Des petites tables couvertes de nappes en tissu basque, une profusion de fleurs et de plantes formant un décor tropical et beaucoup de lumière, tout cela pourrait en effet ne pas être très intéressant. Ce qui fait pourtant l'intérêt de cette carte postale c'est bien justement ce qui semble en avoir disparu : l'architecture.
Car, voyez-vous, (justement non !) voyez-vous nous sommes dans une œuvre architecturale très particulière en France. Il s'agit de la serre-restaurant d'Orléans la Source, œuvre d'un très grand architecte, Louis Arretche et d'un ingénieur du métal, Jean Prouvé. Ainsi l'aspect arachnéen de l'ensemble, sa disparition due à sa qualité presque diaphane est le sens même de la qualité de cette serre demandant lumière, hauteur, légèreté et transparence. Une forme de disparition programmatique en quelque sorte que l'objet serre réclame. Ici, l'œuvre est totale. On trouve dans l'excellent ouvrage de Monsieur Amouroux Louis Arretche infolio toutes les informations nécessaires sur cet ouvrage aujourd'hui inscrit à l'inventaire des Monuments Historiques mais qui malheureusement est à l'abandon... On ne vient plus manger à Orléans la Source alors que ce quartier, si proche du F.R.A.C Centre spécialisé dans l'architecture en est une extension naturelle, une expression en plein air de très grande qualité dont la promenade devrait faire partie de la visite dudit F.R.A.C. Centre.
Elle pourrait en être une extension parfaite pour des expositions...
Cette serre-restaurant devait accueillir les visiteurs des Floralies et a la particularité de proposer des points de vue et des promenades intérieures permettant de parfaitement jouir des plantes mais aussi de l'intégration de la serre dans le parc. Mêlant une structure en lamellé-collé (qui fera une histoire complète de ce procédé ?) et le métal, elle est l'une des seules ainsi totalement réussies et rappelle aussi la belle association de Jean Prouvé avec Novarina pour la buvette Cachat à Évian. Quelle énergie locale, quelle association, quelle institution aura le courage de sauver de l'oubli cette merveilleuse "cathédrale de verre" qu'au-delà du classement, seule la fréquentation peut maintenir dans son état d'origine ?
Je vous donne quelques images provenant du livre de Monsieur Amouroux mais je vous conseille surtout de le lire !
Louis Arretche, Infolio
éditions du Patrimoine 2010
Dominique Amouroux.
isbn : 978-2-88474-185-9
Mais Jean Prouvé c'est aussi ça.
Nous sommes à Lille, à la Foire Internationale. Ne vous précipitez pas à Lille pour aller voir cette merveilleuse façade de votre adulé Jean Prouvé car elle fut détruite en 1993...
La première carte postale nous montre un peu au loin le Palais de la Foire et ce que l'éditeur Yvon appelle l'autoroute. La carte postale est datée de 1963, elle est imprimée en Draeger 301. La seconde carte postale est une édition Télé-Perla et fut expédiée en 1967. On y devine un peu mieux le travail de Jean Prouvé mais on voit surtout les tulipes et les drapeaux !
Peut-être que, cachés dans une cave, dans un hangar, des morceaux de cette façade attendent une vente aux enchères pour être cédés à de riches fétichistes de l'œuvre du "quincailler de génie" comme le nommait avec beaucoup de tendresse et de respect Charlotte Perriand. C'était une autre époque...
En décembre 1951, l'Architecture d'Aujourd'hui proposait un très bel article sur ce Palais de la Foire de Lille. Il était donc aisé d'en comprendre l'importance, c'est sans doute pour cette raison qu'aucune mesure de sauvegarde n'a eu lieu... On notera que l'article donne toute sa place à l'ingénieur D. Douniaux et souligne la polychromie somptueuse réalisée par Del Marle ! N'oublions pas de nommer les autres architectes : Herbé et Gauthier.
Dans le même numéro de cette revue Architecture d'Aujourd'hui, une pleine page fait de la publicité pour les panneaux Jean Prouvé produits par Studal. Le Palais de la Foire Internationale y est représenté !
Et, un peu plus loin, on trouve même une publicité pour, cette fois-ci, le mobilier de Jean Prouvé ! Foncez ! Il y a peut-être encore dans la cave une chaise qui traîne...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire