lundi 9 décembre 2013

Banana hard and very long

Hummmm... Tu aimes le Hard French ?
Hummm... Tu aimes quand il est bien dur et bien long ?
Hummm... Tu aimes les records, quand ça n'en finit plus, quand le plaisir de l'architecture est à son comble, tu aimes quand ça se courbe, quand ça va profond, si profond dans l'image ?
Alors viens voir ça :



Tu es comblé ?
Nous sommes à Rouen, Rouen-les-sapins exactement au pied de la banane, le plus long immeuble d'Europe nous précise la carte postale la Cigogne. Nous sommes, je crois, devant une sorte d'absolu du Hard French avec sans doute le Haut-du-Lièvre à Nancy. On reste, devant ce type de construction et d'architecture totalement abasourdi par son infini possible. On pourrait, dans un rêve, dans un cauchemar, croire que depuis cette ligne, le logement social en France est ainsi un énorme et continu mur qui circule sur la France, mur superbe de dureté. Presque... asocial.
Car si on se réjouit des errements de Superstudio, nous pourrions tout autant nous réjouir de la banane de Rouen. On sait aussi que l'architecture du Hard French à su s'enticher de surnoms comme Banane ou muraille de Chine ou les 4000 alors que souvent les noms officiels ont plus à voir avec la Cité de l'abreuvoir, les Courtillières, Cité des Bleuets, des Jeunets, etc... On se souvient  de Monsieur Tougard l'architecte de cette construction. Il est aisé aujourd'hui de dire l'échec sans doute de ce type de solution. Pourtant... ce qui est en cause ce n'est certainement pas le gigantisme, ni même la situation de cette barre qui offrait aux habitants l'une des plus belles vues au sommet de la colline. Ni même l'idée d'une infinitude, d'une régularité car, je crois comme Monsieur Parent que rien n'est plus beau qu'un mur seul courant indifférent dans le paysage. Non, sans doute que ce qui fonde l'échec de cette architecture c'est l'absence d'architecture. Car, une chance pareille, un lieu pareil, une énergie pareille auraient dû offrir l'occasion d'une architecture donnant mieux que la simple réponse fonctionnelle et hygiéniste d'un minima vital. Il y avait là l'occasion de faire fort, rude, mais surtout humain, social. Une forme continue est possible si elle ne naît pas de l'extérieur. Il aurait fallu penser à cette masse humaine vivante, tentant d'habiter. Il aurait fallu que cette masse ne soit pas pensée comme une foule à ranger dans un tiroir.





Et sur la carte postale expédiée en 1965, Micheline a fait une croix au stylo bille. Au verso, elle souhaite de Bons Souvenirs de Rouen. Elle ne se plaint pas, elle ne dit rien de l'architecture. Non. Elle fait ce geste simple de se situer sur cette ligne. Pour que Yolande la retrouve mais sans doute aussi pour se retrouver elle-même. Sans doute que Micheline a aimé pouvoir ainsi dans le glacé de l'image graver sa place. Car il y fait beau, car il y avait de l'eau chaude, car la vue était belle là-haut, car les voisins sont gentils, car c'était tout neuf, car on pouvait ranger sa voiture, car les enfants pouvaient jouer en bas, car il y avait de la lumière avec les grandes fenêtres, car on habitait un lieu étrange et puissant : le plus long immeuble d'Europe. Habiter un record c'est sans doute, tout de même, habiter quelque part.
Voici l'une des cartes postales que nous avions éditées lors de l'instabilisation(s) du Comité de Vigilance Brutaliste au PLOT HR.
On y voit au fond de l'image la banane maintenant coupée :




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