la pauvreté. 

Certes, donc, il s'agit bien là d'un monument dressé par Mohamed Bouhafsi à sa propre émancipation, à sa propre histoire. Mais comment le lui reprocher ? Comment faire avec ce sentiment d'avoir réussi à partir de là tout en ne pouvant, bien entendu, rien renier de ceux qui vous y ont aidé et y sont parfois restés ? Le prolétariat connait bien ce sentiment. L'émancipation est-elle forcément une trahison de classe ? Est-ce aussi l'histoire de Nathalie Conscience ?

On regrettera donc que l'architecture une fois encore n'est vue que comme un instrument de la défaite. On regrettera qu'au delà des images des habitantes et habitants pleurant devant les explosions des tours, il ne soit aussi question d'un Patrimoine architectural et urbain à préserver, d'une culture urbaine à mieux sauvegarder.

Mais je pense que Mohamed Bouhafsi en a sous le pied...nul doute qu'il reviendra là, qu'il nous fera un second volume, nous racontera l'histoire de la nouvelle génération. Et, c'est vrai que quand c'est le coeur qui parle il est parfois maladroit. Mais c'est le coeur...que voulez-vous...on lui pardonne.

J'aurai bien voulu trouver des cartes postales de ce quartier du Franc-Moisin mais je n'en possède pas. Il y  a tant de cités sur mes blogs que vous n'aurez aucun souci pour vous en faire une représentation probable. Mais on va chercher !

Allez-là : https://archipostalecarte.blogspot.com/search/label/hard%20french

https://www.france.tv/documentaires/documentaires-societe/6908881-la-banlieue-c-est-le-paradis.html#about-section



mardi 18 février 2025

Royan, la vie est belle

 S'accumule sur le coin de ma petite table de travail, juste à la droite de mon ordinateur un petit tas de cartes postales de Royan qui attend...qui attend quoi au fait ?
Je ne sais pas trop...Un regain d'intérêt ? Sans doute. Une acceptation de la distance qui me sépare de la ville et qui s'agrandit chaque jour ? Sans doute aussi...
Je dois même vous avouer que je me suis demandé si je me devais de vous montrer ces nouvelles images qui ne sont ni particulièrement spectaculaires, ni particulièrement rares pour vous dire quelque chose de nouveau que je ne vous aurais pas déjà dit dans mon livre, livre que vous avez tous lu (bien entendu) ou sur mes blogs.

Alors, je vous propose une promenade sans trop d'ambition, tranquillement, le nez au vent de la Modernité, comme si nous étions ensembles dans la plus belle ville du Monde.
Allez ! On commence ?





Je commence par une carte assez rare qui nous montre le Bar Métropole au milieu du boulevard Aristide Briand. Le marché central est tout au bout, là-bas. Je crois que l'on reconnait bien là la première étape de la Reconstruction de Royan, un peu l'esprit Perret et Art Déco avant la révolution brésilienne. Mon compte-fil me prouve que nous ne sommes pas seuls et un garçonnet nous observe. Il pose. Aujourd'hui la vérandalisation* a produit cette obscénité en grignotant sur l'espace public. Mais que fait la Police (du Patrimoine) ? 
Une belle édition du très sérieux et solide éditeur L. Chatagneau.



Un autre coin de la ville, un coin que j'aime tout particulièrement car la concentration de l'écriture moderne y est à son comble. Les fidèles auront reconnu l'Hôtel Continental à droite, la flèche de Notre-Dame de Royan qui dépasse et le très bel îlot à gauche (Roger Mialet, architecte ?)  qui me fait toujours penser à Tel-Aviv, je ne sais pas bien pourquoi. On note que toutes les fenêtres sont marquées au blanc de Meudon, comme on le fait des constructions en fin de chantier. Serions-nous donc au moment prochain de sa livraison ? La carte postale est une édition C.A.P sans date ni photographe.


Encore un peu de la rue. Ici c'est la rue de la République. On perçoit bien comment cet axe est celui de l'automobile ! Et qu'il serait bien triste d'oublier cette particularité de l'urbanisme de la ville...Là encore, tout le travail de claustra et de persiennes est aujourd'hui massacré par des vérandas immondes. On attend que les pelleteuses qui travaillent sur le Front de Mer viennent ici faire le même nettoyage. Allez ! Hop !
Les amateurs d'automobiles anciennes se régaleront de ce petit musée à ciel ouvert de la production automobile de cette époque. Pas d'éditeur pour cette très jolie et vivante carte postale. On imagine le photographe, au milieu de la chaussée, qui se fait klaxonner par la Simca Aronde qui arrive vers lui !




Pour une fois, je montrerai aussi le verso de cette carte postale Glatigny (éditeur assez peu connu) qui nous montre le très beau et utile Portique malheureusement disparu. Il parait qu'il va être reconstruit bientôt...y parait...Faudrait voir Monsieur le Maire pour en parler avec lui...On est donc précisément le 15 aout 1957 à 10h30, c'est ce que nous dit l'affranchissement. Comme il était beau ce  Portique, intelligent, indispensable à l'écriture urbaine de la ville de Royan ! Regardez comment les gens savaient quoi en faire ! Un balcon sur la mer, un filtre entre le balnéaire et la ville ! Magnifique geste architectural ! Erreur fondamentale de sa destruction...




Voilà une belle vue aérienne Combier qui nous montre Royan sous la Reconstruction. Beaucoup de parcelles encore vides, des grues sur le Front de Mer, le premier plan de la photographie pourrait presque nous laisser croire à une ville de campagne. En bas, on devine des baraquements provisoires et, un peu plus haut, on voit bien l'immeuble des Ponts et Chaussée, lui,  bien construit. On serait donc vers 1952 ! Ce très très beau bâtiment est de Salier, architecte. Il est, par contre, encore totalement isolé.


Comment résister à une telle carte postale de Notre-Dame de Royan qui affiche la déclaration de sa naissance ? C'est encore Mr Chatagneau l'éditeur. On note qu'au dos figurent bien tous les noms des architectes et ingénieurs : Gillet Architecte, Laffaille Ingénieur Conseil, René Sarger Ingénieur et Mr Hébrard Architecte d'opération. Combien de temps Notre-Dame fut qualifiée de "nouvelle église" ?



Pour finir, une carte finalement assez rare. Il s'agit de l'intérieur de l'église Notre-Dame de l'Assomption, l'autre église moderne de Royan, un peu moins connue. Je peux même vous avouer que...je ne suis jamais entré dans celle-ci...Oui...je sais...
Promis ! Je le ferai à ma prochaine visite si elle est ouverte !
Cette belle photographie que l'on doit aux éditions Arum-éditions est de B. Mercier. On note que l'on retrouve Mr Hébrard comme architecte accompagné de messieurs Baranton et Bauhain. La carte fut expédiée en 1977. 
J'espère que vous avez passé un joli moment en ma compagnie dans la plus belle ville du Monde. Et si vous voulez voir un reportage sur Notre-Dame de Royan et retrouver Charlotte de Charette, je vous conseille ce lien :

Il ya tellement de cartes postales de Royan sur mes blogs que je vous laisse compléter cet article par des lectures à rebours.

*j'emprunte ce néologisme à Charlotte de Charette.


dimanche 16 février 2025

Radicalisme brutaliste d'un photographe et de ses architectes



 Je ne sais pas très bien quoi vous dire de cette architecture car, simplement, je n'en sais rien d'autre que ce que nous montre cette magnifique carte postale et la suivante. Je veux dire qu'il m'arrive bien plus souvent d'être touché par les images que par les lieux, c'est le revers possible de ce genre d'exercice qui consiste à discourir bien plus sur des ensembles de lignes, de valeurs, de tonalités qui composent une image que sur une visite des lieux dont l'image ramassée serait l'ultime souvenir d'une sensation suspendue. Pourtant, lors de l'achat, je n'ai pas hésité. J'y ai trouvé quelque chose de fort et d'assez indéfinissable produit par l'organisation spatiale de cette photographie représentant un collège à Chichester dans le Sussex. Le photographe de ce détail d'architecture est Eric de Maré et les architectes sont Bridgwater, Shepeard et Epstein. J'aurais aimer, comme mon coeur m'y orientait pouvoir dire les Smithson et leur école de Hustanton. Mais non. Et j'avoue que je ne savais pas l'importance de ce photographe d'architecture dont je découvre l'histoire et les autres images ici: https://www.ribapix.com/eric-de-maré

Il faut donc croire que je suis tombé sur un certain accord entre une architecture de qualité et un photographe de renom. Mais revenons à l'idée que l'image est peut-être plus construite que l'architecture, que ma vision y plonge comme dans un autre réel, que l'organisation des jeux plastiques me permette de comprendre ma jubilation. Cadre dans cadre dans cadre. Horizontalité et verticalité parfaitement tendues. Attente du moment parfait qui place le soleil et fabrique l'ombre idéale. Placement du sujet qui ponctue l'image. Lumière très dure offrant vrais blancs et panel infini des gris. On ne sait plus si c'est le dessin des espaces et des profondeurs réglés par les architectes qui a construit tout cela ou bien Eric de Maré qui a su les voir, peut-être plus durement, que leurs créateurs. Trop ? C'est une image très minérale qui me fait penser à une certaine idée de places italiennes ou de cloitres du Moyen-Age, voir, soyons fous, d'espaces très japonais où les vides successifs fabriquent les émotions spatiales entre les passages ombrés à outrance et les lumières solaires radicalisées par des cadres. Je ne sais pas très bien pourquoi mais je suis particulièrement attiré par le fait que les poteaux ne touchent le sol qu'avec l'aide d'un peu de vide. On sait que Reyner Banham  définit le Brutalisme par la création (non pas de constructions en béton) mais dans la simplicité radicale des matériaux, sans fioriture, n'indiquant que leur rôle structurant, la force qu'ils conduisent. On y est non ? Tant pis si vous ne me suivez pas...J'aimerai quand même cette photographie et ce moment spatial.
Après le choc esthétique et son infinie joie, les question affluent. Est-ce que ce photographe avait l'habitude de produire des cartes postales ? Pourquoi je ne trouve pas d'information très précise sur ces architectes ? Pourquoi le hasard m'a mis dans les mains ces deux cartes postales ? Est-ce que les éditions A. Gordon Fraser Card avait un goût particulier pour l'architecture moderniste ? Est-ce que Martin Parr possèdes ces deux cartes postales ? Aime-t-il ce photographe ? Comment se fait-il que je ne connaissais pas ce photographe pourtant bien repéré par l'histoire ? Comment Eric de Maré voyait son travail sur le vernaculaire en frottement contre celui des Becher ?

J'apprends (comme tout le monde) ce que Eric de Maré disait de son travail : " Le photographe est peut-être le meilleur critique d'architecture, car, par un cadrage et une sélection judicieux, il peut communiquer des commentaires directs et puissants à la fois élogieux et protestataires : il peut également découvrir et révéler une architecture là où aucune n'était prévue."
On note qu'on trouve bien des architectures modernes et brutalistes dans le fonds du photographe.

Ne croirait-on pas lire une critique de le Corbusier à Lucien Hervé lui rappelant que l'architecte c'était lui. Que, parfois, à tort (ou ici à raison) le photographe fait plus architecture que les architectes eux-mêmes ? N'est-ce point là la chance de la photographie ?


L'autre carte postale nous faire encore jubiler. Tout le vocabulaire moderne y est comme appuyé et vraiment la légèreté et la lumière me font bien penser à cette école d'un pragmatisme tempéré. La maigreur des IPN qui font tout le travail structurel offre à cette image la force des verticales qui ponctuent l'espace. C'est léger, léger, léger. Eric de Maré a parfaitement ordonné son cadre, calant toute la lumière sur les fenêtres à droite (ça brule presque la netteté) et la lumière vient taper sur le premier poteau à gauche. Vous la voyez la dame ? Le volume de cette salle est vraiment superbe. La description de la carte postale A Gordon Fraser Card me fait rire : Chichester Sussex Bishop Otter College Dining Hall. Véritable épreuve pour mon mauvais accent anglais ! On note le très beau mobilier et le choix de très belles chaises et de lampes. Au fond de l'image, j'ai bien l'impression que ce pourrait être le plan du College.

Comme je ne suis jamais rassasié de belles images, je me demande si Eric de Maré a fait d'autres cartes postales de ce lieu ou d'autres. Comme le désir de commencer des recherches sur cet auteur. Et pour info, dans mon exemplaire de le brutalisme en architecture de Reyner Banham je ne trouve aucune entrée ni pour ce photographe ni pour ces architectes. Voilà bien un mystère...


mercredi 12 février 2025

Faire un autre pèlerinage à Pessac

 


Voilà une bien belle piste si ce n'est une belle carte postale. Du moins, on peut avoir plaisir à ce type de cartes postales mêlant graphisme, typographie et mise en page que l'on trouve un peu kitch et qui font le bonheur de nombreux d'entre nous aujourd'hui.
Et puis, au moins, elles nous permettent d'entrée en contact avec un ensemble architectural assez remarquable (et peu connu me semble-t-il) d'architectes très étonnants : Messieurs Salier et Courtois.

Par bonheur l'éditeur La Cigogne nomme bien donc les deux architectes. Mais déjà nous pouvions un peu en lire l'écriture sur les deux photographies. Bien entendu, d'abord la façade qui mélange découpes de béton blanc très Opt-Art faisant vibrer des petits fanions triangulés comme gardes-corps des balcons et murs aveugles en béton de gravier lavé, apportant un contraste entre massivité et légèreté. L'autre photographie, sans doute pour nous montrer que dans cette Résidence Compostelle tout est bien conçu, affiche le petit centre commercial construit avec, là aussi, un jeu de pointes et de triangles formant un dynamisme certes simple mais de bon aloi. 
Ce que ne montre pas du tout cette carte postale, c'est l'étendue de la Résidence qui est bien plus grande que ne le laisse penser la carte postale ! Comment pourrions-nous deviner depuis ce point de vue qu'il s'agit d'un véritable quartier articulant plusieurs bâtiments autour d'un très grand parc protégé en son centre. Merci Google Earth de nous le donner à voir.
Vous trouverez toutes les informations sur ce bel ensemble en lisant cette fiche très bien faite et qui nous informe surtout que cette Résidence Compostelle a reçu le Label Architecture Remarquable.





Assez typique donc de la production de cartes postales de cette période, cette carte postale s'adresse donc surtout aux habitants nouvellement arrivés voulant montrer leur lieu original d'habitation. Dans une ville comme Pessac, c'est bien normal que l'Architecture Moderne (et moderniste) de l'École de Bordeaux trouve ainsi un moyen de diffusion. 

Je vous conseille également cette petite video même si la fin nous fait un peu peur sur les "transformations" à venir...

Bien entendu, pour les amoureux de Royan que nous sommes, les architectes Salier et Courtois c'est surtout ça :

Pour ceux qui aime Pessac pour le pèlerinage à Le Corbusier :