samedi 9 décembre 2023

Non, Monsieur Hammache, le centre commercial de Claude Parent...

 ...à Ris-Orangis n'est pas classé au Titre des Monuments Historiques contrairement à ce que vous affirmez  dans un récent article du Journal des Arts !
Par contre, celui de Sens est bien inscrit.
Comme sur ce blog, bien entendu, nous savons quelque chose de ces deux dossiers de Ris-Orangis et de Sens et de son traitement catastrophique et honteux par la DRAC Ile-de-France pour celui de Ris-Orangis, je crois qu'il est nécessaire ici de rétablir la vérité.



J'ai donc, par courrier à sa rédaction, informé Mr Hammache de son erreur. Pour l'instant, mon courrier n'a pas du trouver Mr Hammache car je n'ai pas eu l'honneur d'une réponse.
Comme indiqué dans ce courrier, je n'en veux pas à ce journaliste dont je lis régulièrement les articles à mes étudiants. Au contraire, cette erreur est significative d'une permanence de ce dossier dans l'esprit des critiques d'architecture et certainement aussi dans celui des habitants et des spécialistes du Patrimoine. Il faut dire que sept années de travail ça marque forcément un peu les esprits. Et puis, cela montre aussi comment ce centre commercial de Ris-Orangis de Claude Parent est passé dans la mémoire des combats patrimoniaux et c'est déjà une victoire contre ceux qui s'y sont opposé. (suivez mon regard en fonction oblique)
Par contre, j'avoue ne pas bien comprendre comment une telle erreur peut passer dans un journal si sérieux. Tout le dossier de Ris-Orangis et son traitement ralenti (euphémisme) par la DRAC Ile-de-France sont disponibles ici-même sur ce blog...
À moins, (imaginez ça une minute !) à moins que le centre commercial soit bel et bien classé ! Ce serait une incroyable découverte !
À moins aussi que la DRAC Ile-de-France ait bien informé le journaliste de ce classement...ce serait une étrange conclusion !

On notera, et c'est assez amusant, que la photographie utilisée dans l'article de Sindbad Hammache reprend le point de vue sur le centre commercial publié dans le journal local lors de la demande de classement. Cela signifie sans doute que ce point de vue est bien celui qui représente le mieux ce lieu. 

Ci-dessous, le lien vers le blog  :












mardi 28 novembre 2023

Le Mirail en danger ! Signez l'appel !

Merci de signer l'appel contre les démolitions ANRU du Mirail ! Ça suffit !
Malheureusement l'actualité des grands Ensembles et de leur  Patrimonialisation de certains d'entre eux continue de nous montrer l'indifférence des autorités patrimoniales et culturelles et des sociétés privées ou publiques de logements sociaux. on ne parle même pas du ministère de la Culture qui est aux abonnés absents depuis belle lurette !
La Tour des Célibataires de Mourenx appartenant à un bel ensemble dessiné par Maneval et Douillet vient de tomber dans l'indifférence générale. 
Le Mirail est attaqué depuis longtemps maintenant (l'erreur de la destruction de son université est une faute grave) et il y a encore, heureusement des citoyens qui se mobilisent.
Envoyez à cette adresse un courriel avec indiqué : je signe l'appel avec votre nom et qualité :
non.aux.demolitions.anru@gmail.com
Merci !

David Liaudet
Walid Riplet
J.J. Lestrade.
Pour revoir le Mirail sur ce blog :


Je vous montre ça :









lundi 16 octobre 2023

Peter Downsbrough agace l'oeil

 Nous avons souvent nommé ici des artistes ayant joué avec les cartes postales modernes, ayant produit des cartes postales, ayant édité ou collectionné ces mêmes cartes postales.
Voilà un nouvel exemple de rencontre grâce à Claude Lothier, artiste,  passeur d'optique, grand perspectiviste et ce n'est certainement pas anodin (au-delà d'autres questions plus personnelles) que ce soit par lui que nous rencontrerons ce matin  le travail de l'artiste minimaliste : Peter Downsbrough.

Une série de cartes postale modernes, toutes éditées chez Combier, toutes nous montrant des vues de Dijon sont proposées à la vente, assemblées les unes aux autres sous le titre :
Postcard overprint #1 Dijon 1981. Il s'agit donc d'un set vendu pour la modique somme de 110 euros.
La vache...
Claude Lothier a bien fait de photographier leur installation sur une table car cela nous permet sans doute de mieux comprendre le sens de ce travail et son agencement spatial puisque c'est bien de cela dont il est question : de lecture de l'espace. On ajoutera : de lecture de l'espace imprimé et de ce qui fonde une image.

Ce qui est assez amusant et sans doute significatif c'est que mon habitude (je ne dis pas habitus) de la lecture de cartes postales a produit un retard à la lecture de ce travail. En effet, je n'ai tout simplement pas vu l'intervention de l'artiste lorsque j'ai eu en main pour la première fois la série de cartes postales, tout heureux que j'étais d'avoir entre les mains des cartes de cette qualité correspondant point à point à ce que je cherche comme collectionneur pour ce blog.
L'artiste dira que j'étais aveuglé par la force de l'image, par l'anthropologie de ma lecture de celles-ci, pris en quelque sorte par l'autorité des images photographiques, par la reproductibilité des images. Enfin...quelque chose comme ça...
Il faudra que Claude me fasse remarquer les lignes imprimées sur les cartes postales pour que je comprenne qu'il s'agissait bien d'un système artistique et non d'une erreur d'imprimerie de chez Combier.
Je ne sais pas trop quoi penser de mon trouble car, tout de même, j'ai une certaine culture de l'image et de l'Art Contemporain qui aurait dû me permettre de comprendre immédiatement ce qui ici faisait Art

Barrer ainsi des cartes postales par un signe aussi minimal et qui vient d'ailleurs systématiquement barrer l'image sur la verticale (sans doute pour ne pas être confondu avec une définition de l'Horizon) doit vouloir dire quelque chose. Signaler d'abord le peu d'importance fétichiste à la carte postale car il s'agit d'authentiques cartes postales et non des rééditions. Il faut donc d'abord retrouver ces dites-cartes-postales, faire un travail de collecte et donc, oui Monsieur Downsbrough faire un travail de choix dont on ne sait rien.
On sent bien ici le fameux glissement contemporain, le fameux sourire en coin d'un ready-made, et du peu de considération artistique de l'objet qui est épuisé à son seul rôle conceptuel d'images sous contraintes : une carte postale. Ça devrait suffire pour tout dire ce que pense l'artiste de ce genre. Si ce n'est un dégoût de ce genre au moins un scepticisme de sa fonction de représentation du Monde. On pourrait aussi alors s'étonner que pour dénoncer ainsi la puissance de cet archétype le signe de l'artiste soit aussi modeste car on peut donc voir l'image au travers. On aurait aimé que l'artiste assume son caviardage à moins, bien sûr que tout tienne justement dans l'intention de maintenir la lecture et que le signe de l'artiste (son intervention) ne soit justement là que pour nous rappeler le plan de l'image, sa planéité, ce que Claude appellerait son tableau perspectif. On sait comment la Modernité a cru bon nous rappeler qu'une peinture (je fais exprès de ne pas redire tableau) n'est qu'une surface plane et que donc il faudrait se méfier de tout ce qui voudrait nous faire croire le contraire, de toutes les illusions de l'espace (perspectif en l'occurence).
Peut-on penser que Peter Downsbrough use encore la corde de ce qui est devenu un pensum sans réfléchir, sans vouloir justement voir et voir que ce qui constitue cette image est bien plus fort que son intervention ?
Veut-il donc continuer le combat pour en dénoncer la violence des images ou relâcher la pression dans un geste presque zen, léger, voulant maintenir la réalité de la puissance de l'image et l'exercice de sa  liberté à la lire comme un objet ?
Que fait l'artiste de la part culturelle d'une telle production d'images à part nous refaire jouer la corde usée de Walter Benjamin ? Y-a-t-il là le dégoût aussi d'une forme de verbalisation sur les images, le commentaire de celles-ci comme images de projections de découvertes, de souvenirs voire, comme moi, parfois un vrai exercice d'admiration des objets photographiés ? Car, finalement, j'arrive à passer au travers du plan ramené par Downsbrough. Même, je l'ignore. C'est donc en ce sens un échec de sa proposition.

Ce que je ne sais pas et qui (vous allez rire) me préoccupe au plus au point c'est la méthode, la technique utilisées par l'artiste pour exercer son fameux pouvoir. Comment sont imprimées les lignes noires ? 
Au dos des cartes est visible le foulage de leur impression, ce qui raconte une forme assez violente d'intervention. On dira en Art contemporain : une radicalité...
Mais si je m'inquiète ainsi de cette méthode c'est que je la crois signifiante du geste et du rapport de l'artiste à de telles images. Un geste fort ? Assumé ? Allez...violent à l'égard de ce mode de représentation ?
Pourquoi une telle force pour un objet si anodin finalement ? L'artiste croit-il vraiment que là se joue quelque chose d'assez insupportable dans notre culture des images pour mériter un geste aussi puissant ? 
Est-ce que l'industrie de la carte postale, les grands méchants industriels de la reproductibilité des images doivent  trembler devant un geste aussi farouchement vengeur ?
Suis-je bouleversé dans mon intimité des images ? 

On note que la présentation de l'édition oblige les cartes postales à s'associer par les lignes noires qui courent de l'une à l'autre sans logique spatiale. Il s'agit là encore de troubler les espaces, les rapprochements des lieux, que tout cela ne tient que par le plan de l'image et même ici le plan de la table. Le regard sur la carte postale est un regard à l'horizontale, on regarde assez peu les cartes sur les murs. On tient l'image dans les mains, on regarde les cartes dans le hasard de leur rassemblement dans une boite ou dans un classeur de souvenirs. Relier ainsi les images par un signe autoritaire qui les traverse au-delà d'un vrai sens géographique ou de promenade du voyageur ou même du spectateur, c'est bien vouloir contredire ce que l'artiste considère comme un usage normal et donc normé...
Tout le contraire en quelque sorte de la jubilante approche spatiale d'un Marin Kasimir que nous avions vu ici : http://archipostcard.blogspot.com/2010/09/marin-kasimir-paradoxalement.html

Mais si on veut pousser le bouchon, on s'amusera que l'édition de l'artiste, son intervention, fasse basculer l'objet éditorial dans celui de la collection d'Art Contemporain. Le prix de l'édition raconte le chemin vers l'exceptionnel qu'auraient fait ces cartes pour fuir leur monde populaire. Pourquoi ne pas produire au contraire dans un nombre illimité et peu cher son édition ? Ne serait-ce pas en inondant le marché de cartes postales racontant leur libération de l'image que ce travail de critique aurait pu atteindre son but ?
Limiter ainsi à un travail d'artiste réduit son champ d'intervention (et de sa pseudo-lucidité) à quelques amateurs, dans un entre-soi de cette dénonciation.
Il y a en effet peu de chances que les cartes postales de Peter Downsbrough ne voyagent pas par le Poste. Leur prix qui indique leur nouveau statut ne permettra sans doute pas beaucoup que ces cartes deviennent vraiment postales...C'est à ce prix que la définition du travail de l'artiste prend son sens ?

Alors ? On les regarde ces cartes ? Où puis-je, pour être raccord avec Peter Downsbrough et sa radicalité minimale, finalement vous laisser dans le vide de votre imaginaire en ne vous montrant rien car montrer, représenter ce serait autoritaire ?

Je ne suis pas pervers à ce point :


Voici donc le restaurant universitaire de Dijon. L'aplat du bleu du ciel discute avec franchise avec ce bloc. On note ici la force aussi du mur-rideau brillant et glacé. J'adore cette belle boite.
Combier ne nomme pas l'architecte.


Voici le Palais de la Foire de Dijon et sa spectaculaire entrée principale. L'architecte est Monsieur Barade qui n'a vraiment pas démérité en terme de jeux des formes, plaisir des matériaux, champ géométrique. C'est un signe, un signal, un spectacle nécessaire.


Voici donc l'Hôtel de Police de Dijon. Oh...Attention ! Image autoritaire ! gnagnagnagna.....
On notera que c'est encore Monsieur Barade qui est l'architecte. Deux fois donc. Il faut donc en conclure que cet architecte a beaucoup travaillé sur Dijon. Les volumes sont superbes non ? Et la blancheur est admirablement contredite par les fenêtres en bandeaux surlignées de noir.


Voici la Place Darcy et la Porte Guillaume à Dijon.


Voici le lac Kir et au fond une cité. L'éditeur nous indique que les architectes sont Georges Massé et Gabriel Parlos. Nous, On les remercie. 


Pour conclure, on notera qu'aucune carte Combier de cette série n'a identifié son photographe et que cet anonymat sert le propos de Downsbrough comme signe culturel de leur contingence à un genre. Bien entendu, lui, en signant sa série (mais pas sur les cartes) s'amuse aussi de cet anonymat des images.
Pourtant, il y a là quelqu'un qui regarde.
Ce serait intéressant de savoir ce que ce ou ces photographes pensent de cette intervention de l'artiste et de comment celui-ci a travaillé avec Combier. Suspens.

Je vous donne aussi une photographie prise par Claude Lothier de l'installation des cartes postales de Downsbrough.
Je vous conseille très vivement d'aller sur le blog de Claude Lothier si vous aimez le dessin et si les questions de la Perspective et du regard vous intéressent et j'en profite aussi pour remercier Claude pour ce très beau et très conceptuel cadeau. 




lundi 9 octobre 2023

L'autre maison expérimentale de l'Abbé Pierre

 Le document est à lui seul suffisamment éloquent et bavard pour que, presque, nous n'ayons rien à dire. Les plus férus d'entre vous auront reconnu le lieu et l'architecture car, même si le document n'est ni situé ni daté, il est facile de le replacer.


Nous sommes sans aucun doute à Brignais sur le chantier pour l'Abbé Pierre des maisons-ballons. On reconnait bien les ouvertures et le volume sur le dessus qui servait à réaliser une ouverture sur un étage. On retrouve même la ceinture de parpaings qu devait peut-être maintenir et retenir le ballon à sa place comme une sorte de ceinture.
Il faut bien regarder car nous avons mis un moment à réaliser que le volume que l'on voit n'est pas en béton ! Non ! Il s'agit bien encore du ballon sous pression qui attend le coulage ! On voit très bien la valve sur le coté et les maçons sont en train de poser des fils de fer sur la surface tendue. Mais à quoi pouvait bien servir le cylindre à gauche de l'image qui semble lui-même comme gonflé ? Un compresseur ? Une sorte de sécurité de maintien de la pression ? On note des sacs et des poulies agissant comme des contre-poids. Peut-on en déduire que ce cylindre compensait et maintenait une pression régulière surtout au moment de la charge de béton venant exercer forcément une force sur le ballon. La pression serait ainsi maintenue, les contre-poids récupérant la charge. Bon. C'est une hypothèse.

Comment ce document est arrivé chez Lestrade et bien cela restera une énigme comme beaucoup d'autres. Jean-Michel Lestrade n'a jamais évoqué de collaboration avec cette technique, aucun courrier, aucune facture ne prouvent une quelconque participation de l'Agence Lestrade à ce spectaculaire chantier. Et ce n'est pas lui non plus qui a pris ce cliché. Sans doute donc, un témoignage d'un visiteur ayant envoyé ce document à son ami ingénieur. On fouille, on trie, on trouvera peut-être une réponse.

Si vous en avez une ....

Merci de ne pas copier ce document sans autorisation.

Walid Riplet.


Pour ceux qui n'auraient pas suivi :

https://archipostalecarte.blogspot.com/2022/05/des-bulles-de-beton-pour-les-sans-abri.html

https://archipostalecarte.blogspot.com/2019/08/labbe-pierre-et-sa-boule-zero.html

http://archipostalecarte.blogspot.com/2015/02/wallace-neff-est-gonfle.html 
http://archipostalecarte.blogspot.com/2013/06/dair-et-de-beton-wallace-neff-dakar.html
http://archipostalecarte.blogspot.com/2013/07/le-sucre-en-morceau.html







mercredi 4 octobre 2023

Le Marché de Royan a besoin de vous et de mécénat

On ne va pas tergiverser pendant des heures mais oui, vous avez raison, cette communication est vraiment moche, proche du mauvais goût. Bon, c'est dit.
Est-ce important au vu du projet ? Non. Il faut passer par dessus cette représentation kitch pour faire ce qu'il y a d'urgent à faire : restaurer et sauver ce magnifique marché couvert de Royan qui est l'un des emblèmes de l'Architecture de la Ville de Royan mais aussi de l'architecture moderne tout court.
Comme on dit maintenant : une icône.
Alors oui, on a besoin de vous tous pour que cette restauration ait lieu le plus vite possible mais surtout le plus efficacement possible. 
N'hésitez donc pas à aller là et laisser votre obole. On vous en saura gré. 

Je vous donne toutes les informations sur la manifestation qui vient. Je n'y serais que par le coeur mais j'y serais. 




Pour, en quelque sorte, contre-balancer cette affreuse image du marché transformé en huitre perlière digne de la production contemporaine des cartes postales à dauphin et à caniche qui nous disent gros bisous, je vous donne quelques cartes postales de l'époque, qui vous révéleront un peu mieux je pense le sens et la place de ce marché dans sa ville de Royan et dans l'histoire. Parfois, la pureté formelle venant simplement du génie technique vaut mieux que des interprétations certes amusantes mais aussi un rien déplacées.

On commence ?



Voilà une carte postale de chez le célèbre et régional Mr Chatagneau ! Elcé ! Où sont vos archives ? On note une belle représentation prise un peu en hauteur depuis les bouts des immeubles de l'Avenue Aristide Briand. La coloration est douce et il ne fait aucun doute que la version en noir et blanc existe bien. Monsieur Chatagneau a oublié de nous donner le nom des architectes.



À hauteur de piéton, Mr Berjaud lui préfère prendre son cliché depuis le parking nous offrant quelques belles autos qui marquent l'époque. Là aussi, comme son collègue, Mr Berjaud oublie le nom des architectes. Mais pourquoi avoir mis autant de sol sur une telle carte ? La moitié du cadre est occupée par une pelouse bien vide. Pour être plus proche de la véritable sensation que procure cette architecture depuis la place du piéton ? Sans aucun doute !

Et pour ceux qui ne saurait pas encore la place primordiale qu'a ce marché dans le plan d'urbanisme et de comment il participe à sa promenade architecturale :




Cette magnifique vue d'avion est de Mr Michel le Collen, Pilote-Photographe pour les éditions Artaud. Royan est à son apogée, tout est construit, reconstruit. Voilà une Ville qui a su mettre en place un sens à l'urbanisme par l'implantation de chef-d'oeuvres se succédant tranquillement et proposant une nouvelle organisation certes puissante et claire mais aussi poétique associant mouvement, points d'appui, carrefours. 
Alors ? Cela ne vous donne pas envie de donner un peu d'argent pour le sauvetage de cette magnifique architecture ? Je sais que je peux compter sur vous.
Vous trouverez sur ce blog une quantité non négligeable de cartes postales de ce marché. Je ne peux donc vous donner tous les liens vers les articles, ce serait fastidieux. je vous propose seulement celui-ci :
Et, pour une analyse plus minutieuse, n'oubliez pas de lire cet excellent ouvrage, si, si, excellent !

dimanche 1 octobre 2023

Henry Cobb, le génie des altitudes

Il n'est plus tellement de bon ton aujourd'hui d'aimer les grattes-ciels, les tours immenses qui se dressent. On sait comment chez nous, plus la Tour est isolée, plus elle est dressée, plus elle est perçue comme une arrogance. Il ne faut jamais rêvé du Mont Parnasse en architecture.
Ces tours deviennent des objets de dégouts politiques, vus comme des agressions, des stupidités architecturales, des aberrations écologiques ou même, dénoncés en terme de sécurité. Il faut dire que le cinéma n'a pas arrangé les choses, on dirait que toutes les tours sont devenues infernales. Et n'oublions pas l'histoire récente et la disparition tragique du World Trade Center qui a donné des raisons aux détracteurs de détester les signes d'un capitalisme triomphant (comme ils disent) fait de verre et d'acier. 

Pourtant il y a et il y a eu des génie de ce genre, des spécialistes, des amoureux de cette puissance et qui porteront ce désir jusqu'à l'acte poétique suprême: celui qui associe une structure et un ciel.
Ce matin, sur le vide-grenier je trouve cette superbe carte postale, cette déclaration d'amour :


La carte postale de Boston nous montre l'un des chefs-d'œuvres de l'architecture du XXème siècle, la John Hancock Tower dessinée par le célèbre Henry Cobb, grand maitre en tours dressées.
Et Fred Jellison Jr le photographe de cette carte postale sait y faire pour que la tour de Cobb semble ainsi imposer sa silhouette, renoncer au monde qui l'entoure. Fred Jellison Jr a remarquablement redressé les fuyantes pour que la verticalité assourdissante de l'objet architectural épuise le tapis urbain fait de bâtiments anciens. Il est impossible de ne pas se demander pourquoi cette tour est seule, si haute sans que personne ne semble rien à avoir à redire...
Bien entendu, ici ce que l'on perçoit surtout c'est comment cette John Hancock Tower prend le ciel en otage, comment le bleu devient son objet. On pourrait penser que cet accord est naturel finalement, que le ciel et le verre sont liés à jamais dans un dialogue, dans des échos.
Il va sans dire que cela me réjouit et que j'aime glisser sans remord dans le piège de cette représentation de l'architecture. On pourrait y voir (comme tout le monde) le surgissement métaphysique d'un parallélépipède. Kubrick nous a donné des raisons de ce genre de rapprochement. On pourrait la penser comme abstraite, comme indifférente à son monde, cette tour, comme perdue, comme un talon aiguille planté dans la chaire de la ville. Et ce serait avec raison. Mais si on s'autorise à ne juger cette architecture que depuis cette image, alors il nous est impossible de penser ce ciel de Boston sans la John Hancock Tower. C'est bien elle qui justifie que le photographe nous fasse croire que la ville serait écrasée par un ciel immense qui n'existe en fait que pour y faire entrer la tour dans son cadre. Elle agit comme une liaison, une échelle, elle tape autant dans le sol que dans le ciel. 
D'ailleurs il serait bien malin celui qui d'après une telle photographie pourrait dessiner la tour, nous la décrire. Comment pourrait-on en comprendre la forme générale, ses proportions. Ici, elle éprouve donc surtout son rapport à l'espace céleste bien plus qu'à l'espace urbain. Et le verre de sa façade lisse fait tout le travail de son improbable insertion dans l'atmosphère. Mais qu'importe la vérité du constat ou bien le désir d'objectivité. Il y a là une image. Et cette image est construite autant par l'architecture de Cobb jouant avec Boston que par le photographe. Qui se met au service de l'autre ? Qui construit réellement ce lieu que j'ai sous les yeux ? Car il va de soi que Henry Cobb architecte n'a pas que produit qu'une représentation possible, il a aussi le génie des altitudes. Il sait que la puissance qu'il met en place ne veut pas réclamer seulement une force, une radicalité. Il fonde surtout un rapport poétique entre deux mondes. L'éther n'avait rien réclamé diront les détracteurs. En sont-ils vraiment certains ?

Pour apprendre plein de choses sur la vie de Henry Cobb :





mercredi 27 septembre 2023

Tous autour de Renée Gailhoustet

 Je me fais le relais d'une manifestation autour de Renée Gailhoustet et de la Maladrerie, l'une de ses très grandes réussites. Voilà un beau programme et une journée qui s'annonce magnifique. Toute manifestation qui permet de mettre en valeur le travail de Madame Gailhoustet et de maintenir toutes ses particularités est la bienvenue.

Belle architecture, belle énergie !

Passez une belle journée !

www.maladrerie.org


mercredi 13 septembre 2023

Journées Européennes du Patrimoine c'est inutile ?


 

Et si le dossier de l'église de Serqueux devenait un emblème de la gestion du Patrimoine en Normandie et en France ?

Voilà une petite ville qui possède sur son sol l'un des rares exemples de voûtes en fusées céramiques gràce à son église volontairement moderne et audacieuse. Archétype des églises de ce type en France construites après la Seconde Guerre Mondiale, cette église dessinée par l'architecte Michel Percheron, certes, n'est ni Ronchamp ni l'église du Raincy mais elle ne démérite pas, surtout d'un point de vue technique et aurait donc du faire l'objet de tous les soins possibles surtout après la démolition honteuse de sa soeur l'église de Grand Quevilly qui était l'autre témoin en Haute-Normandie de ce matériau génial et si original. On passera sur cette démolition, on ne comprend toujours pas le raté patrimonial...Enfin...si...On comprend...




Le clocher-campanile de Serqueux lui n'a déjà pas survécu.
On pourrait se dire que cette église de Serqueux fut bien repérée puisqu'elle a bénéficié du si étrange Label Architecture Contemporaine Remarquable (à l'origine Label Architecture du XX), preuve donc que les services régionaux du Patrimoine avaient été attentifs à cet héritage mais n'avaient bien entendu pas pensé à un classement. Il reste toujours difficile de comprendre comment on atteint le podium de l'aristocratique classement au titre des Monuments Historiques.

Mais voilà...la vie municipale et démocratique est faite de creux et de rebonds ! L'église de Serqueux est en mauvais état et, comme un nombre grandissant d'églises désaffectées en France, personne ne sait comment financer sa restauration ou lui trouver une destination autre. La reconversion et le financement ainsi que la sécurité des habitants et usagers deviennent donc de fait des questions importantes pour le maire, responsable sur tous ces points aux yeux de ses administrés. Monsieur Hermand avait donc demandé légitiment et courageusement par la voie démocratique aux habitants ce qu'ils voulaient faire de leur église. Mais...au moment-même où cette question était posée démocratiquement, manquait donc une information essentielle : le maire et ses administrés ne savaient pas que cette église de Serqueux était bel et bien labellisée ! 
Oui c'est incroyable.

Comment dire...


On notera que ce Label a pour objet justement d'éduquer à l'architecture moderne et contemporaine, il se doit de rendre visible de fait ce qui est exceptionnel et devrait être avant tout un moyen de diffusion de cette histoire de l'architecture. Comment se fait-il que personne à Serqueux ne fut informé de cette labelisation ? Pourquoi ce manque d'échanges entre l'administration du Patrimoine et une commune ? On imagine bien que le cas échéant, depuis toutes ces années, la Mairie et son maire aurait pu s'emparer de ce Label pour communiquer aux habitants de Serqueux la chance de posséder sur leur territoire un tel objet architectural et donc auraient bien pu, évidemment, voter d'une toute autre manière pour son avenir !
Maintenant, et une fois encore, tout se bouscule ! Sans doute alertés par les médias de la demande démocratique faite par le Maire à ses administrés, voilà les services patrimoniaux qui se remobilisent et rappellent au Maire que ce bâtiment fut labellisé. On a envie de dire : juste à temps ! Juste avant la démolition...
Mais Monsieur le Maire me fait remarquer justement : comment croire encore à la parole publique quand un maire s'engage sur les décisions de sa population et que cette décision se fait sur une information si ce n'est mauvaise au moins...incomplète ! 
Et comment expliquer maintenant que c'est trop tard, que cette église ne fut pas alors reconnue, soutenue et donc entretenue pendant tout ce temps. Pourquoi cette église n'a pas été repérée en 1980, 90, 2000, 2010, 2020 ?

À qui jeter la pierre de cette politique de la protection patrimoniale en France et donc en Normandie ? Pourquoi, une fois encore, a-t-on l'impression que tout se gère (ou ne se gère pas) dans l'urgence juste avant la ruine ?
Admirons la patience de Monsieur le Maire...et son fair-play, lui qui doit rendre des comptes à des administrés qui n'ont pas été informés de la qualité de leur Patrimoine. À quoi sert (et à qui ?) un Label Architecture Contemporaine Remarquable qui n'est...remarqué par personne ?

On se souvient que la DRAC Ile-de-France a mis sept ans et demi pour répondre sur un dossier. 

Alors on sait de moins en moins quoi penser de toute cette organisation administrative de notre Patrimoine, de tous ces Labels ! Et de ce qui constitue normalement un service publique.
On dirait que parfois certaines administrations tentent de sauver les apparences pour ce Patrimoine au dernier moment, comme pour effacer leur absence de repérage et de travail en amont. Un manque de Culture et de curiosité pour ce Patrimoine du XXème de la part des dits-agents ? Un manque de moyen humain et technique ? Un manque de formation à ce Patrimoine ? Qui contrôle les activités des agents patrimoniaux et leur gestion et dans quel cadre administratif ? Qui donc pour juger de la qualité de leurs services ? 
Le tribunal administratif ?
Comment inventer une vraie capillarité entre les citoyens et leurs services publiques du Patrimoine ?
Le loto du Patrimoine est-il donc le seul lien valide ?

L'autre question que cela pose est le repérage de ces architectures et de qui doit l'opérer et au nom de quelle vision du Patrimoine. En 2023, l'inventaire des constructions des années 90 et 2000 devrait être en route. On devrait déjà pouvoir classer certaines de ces architectures. Faudra-t-il que les DRAC en 2050 se rendent compte trop tard qu'elles ont oublié quelque chose ? Est-ce que la notion-même de Patrimoine aura la même valeur dans un monde surchauffé qui ne gérera l'urgence que par sa vision rétrécie et idéologique d'une écologie devenue maitresse de toutes les décisions ? Qui de cette génération montante du Patrimoine et de l'Architecture aura été formé pour sauver techniquement et esthétiquement ces architectures de la fin du XXème des risques de dépréciations écolo-démagogiques ?

Alors, en ce week-end des Journées Européennes de l'Architecture et du Patrimoine en Normandie, peut-on au moins rêver à une issue heureuse pour l'intelligente et touchante église de Serqueux ? Est-ce que la prise de position démocratique du Maire, son incroyable bonne volonté d'administrer correctement sa commune et de mettre en valeur son Patrimoine construira une alliance enfin apaisée avec les agents du Patrimoine pris d'un sursaut, conscients donc, les un et les autres, de leur responsabilité et du respect de la parole publique. Un Label ça devrait aussi être considérée comme une déclaration politique et l'exercice de la Démocratie, pas un machin de spécialistes qui tombe sur un territoire comme une punition pour une mairie ou qui s'efface selon les desiderata des élus politiques locaux.

Rêvons...Croisons les doigts.
Il parait que l'une des thématiques du Minsitère de la Culture en ces Journées Européennes du Patrimoine serait : Patrimoine vivant.
Aimons-nous vivants
N'attendons pas que la mort nous trouve du talent...donc...

Walid Riplet.

Pour revoir quelques articles en rapport avec ce texte :
Déjà en 2016 :

Sur les fusées céramiques et Jacques Couëlle :

Sur la honte de Grand Quevilly et comment ça pourrait finir aussi à Serqueux :

Quelques images déjà publiées mais qui éclaireront les nouveaux venus sur ce blog.
Ces document sont protégées par des droits d'auteur. Merci de ne pas les copier sans autorisation.








dimanche 10 septembre 2023

Rien qu'un petit morceau de Flaine

Vous allez sans doute me trouver tatillon ou obsédé au choix.
Vous aurez sans doute raison mais, que voulez-vous, rien ne m'amuse plus que ce genre de détail, ce ça d'une image, comment finalement je me place dans celle-ci. Choisir un angle, un point. C'est comme ça que j'aborde mon rapport à l'architecture et sa représentation. Vous devriez le savoir maintenant, vous avez l'habitude.
Alors quoi ? Vous ne voyez pas comme moi la chose essentielle et même incroyable de cette carte postale de de l'UCPA de Flaine ? Vous ne voyez pas ?




La neige ? Non pas vraiment quoiqu'elle participe sans doute à la présence de ce détail. 
Les planches du chantier ? Oui, ce pourrait être ça et c'est une piste. Cela veut déjà dire que le bâtiment est en cours de finition et que le ménage du chantier n'a pas encore été fait, que cette neige, justement, camoufle de son blanc manteau. Alors ?
Oui...
Vous le voyez le module de fenêtre en béton préfabriqué qui traine dans la neige ?



Monolithe abandonné à son sort, qui n'a pas trouvé sa place dans la façade, qui n'a pas réussi à s'y joindre...Vous seriez nombreux aujourd'hui à vouloir le récupérer non ? Comme une sculpture posée dans un jardin, morceau de dessin superbe. Qu'est-il devenu ce morceau d'architecture ? 
Ce module raconte bien aussi comment l'architecture de béton préfabriquée pouvait s'exprimer presque avant son montage : blocs les uns sur et dans les autres, rationalité parfaite du jeu de construction de l'Architecture Moderne. La neige fondue, dans la boue printanière, le bloc ici presque essentiel à l'image devait sembler bien moins intéressant, comme un gros rocher encombrant : simplement un déchet. Alors que là, dans l'odeur toute neuve du béton de scellage, là dans l'air clinquant d'un hiver en montagne, ce monolithe superbe me touche. On notera que l'image à trois registres : la neige, le bâtiment, la montagne. Tout s'accorde dans une débauche de relations ou d'oppositions de matières, de couleurs, de lignes. Les plus audacieux parleront d'intégration, je dirai simplement un accord. Le photographe de cette carte postale veut rester anonyme et les éditions des Alpes ne nous disent rien de cette leçon de photographie. 
Sur le verso, la correspondance est amusante et j'aime qu'on nous signale que l'UCPA aurait été construite sur le couloir d'avalanche ! 
"Ah ! Vraiment ces architectes !" semble vouloir dire le correspondant.
L'architecte justement n'est pas nommé.
Par contre :



Sur cette carte postale Combier, l'architecte est bien nommé : Marcel Breuer bien entendu. J'aime bien cette carte car, pour une fois, on voit le dos du bâtiment si souvent représenté par son autre façade. On comprend aussi comment les bâtiments sont alignés. J'aime beaucoup le parfait point rouge du pull-over du skieur, un peu comme le célèbre pull-rouge des cartes postales de John Hinde. Est-il vraiment là par hasard ?

Pour apprendre l'histoire de Flaine, je vous conseille cette vidéo :



lundi 4 septembre 2023

Club Roussakoff Melnikoff Klub Russakow Melnikov

Dans ma petite histoire personnelle, dans les souvenirs qui ont fondé mon rapport à l'architecture moderne et contemporaine, il ne fait aucun doute que ce bâtiment fut pour moi comme un déclencheur important. Je me souviens si bien de ce cours sur le Constructivisme et les Avant-Gardes russes que nous donnait Annie Boulon, notre professeur d'histoire de l'Art au Lycée André Maurois. J'adorais ses cours et me revient facilement en mémoire la vision d'une diapositive projetée nous montrant ce si célèbre bâtiment de Melnikoff. Je me souviens surtout du mot engrenage que Annie Boulon associait à ce morceau de bravoure, voulant nous montrer comment les références mécaniques et industrielles alimentaient en images poétiques les visions de ces architectes de la Révolution d'Octobre. Aujourd'hui, je suis en âge d'interroger ce rapport entre un mot et une architecture mais il me reste ce moment important permettant aussi à ma mémoire de me souvenir quarante ans après de ce cours et donc aussi de ce bâtiment incroyable. 
Je reste depuis attaché à ce souvenir mais aussi à ce style architectural. Je fus donc particulièrement surpris de revoir et de trouver cette première carte postale du Club Roussakoff. Comment pouvais-je penser qu'une telle carte existait ?





On a au dos de cette carte la description en français (!) de cette architecture. On a la date, 1928, le nom de l'architecte, Melnikoff et même le nom de l'éditeur : Trust Mosresclamspravizdat...sic...C'est déjà bien non ? Je note la piètre qualité du papier et de l'édition qui n'est pas datée mais que je pense être de l'époque, du moins du début des années Trente. La carte ne fut ni expédiée ni écrite. Le grain de l'hélio est épouvantable (on ne peut lire les inscriptions) mais donne à l'image un aspect assez esthétique. Je m'étonne qu'un document aussi fragile ait pu traverser ainsi le temps. 
J'ai cru longtemps que j'avais déjà beaucoup de chance de trouver une carte postale d'un bâtiment aussi iconique mais j'ai attendu plusieurs années avant de trouver aussi ça :




Cette première carte est encore plus pauvre dans son édition que la première. Le papier est si léger qu'il est difficile de croire que cette carte postale aurait pu soutenir un voyage par la Poste. On dirait un papier de journal ! Pourtant, tous les signes éditoriaux d'une carte postale sont bien là et la description, cette fois, ne se fait qu'en anglais et en allemand. Je ne sais pas quoi conclure de l'absence du français, cette fois. On note donc qu'il s'agit bien du Club Municipal des travailleurs Roussakoff, ici écrit Russakow, bien entendu. On note qu'une fois encore le photographe a attendu l'hiver et même la neige pour faire son cliché. On note aussi beaucoup d'inscriptions sur la façade qui resteront pour nous indéchiffrables. Bien entendu, c'est toujours cette façade que choisit le photographe, cette façade qui fait à elle seule le spectacle architectural du bâtiment. Il reste difficile de lire la volumétrie globale du Club. On perçoit aussi que cette carte postale fut détachée d'un carnet ou d'une autre édition si on en croit son bord gauche. Une série ?
Cette carte ne nomme pas l'architecte Melnikoff et le nom de l'éditeur est mystérieux : All-Union Company "Hotel Limited"...L'image donne une impression de massivité, de puissance en fermant les blocs, en exagérant les ombres. La radicalité est à son comble.

Mais voilà que je trouve cette dernière version :




Superbe surprise de retrouver le Club Roussakoff, une fois encore sous la neige mais cette fois en couleurs. Comme l'éditeur Aura date son édition de 1987, on peut en conclure que l'Union Soviétique voulait bien communiquer sur cette période de son histoire de l'architecture et que le bâtiment de Melnikoff apparaissait encore (ou déjà...) comme du Patrimoine digne d'être montré et défendu par la carte postale. On sait comment le retour un peu tardif sur cette héritage a eu lieu dans cette période, juste avant l'écroulement de l'Union Soviétique. Le rachat de la réputation de Melnikoff comme appartenant à l'Histoire de l'Architecture est donc prouvé de la sorte. Y-avait-il déjà en 1987 un tourisme architectural dédié au Constructivisme en Union Soviétique ? Sans doute car les années 80 et le Post-Modernisme ont beaucoup regardé alors cet héritage. La fameuse exposition Paris-Moscou avait eu lieu en 1979.
On note ici la très belle qualité éditoriale et photographique de cette carte postale. Je m'étonne du choix audacieux d'un format à la verticale resserrant encore le détail de l'engrenage géant du Club Roussakoff. C'est un peu une image pour amateur connaissant déjà le bâtiment et moins une carte postale descriptive chargée de le montrer. Ce détail, en quelque sorte signe la complicité du regardeur avec l'objet architectural. Ce qui reste mystérieux pour moi, pour ces trois cartes d'ailleurs c'est bien le lieu de leur diffusion. Et comment les touristes pouvaient donc acheter ces cartes. Sur place ? Dans le Club lui-même ? 
Peut-être.
Mais me vient une question : comment les cartes postales expédiées vers la France ont pu apporter à leur époque une influence à nos architectes ?

Pour tout bien comprendre de ce bâtiment, je vous conseille ces sites :

Pour revoir Melnikoff et le constructivisme sur ce blog (bon courage) :l
etc....


samedi 2 septembre 2023

Attention au Droit d'Auteur !!!! La fin prochaine de ce blog ?

 Suite à une longue et très chaleureuse conversation avec Monsieur Meauxsoone  photographe notamment de cartes postales pour l'éditeur Théojac, je lui ai promis de rappeler l'usage des images et du droit d'auteur qui y sont reliés.

En effet, les cartes postales ont des auteurs, des photographes et des éditeurs qui seraient donc en droit de demander leur dû sur une publication. Il faut donc être extrêmement vigilant qu'en à l'usage que vous pourriez (et que je pourrais également) faire de ces photographies. 

Vous le savez, pour ma part, ce blog a comme objectif entre autre de rendre justement hommage à ce travail de photographes de cartes postales que trop souvent on assimile à un travail anonyme simplement parce que les éditeurs ne nomment que rarement l'origine et l'auteur de leurs clichés. Il arrive que parfois, au dos, figure le nom du photographe mais c'est vrai que dans l'ensemble, il n'y a rien de marquer permettant de retrouver les photographes, leurs ayant-droits, voir même les éditeurs depuis longtemps disparus.  C'est pour mettre en valeur ce travail des photographes que, pour ma part, je nomme systématiquement le nom des photographes et des éditeurs dans mes articles et que, lors de prêts pour des publications, j'exige aussi que leur nom figure dans l'édition.

Je tiens à ce que toujours les images soient sourcées. C'est ce cher Didier Mouchel qui m'avait appris cette exigence. C'est donc une forme éthique et morale à laquelle je tiens particulièrement.

C'est grâce à cette nomination systématique que j'ai pu rencontrer des architectes et des photographes et avec Monsieur Meauxsoone nous avions pu nous trouver grâce à cela il y a bien longtemps maintenant (10 ans !) grâce à un article sur la Grande Motte écrit sur l'un de ses superbes clichés.

Le problème est sans doute moindre pour l'édition papier car une capture d'écran est moins facilement reproductible. Quoique...C'est pour cela que je suis obligé lors de la demande d'un scan par des éditeurs de refaire celui-ci sous un format plus solide. J'exige alors systématiquement que les sources soient nommées. Le problème, bien entendu, c'est surtout pour le numérique et le halo Internet où une capture d'écran suffit pour un passage d'un site à l'autre. Je vois ainsi souvent les images de mon blog voyagées et migrées vers d'autres sites. Et marquer l'image ne sert que le primo-publiant mais ne protège pas l'auteur, bien entendu.

Nous voyons donc très souvent des personnes venir sur ce blog et se servir des images sans autorisation de ma part et encore moins de celle des photographes. Ainsi Monsieur Meauxsoone lors du regain d'intérêt pour le Kyklos a vu ses photographies éditées, copiées sans son autorisation dans la presse et des sites pourtant informés des droits d'auteur. C'est un exemple mais il pourrait y en avoir plein d'autres même si la réglementation tente de resserrer justement cette vigilance. Voir les liens donnés par Monsieur Meauxsoone ici :

https://digital-strategy.ec.europa.eu/fr/policies/copyright-legislation


C'est vrai aussi que la loi pourrait sembler flou. En effet, comment justifier que l'on demande à des personnes faisant du contenu critique et historique, tentant de valoriser justement le travail des photographes de respecter ces droits alors que des sites comme Instagram, Facebook, Pinterest ou même les sites marchands de ventes aux enchères de cartes postales publient  ces cartes et parfois pour les vendre sans aucune nomination de leurs auteurs. Il suffit alors d'une capture d'écran pour multiplier la diffusion sans justifier des droits d'une photographie. 

Il va donc falloir prendre une décision pour ce blog. Peut-on continuer ainsi à produire du contenu critique et historique si pour chacune des cartes postales il faille faire la recherche parfois ardue des ayant-droits ? Dans l'absolu, oui il le faudrait. Et comment faire quand justement, il s'agit de retrouver et donc ré-attribuer  le photographe à l'origine du cliché ? 

Dois-je faire ce blog sans aucune image ? Ou seulement en l'envoyant par courriel à mes lecteurs ?

Vous comprendrez que cela ne sera pas possible, je vais donc si la loi se resserre devoir sans doute arrêter ce blog voir même l'effacer dans sa totalité. 

Ce qui sera alors dommage c'est bien que le travail de popularisation, d'analyses historiques et critiques ne sera alors plus possible et la mise en avant justement des archives photographiques se perdra sans moyen de communiquer et d'échanger sur le renouveau de valeurs artistiques de ce travail. Comment faire ? Je ne suis pas sûr d'avoir l'énergie de défendre et soutenir une telle position. Peut-être qu'il vaut mieux alors que les photographes et leur travail restent définitivement sans lumière au fond des boites à chaussures sur les vide-greniers. 

Pour ma part, je ne publie QUE des cartes postales qui sont PHYSIQUEMENT dans ma collection et souvent, voyant les pratiques des autres, je me dis que je suis vraiment stupide. Mais c'est le début du respect de l'auteur et aussi celui des droits du collectionneur. Je ne fais jamais de scan ou de capture d'une carte que je ne possède pas physiquement.

Car, à part la petite renommée dans le milieu du Patrimoine d'un enseignant-chercheur allant de conférence en conférence dire que je considère ce travail de photographie comme essentiel à notre histoire et à ses archives, je n'ai rien à gagner pécuniairement à faire ce travail d'analyse, de narration. Si donc je n'ai pas grand chose à gagner, (mon blog est gratuit et n'a même pas de pub) je ne veux pas non plus que ce travail me coûte et être en permanence dans la suspicion d'un désaccord avec un ayant-droit. Je jetterais donc l'éponge.

Ici, toute modestie gardée, comme Aby Warburg, je construis une collection c'est à dire que je construis des relations entre les images. Pas un Fonds photographique à usage commercial.

Tant pis donc pour l'histoire d'un art populaire, tant pis pour tous les échanges joyeux avec les lecteurs, les architectes, les photographes, tant pis pour tout le travail de mise en lumière d'un Patrimoine architectural mal aimé, tant pis pour la défense que j'ai toujours pris pour le travail de ces photographes. La nuit retombera sur ma collection qui restera privée.

Exemple en trois images et en trois clics de ce qu'il est possible de faire. Comment imaginer que des sites marchands soient dans l'obligation de nommer les auteurs et encore plus de les rémunérer ? Quelqu'un a la réponse ?

Et cette méthode est belle et bien utilisée aussi depuis mon blog sans que je ne puisse rien faire d'autre que de rappeler que les images ont, justement des sources : photographes, éditeurs mais aussi collectionneurs.






mercredi 30 août 2023

Atlas Régional Nécessaire



Et si, comme tout le monde, on avait envie d'enfoncer les portes ouvertes ?
Et si, comme tout le monde, on faisait semblant d'inventer un inventaire, de fabriquer un genre, de construire un fonds ?
On sait aujourd'hui que le débat sur la bonne santé du pavillonnaire n'en finit pas de passer par des phases de rejets et des phases de retour en grâce sans que le modèle et son image ne soient finalement analysés. L'architecture sans architecte des pavillons est-elle le nouveau vernaculaire si chers aux lecteurs trop superficiels de l'oeuvre de Walker Evans ? Faudra-t-il un centre d'art pour faire semblant de donner de la noblesse dans un second degrés depuis cet art de la  représentation d'un certain bonheur architectural ?
Qui pour nous faire croire qu'il aurait inventé là quelque chose, avant tout le monde, fabriquant une oeuvre  sautant du dégoût admis à l'exaltation de cette défaite de la culture architecturale par l'Art Contemporain ?
Moi ?
Allez...je suis assez tenté.

Finalement, on peut piller, classer, ranger et chanter partout que ce regard en coin, de biais, amusé serait sérieux puisqu'il aurait reçu l'aval (et l'amont de l'Histoire ?) de critiques qui ne fréquentent pas finalement ce genre et, surtout...ces lieux....Sauf Claude Lévêque peut-être. Oui, je veux rester attentif et même attendri à son étrange parcours.

Pour le  BeurCore c'est fait et c'est fait depuis longtemps maintenant. Remercions ceux qui mettent un nom sur une pratique de requalification culturelle : Sara Sadik.
Ne reste que le paysage des gilets jaunes qui ne soit pas encore récupéré par les Fashion Addicts, les marques de luxe, les revues de décoration intérieur comme AD qui propose de réfléchir sur l'angle droit en s'appuyant sur les quelques villas et maisons bulles : on rigole.  On attend avec impatience un article de AD sur Gifi ou But et le design populaire. 
Alors, ils viendront les artistes contemporains pour remanier à leur sauce ce monde de l'étalement pavillonnaire. Ils viendront à contre-courant pour croire inventer un regard, un mouvement, un territoire. On pisse au quatre coins de ce que l'on peut ( les Pays, les non-lieux, les hétérotopies etc) et, finalement, les lotissements de pavillons pourraient bien servir à ça. Et faire semblant d'aimer ce que tout le monde déteste ça donne de l'épaisseur intellectuelle, le fameux pas de coté de l'artiste en manque d'originalité.

Je sais de quoi je parle. (vous avez raison, c'est de bonne guerre)

La laideur architecturale peut-elle être finalement à l'origine d'un mouvement politique et esthétique qu'il faudra écrire ? Comment justement cette laideur a-t-elle pu séduire et se construire une image de lieu habitable ? Qui a définit cette esthétique du bonheur et pourquoi tout une classe sociale s'y est reconnue ? 
C'est quoi cette maison ?
Peut-être que pour comprendre comment cette dérive esthétique a pu exister, il faut se retourner sur les documents graphiques et promotionnels des fabricants, des promoteurs, des constructeurs ? Comment ont-ils représenté cette vie et ce type architectural et sur quel signe ? Et que disaient-ils aux futurs acheteurs de ce monde de propriétaires fait d'un morceau de terrain recouvert en partie par une architecture a minima, une sorte d'image préfabriquée du bonheur ?
Sur les trois exemples que je vais vous monter, ce qui saute au yeux c'est que le mot architecture n'est jamais employé, pas plus que le mot architecte. N'apparaissent que constructeur et maison. On note aussi que les maisons sont toujours représentées seules, sans le contexte et le prospect, comme si la maison, le pavillon n'étaient pas insérés dans un lotissement, qu'ils étaient perdus dans la nature dont on ne sait pas bien ce qui la constitue d'ailleurs. On note les efforts du photographe pour éviter ce voisinage. La forme globale est toujours la même, un habitat plat surmonté d'un toit en double pente que seule la variation des détails pseudo-régionaux viendra compléter. La couleur des façades et l'apparition minimale du bois (volets, poutres...) finissent de donner à ces constructions un semblant de caractère régional. Rien d'autre. On note que les constructeurs ne communiquent pas sur les plans intérieurs, sur le déploiement des espaces, sur l'originalité d'un lieu de vie. Non, l'argument essentiel est celui d'une certaine tranquillité reconnue comme accessible financièrement. Le coût reste l'argument essentiel. On parlera d'accessibilité.
Il reste difficile de dire qui a commencé, je veux dire est-ce que les constructeurs donnent aux futurs acheteurs l'image exacte de l'attendu d'un futur propriétaire ou bien est-ce que les acheteurs se trouvent finalement devant un marché du pavillon ne lui donnant comme modèle que celui-ci ? 
Dans ma collection, ce genre de cartes promotielles est assez fréquent et il fut même une période ou je l'ai boudé...
On observe l'usage fréquent de la photographie comme mode de représentation des pavillons mais qui est souvent accompagné de peintures et de dessin. Pour l'instant je n'ai trouvé aucune carte montrant des maquettes et on peut s'en étonner car la maquette fut bel et bien un objet de représentation en cartes postales et je me souviens de certaines maquettes de pavillons sous des globes de plexiglass chez des promoteurs. Sans doute que le constructeur préfère communiquer sur du réel, sur de vraies constructions ce qui appuiera sa réputation et prouvera la confiance qu'il a déjà reçu de la part de nouveaux propriétaires. C'est du solide en quelque sorte. On ne sait absolument rien des artistes et des peintres ayant travaillé pour ces constructeurs. Souvent, les représentations ne sont même pas signées. Comment les constructeurs recrutaient donc leurs dessinateurs ? Je ne sais...
Le ciel est bleu, les arbres sont verts, les familles sont  dehors et les enfants jouent. Le bonheur donc. Rappelez-vous ici :

Je note qu'au verso de la carte des Maisons GTM et Compagnie, le constructeur ne s'adresse qu'à l'homme du foyer puisqu'il est demandé de cocher une case pour savoir si "Madame" travaille !

Autre remarque sur ce mode de publicité choisi et l'utilisation des codes de la carte postale : on notera que très très peu de promoteurs d'appartements ont utilisé ce mode de représentation et de diffusion commerciale, en tout cas c'est très faible par rapport à la construction des pavillons. Il y aurait comme un certain accord entre ce mode d'habitat et la carte postale, comme une culture commune de la représentation de la vie à la campagne, une sorte d'idéalisation de l'habitat individuel, se référant sans doute à la maison de campagne, la fermette, le petit cottage tranquille, voir le manoir, une représentation rassurante, loin des axes routiers et de la concentration urbaine, croit-il.
C'est en ce sens que je considère qu'il y a bien là l'invention d'un genre et que je me dois ici de le diffuser et de le révéler. Chaque constructeur ayant essayé de coller à son terrain régionaliste, à son Pays, à son monde, on pourra facilement fabriquer un inventaire et même, localisation par l'image oblige, on pourra inventé un A.R.N : un Atlas Régional Nécessaire.
Nécessaire ? Oui, car il est temps de sauver cette imagerie populaire de l'architecture, cette vision de l'habitat et de l'urbanisme. Il faut montrer comment ce rêve fut et est encore diffusé largement. Et, vous verrez que, comme d'habitude, c'est par ce second degrés permanent qui agite notre époque actuelle que l'on pourra peut-être vraiment étudier notre monde. Ce monde n'est pas underground, il n'est pas invisible, il ne mérite aucun sourire en coin, amusement, petite satisfaction auto-centrée post-anthropologique ou sociologique pour Art Contemporain en panne de sujet, ce monde c'est celui que j'habite, le mien, le vôtre peut-être. Et on emmerde les visiteurs du jour, capteurs d'images, cette petite aristocratie culturelle et bourgeoise qui s'encanaille à la campagne, qui vient nous voir en safari, le fameux zoo de la France tranquille et qui produit un arpentage condescendant de la diagonale du vide pourtant... si peu vide.
Alors ? On y va ?
On les fait chier à notre tour ?

pour voir ou revoir des articles sur cette questions :