mercredi 29 mars 2017

Suisse Marocaine

Dans le classement fait par Walid, il y avait quelque chose de surprenant.
En effet le rapprochement établi entre un immeuble à Casablanca et un immeuble à la Chaux-de-Fonds pouvait paraître un rien étrange. Pourtant, les documents affirment sans aucun doute ce rapport entre les deux architectures qui affichent des ressemblances formelles et structurelles assez évidentes même si l'immeuble Romandie semble moins travaillé dans les détails.
D'abord la carte postale :


Nous sommes donc bien à la Chaux-de-Fonds célèbre dans le monde de l'architecture pour son histoire corbuséenne. Ici, nous regardons la très belle tour du Casino dont l'éditeur Sartori ne nous donne pas le nom des architectes qui sont Messieurs Gabus et Dubois, ceux-là même qui participèrent au chantier de Casablanca dont je vous redonne ici la carte postale :


Pourquoi des architectes suisses vont-ils construire au Maroc avec des architectes français ? On notera que l'immeuble de Casablanca est baptisé Romandie... Un investisseur suisse ?
Revenons à cette tour du Casino.
On apprend dans le Bulletin Technique de la Suisse Romande que cet immeuble est presque entièrement en béton préfabriqué, du moins dès son premier niveau.




Pour le reste, il est ancré dans le sol par du béton coulé sur place. On perçoit ici un vocabulaire franc laissant apparents le jeu des plaques et l'ossature qui, dans leur succession, fabriquent en quelque sorte le vocabulaire plastique de la façade. Cette franchise, cette netteté, j'oserai, cette éthique, permet de faire un bâtiment qui affirme sa structure et la donne à voir dans un style bien marqué de l'époque, à la fois classique dans sa transparence technique et parfaitement dessiné, ourlant les cadres, offrant corniches et redents qui fabriquent des ombres faisant jouer la lumière. D'une austérité que Perret n'aurait pas reniée, la tour du Casino est belle de ce classicisme structurel.
Cela a dû plaire à Jean-Michel Lestrade.
Pour ce qui est de la tour de Casablanca, même si le Fonds Lestrade ne dit rien de vraiment concluant sur la participation de l'ingénieur, il semble bien que c'est l'ancrage au sol qui fut l'enjeu de sa venue au Maroc suite à son travail avec Guth à Mulhouse. On sait aussi comment l'ingénieur avait d'excellentes connaissances en préfabrication. Il nous manque (et c'est rageant) autant dans ma bibliothèque que dans celle du Fonds Lestrade, le numéro de l'Architecture d'Aujourd'hui de 1951 spécial Maroc dans lequel figure l'immeuble. Pourquoi ? Je m'étonne que ce numéro soit manquant alors que les archives de l'agence sont parfaitement classées et que Walid y a trouvé le Bulletin Technique de la Suisse Romande !
J'ai envoyé hier les garçons visiter la bibliothèque de leur école, on verra bien. En tout cas, il ne fait aucun doute que les architectes suisses Messieurs Gabus et Dubois et les architectes français Messieurs Desmet et Maillard ont bien travaillé ensemble. J'imagine que les suisses ont produit dessins et méthodes et que les architectes français furent des architectes d'opération. Enfin... Peut-être. On notera que Marcel Desmet a également travaillé à Casa sur d'autres belles constructions. On reviendra sans aucun doute sur sa belle carrière lilloise et marocaine.
Continuons de creuser les archives.









mardi 28 mars 2017

Révérence ou référence ?

Il fut aisé de s'amuser et même peut-être de se moquer un peu.



Sur une carte postale philatélique construite spécialement pour mettre en relation le lieu, le moment et l'image, on trouve la chapelle Saint-Jean de Carrière-sur-Seine dessinée par l'architecte Charpentier et, sur le timbre, la Chapelle de Ronchamp de Le Corbusier. La carte est une édition de l'Amicale Philatélique de Houilles et le timbre est bien, lui, de la Poste... On remarquera donc aussi que l'oblitération reprend un dessin de la Chapelle Saint-Jean.
En fait, pour obtenir un vrai entier philatélique ne manque que le timbre représentant la Chapelle de Carrière-sur-Seine
S'agit-il d'une tentative heureuse de rapprochement formel de la part d'un collectionneur avisé des constructions de Vatican 2 ou d'un déçu n'ayant pas trouvé le timbre de sa chapelle ?
Il est vrai que depuis cette photographie, on peut trouver le rapprochement assez clair notamment dans la bichromie de l'image et quelques courbes approximativement identiques. Pourtant les deux constructions sont réellement différentes tant dans leur ambition d'avant-garde que dans leur programme. Ce qui est certain c'est que le 1er février 1969, le timbre sur Ronchamp est déjà retiré de la vente depuis le 27 février 1968 ! Il existe d'ailleurs deux valeurs faciales, une à quarante centimes et l'autre à un franc et vingt cinq centimes... Le collectionneur a donc cherché dans la production de timbres un modèle pouvant jouer avec l'oblitération de cette exposition philatélique à Houilles ! Ce plaisir nous permet donc de faire travailler ensemble deux constructions d'églises modernes dont l'une a bien regardé l'autre. Ronchamp semble voler au-dessus du ciel de Carrière sur Seine comme un rêve à atteindre. La chapelle est toujours debout. Je n'ai pu trouver aucune image de son intérieur ni trouver des informations sur cet architecte, Monsieur Charpentier, qui, avouons-le, pour la construction d'une église possède un patronyme parfait...
Aucune information non plus sur le photographe de cette carte postale dont l'impression est plus que travaillée et nettoyée.
On aura donc plaisir, une autre fois, à revenir voir cette chapelle.
Peut-être trouverons-nous un jour une carte postale de Ronchamp oblitérée avec le timbre d'une autre église !


dimanche 26 mars 2017

Tous les horizons

Lorsque je suis arrivé hier à l'agence et que j'ai descendu l'escalier vers la pièce des archives, malgré tout, malgré la prévenance de Jean-Jean, je m'attendais à revoir Denis.
Pourtant, le brouhaha des voix masculines entremêlées, les intonations pointues que je savais de Jean-Jean, tout aurait pu, de marche en marche, me faire comprendre que l'autre, celui qui discutait n'était plus Denis mais Walid.
Je dois l'avouer cela me gêna un peu, comme une jalousie étrange. J'essayais de n'en rien faire paraître avant tout pour Jean-Jean qui me reçut en me prenant par l'avant-bras gauche et en me tirant un rien vers Walid. Je vis une figure ronde, joviale. Le mot jovial avait dû être inventé pour cette figure. La peau légèrement basanée ne sachant dire s'il s'agissait d'un atavisme familial ou d'une vie au grand air, une barbe naissante affirmée certainement depuis une adolescence de l'avant-veille, des yeux ronds grands ouverts et surtout d'un brun sourd, Walid fut immédiatement timide. J'eus droit à un sourire simple puis un bonjour à peine ânonné puis enfin, comme tombant dans un silence d'observation, plus rien d'autre que des gestes allant de se tapoter l'index sur la bouche pour soutenir une affirmation de Jean-Jean ou une manière très particulière de poser son cul sur la table de l'arrière-grand-père, geste que jamais je n'avais vu personne oser faire ici. Nous discutions de l'exposition, Jean-Jean prenait là un document, ici une photographie mais nous savions tous les trois que cette réunion avait un caractère plus particulier.
Walid savait qui il remplaçait.
Il fallait donc beaucoup de tact, de patience, de petits signes pour lui faire comprendre que je n'avais rien à voir dans cette histoire et que la seule chose importante était leur bien-être à tous les deux. Je ne sais plus pourquoi, sans doute une faute d'accord ou un lapsus évocateur, nous éclatâmes de rire tous les trois ensemble en prenant comme point d'appui Jean-Jean qui se laissait ainsi martyriser. Je vis alors Walid le prendre par le cou et lui asséner une petite tape sur le bas du crâne. Ils se chamaillèrent un rien et Walid prit le dessus en affirmant d'un coup :
"Ba voilà, fais comme tu veux ! "
Je me permis de leur rappeler que nous avions un travail à faire et, alors que je partais dans un discours réprobateur sur l'avancement du classement, Walid, sans mot dire, me tourna le dos et partit au fond de la pièce. Il revint tranquillement avec une pile bien droite de documents, tous parfaitement rangés.
"Voilà, David, ce que vous aviez demandé. J'ai rangé par année avec en sous-groupe par ordre alphabétique les lieux, les types suivant votre liste, les architectes puis enfin les collaborateurs. Je me suis permis de faire un dossier "choses inclassables selon les critères de David."
Cette dernière partie nous fit rire tous les trois mais surtout, c'était là la première phrase que Walid m'adressait directement. Je reconnus aussi l'écriture de Denis sur certaines des chemises en carton.
- Denis avait bien avancé, vous savez, j'ai seulement repris là où... euh... il avait dû arrêter, me dit alors Walid.
Il y avait dans la conjugaison du verbe devoir par Walid une politesse sensible.
Sur les dossiers, le mot Maroc était tremblant. Le mot Suisse plus appuyé.........................................
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Jocelyne regarda le train partir pour Marseille. Elle fit, comme dans les films d'amour qu'elle aimait tant, un dernier signe de la main à Jean-Michel qui partait pour le Maroc. Elle savait que ce qui la séparerait maintenant de lui ce n'était pas tellement les kilomètres que le temps nécessaire à ce nouveau chantier. Ce nouveau et important chantier, car, pour la première fois, Jean-Michel venait de recevoir une commande pour l'Afrique du Nord dont il ne connaissait rien. Royan se montait tranquillement et ses plans devaient encore attendre un peu pour passer au chantier, Mulhouse et Guth le laissaient partir pour ce mois au maximum. Ce que ne savait pas Jean-Michel c'est qu'il ferait dans ce Maroc une rencontre singulière, l'une des plus importantes de sa vie, celui du cadeau d'un fils offert par sa mère. Là-bas, grandissait déjà dans les bras de Yasmina, Mohamed. Tous deux ne se doutaient pas non plus de la venue vers eux, d'un amour inconditionnel.
Jean-Michel regarda d'abord le paysage comme suspendu à la disparition de la silhouette de sa jeune femme, il regarda le flou du premier plan laissant, derrière la vitre, la netteté du second puis du troisième, toujours plus lent, comme si l'horizon en frottant la vitre ralentissait le passage du paysage. Jean-Michel avait salué tout le monde dans son compartiment, il avait trouvé sa place, avait fait mine de n'avoir rien envie de partager et tout en souriant à une très jeune enfant jouant avec une poupée, il avait sorti un roman policier acheté sur le quai par Jocelyne. Il essaya de se perdre dans l'histoire, d'être malin et de décrypter dans l'écriture les indices qui y étaient cachés par l'auteur pour trouver avant la fin du roman le coupable. Mais il pensait à son voyage, le train, le bateau, la rencontre avec l'un des architectes à Marseille, la visite du chantier finissant de la Cité Radieuse et puis le départ pour Casablanca.



Il devait en effet rejoindre Desmet qui l'accompagnerait jusqu'à son bureau marocain pour la mise en chantier d'une tour dont la structure devait être parfaitement calculée. Il avait déjà un peu étudié par conscience professionnel le projet des architectes suisses associés au projet, une autre tour, cette fois construite à la Chaux-de-Fonds dont le modèle était très proche. Jean-Michel Lestrade était un homme de terrain au sens propre du terme. Il lui fallait toujours voir le sol, toucher la terre, entendre les rapports sur les fondations du bâtiment car, il disait que son travail ne pouvait jamais être identique sur un sable, une boue, un schiste. Il aimait la géologie des bâtiments. Pour Casa, on lui avait envoyé un rapport détaillé des sous-sol mais qui était un rien ancien et peu éclairant. Combien d'appuis ? Combien de puits de béton coulera-t-on dans le sol de Casablanca pour monter une tour de cette envergure ? Toujours, il y avait tout à construire............................................................................
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Yasmina avait saisi fermement le blouson de cuir de Paco. Elle avait resserré son nœud de foulard sur les conseils de Jocelyne. La moto ne lui laissa pas le temps de s'habituer au confort un peu mou du tansad que déjà le vent et la vitesse lui procuraient une joie intense. Elle se rendit alors compte qu'elle avait même en cet instant oublié de saluer son Momo accroché lui, dans les bras de Jean-Michel et qui, tous deux, la regardaient partir.  Elle tenta de se retourner mais n'avait que peu de place avec la visière de son casque et surtout, le virage pris, elle savait que c'était trop tard. Elle ne sut pas alors dire si ses larmes étaient de la joie de partir, du vent dans ses yeux ou de ce regret d'un au-revoir loupé avec son fils. Elle se rapprocha du dos de Paco, le serra intensément. Elle ne voulait plus faire qu'une seule personne, une masse ferme qui ne pourrait pas tomber. Elle ne savait pas pourquoi mais elle en était certaine, Paco souriait.
 - Ousékéva Maman, demanda Mohamed à son père adoptif.
 - Se promener avec Paco, lui répondit Jean-Michel. Ils reviennent demain. Et toi, ce soir, tu vas au cinéma avec ton frère !
 - Vrai ? Qu'on va voir quoi ? demanda Mohamed.
 - Eh bien, je crois que c'est un film de cape et d'épée, avec Jean Marais.
 - Dekapédépé ? C'est quoi ?
 - de cape... et... d'épée... Tu vois ? Avec des brigands.
 - Ouais, tu verras, ça à l'air d'enfer, j'ai vu l'affiche hier, reprit Gilles.
 - Allez ! On rentre ? Je vous fais un goûter et on file au cinéma. Jean ? Tu prends la voiture ou on ira à pied ? demanda Jocelyne.
 - On ira à pied, en famille, tous ensemble.
Mohamed descendit des bras de Jean-Michel.
Yasmina descendit de la moto de Paco.
La mer était plate. Paco souriait.


par ordre d'apparition :
carte postale éditions A.P.P.I, G. Audissou, Casablanca, immeuble Romandie.
L'éditeur nomme bien Messieurs Gabus et Dubois comme architectes en Suisse et Messieurs Desmet et Maillard comme architectes à Casablanca. Fonds Lestrade, ne pas dupliquer sans autorisation.
Nous reviendrons prochainement sur ces architectes.

mercredi 22 mars 2017

Menace sur Nanterre !

Si on appelle Ville un ensemble urbain articulant dans ses rues, ses constructions, ses espaces, le collage de son histoire, où chaque architecture et chaque vide sont signifiants de cette histoire commune et d'une urbanité, alors la ville de Nanterre est simplement en train de fondre.
Cette ville dont l'histoire architecturale récente est l'une des plus représentative de ce que fut le XXème siècle est en train d'éradiquer son héritage d'une architecture sociale et populaire, progressiste et utopiste.
On sait comment la pourriture a déjà gagné sur l'école d'architecture de Jacques Kalisz littéralement abandonnée par les Ministères de la Culture successifs et par les autorités locales qui possèdent ici l'un des chef-d'œuvres de l'architecture métallique du siècle passé, architecture symbolique aussi de certains combats pédagogiques. Parfaite leçon de ce que l'on veut que devienne cette pensée et de comment on en discute la place dans notre histoire de l'urbanisme et du vivre ensemble aujourd'hui...
Voilà que l'un des plus emblématiques ensembles de logements sociaux de France, sans doute l'une de ses icônes, l'une de celles qui ont fait image autant qu'architecture est maintenant menacée par une "réhabilitation thermique". On sait ce que ce mot contient de violence vis-à-vis de l'architecture contemporaine et moderne, les dossiers sont maintenant nombreux de cette excuse pathétique et démagogique pour effacer cet héritage. Car la "réhabilitation thermique" est bien une violence qui met hors de son champ la nécessaire exceptionnalité du Patrimoine Moderne. En effet, si l'histoire de l'architecture et sa préservation doivent passer par la mise en lumière des qualités des constructions et leurs particularités (toutes leurs particularités) il va de soi que cela doit s'appliquer à l'église baroque comme à la tour de logements sociaux. Il ne doit y avoir dans la préservation aucune hiérarchie ni d'époque, ni de programme et encore moins de mode constructif. Il faut pour faire une histoire accepter l'héritage dans son entier car que l'on touche à la poignée de porte ou à la structure c'est bien à l'ensemble de la pensée que l'on touche.
Les Tours de Émile Aillaud ne doivent pas être épaissies. Elles ne doivent pas être redessinées, ou voir leurs ouvertures transformées, et en aucun cas, ce qui fonde leur présence, c'est à dire le travail de couleur et de matière réalisé par Fabio Rieti avec la complicité de l'architecte ne doit être détruit sous le faux nom de réinterprétation. Car aucune raison scientifique, historique ou même, j'ose, poétique, ne peuvent justifier une modification qui troublera cet héritage qui n'est pas qu'un décor urbain ou une lubie d'une époque mais bel et bien une œuvre au sens le plus précis comme, oui, Versailles, Ronchamp ou Le Havre de Perret. À ce titre, elle a des droits et ses créateurs aussi !
L'abandon de l'une des plus petites particularités de cette architecture sera une lâcheté de notre génération, un abandon de l'histoire à des marchands de produits isolants.
On voit aussi comment il est question de rhabiller les Tours dans un nouvel écrin qui sera sans doute plus digne d'accueillir une gentrification que des logements sociaux. Autrement dit, on s'accorde le droit à une réhabilitation seulement si une partie de celle-ci se fait au détriment des logements. Il s'agit bien d'une politique déguisée d'enjolivement pour redorer sans doute un peu l'image de cette architecture et du quartier. Faire place nette avec la complicité des lois écologiques et des pseudo-artistes et architectes qui viendront y mettre leur touche...Ils sont déjà sur place.
Nous nous devons de faire passer cette histoire, nous nous devons de faire tenir debout, face au monde, face aux yeux ce qui, défaut thermique ou pas, est signifiant de l'histoire de l'architecture.
Il est grand temps que l'état d'exceptionnalité du Patrimoine Moderne soit immédiatement mis en œuvre par une politique vive et puissante de tous les responsables de la Culture et du Patrimoine.
Assez de ce Label Patrimoine du Vingtième Siècle bafoué, inutile, et faussement défenseur derrière lequel les autorités du Patrimoine se retranchent pour faire croire à leur action !
Assez de cette politique écolo-gentrificatrice faussement de gauche qui pollue à coup de polystyrène expansé nos architectures et les vident des habitants !
On en voit maintenant clairement la réalité politique, sa transparence pragmatique, son dévoiement démagogique.
Nanterre  enterre son Patrimoine.
Nous sommes, et soyez-le avec moi,  face à cet héritage architectural, face à cette histoire, tous des citoyens de Nanterre.
Stoppons immédiatement cette attaque ! Ça suffit ! 
Artistes, architectes, ne soyez pas complices de cette fausse réhabilitation qui n'est rien d'autre qu'une éradication en règle d'une œuvre d'art et d'architecture.
Soyons pour une restauration précise, au plus près de l'histoire.
Agissez ! Agissons !
Écrivez aux bailleurs, pétitionnez,  écrivez au Maire, à Madame la Ministre de la Culture,  à vos députés, à la D.R.A.C Il-de-France, faites de l'agit-prop sur les réseaux sociaux, enseignez ce cas à vos étudiant(e)s, faites des articles sur vos blogs, dans vos journaux ! Adhérez à des associations de défense du Patrimoine, inventez-en ! Laissez des commentaires ici :
http://www.batiactu.com/edito/un-concours-rehabiliter-tours-nuages-classees-patrimoine-48282.php
Demandez aux candidats à l'élection à venir ce qu'ils comptent faire et surtout faites le bilan de ce qui a été fait depuis cinq ans pour notre Patrimoine Moderne par pas moins de trois Ministres de la Culture.
MAINTENANT !

Pour revoir tous les articles sur Émile Aillaud :
http://archipostcard.blogspot.fr/search/label/Emile%20Aillaud 
ou
http://archipostalecarte.blogspot.fr/search/label/Emile%20Aillaud

Ceux sur Fabio Rieti :
http://archipostalecarte.blogspot.fr/search?q=rieti
http://archipostcard.blogspot.fr/search?q=rieti

Et ceux sur Nanterre :
http://archipostcard.blogspot.fr/search?q=nanterre
ou
http://archipostalecarte.blogspot.fr/search?q=nanterre

Pour faire comme il se doit sur ce blog dédié à l'architecture et à sa représentation en cartes postales et pour affirmer une fois encore qu'il n'y est pas que question d'images Vintage sans source, sans photographe, sans architecte...Voici deux cartes postales des Tours d'Émile Aillaud à Nanterre.
On commence ?



L'éditeur Lyna pour Abeilles-Cartes a donc envoyée Rolf Walter en reportage. On connait bien ce photographe sur ce blog et nous aimerions, je le redis, en savoir davantage sur lui.
ici, il cadre un premier plan fleuri au bout d'un jardin. Le petit bananier tente de rivaliser avec les Tours de Aillaud. On a donc un premier plan de verdure, une ligne de constructions et un ciel étendu et étal. Une carte postale donc mais qui a le mérite de mettre en évidence la multitude du bâti et comment les couleurs de Fabio Rieti joue avec le ciel.
Une autre :



Cette fois c'est J.N. Duchâteau qui fait le cliché. Là également on connait bien ce nom ! Il travaille pour Raymon et place les Tours de Aillaud très loin en choisissant le plan d'eau comme élément naturel pour faire un premier plan très bleu qui viendra à son tour jouer avec la ligne de constructions et le ciel. L'église tout juste dans le cadre signifiera la jonction entre la ville moderne et l'héritage historique. Il s'agit du Parc départemental Malraux. On notera la Cité Lénine à gauche du cadre.

dimanche 19 mars 2017

Charlotte Perriand au Mans



Vous voulez lire une belle et vraie histoire ? L'une de celles qui se racontent entre aficionados du design et de l'architecture ?
Je commence :
Il y a quatre ans maintenant avec mes collègues enseignants aux Beaux-Arts du Mans nous avions décidé de faire travailler nos étudiants sur l'une des plus représentatives barres de logements collectifs de la ville et certainement aussi, de par sa proximité avec les Cités Radieuses, l'une des plus représentatives du Hard French en France : La barre dite Le Couteur dans le quartier Courboulay. Cette barre, je vous en ai déjà parlé. Je l'aime tout particulièrement.
Ayant reçu les autorisations du bailleur, nous avions pu faire une belle étude avec nos étudiants et des habitants nous avaient gentiment ouvert leurs portes. Là, avec mon collègue Miguel Mazeri, nous fûmes immédiatement surpris par des aménagements intérieurs très typés par la Modernité, reconnaissant ce style de poignée et de portes à glissières, dessin très proche de celui des Cités Radieuses.
Mais à ce moment-là, bêtement sans doute, ne pouvant imaginer la suite, nous restâmes sur une simple idée de proximité et je n'avançais pas plus le dossier. Entre-temps, je fis l'acquisition d'un lot de revues Techniques et Architecture et, dans l'une d'elles, je trouvais un article complet sur cette barre Le Couteur qui annonçait sa future construction. Déjà ma joie était au comble de voir ainsi maquette, plan et textes sur ma barre Le Couteur ! Mais soudain, mon sang ne fit qu'un tour ! Là, nommée dans les aménagements de la barre figurait le nom de Charlotte Perriand ! Oui ! Et sur les plans, on reconnaissait parfaitement son mobilier et ses aménagements.




 

 









 

Or, quasiment dans le même temps, je savais que les travaux de réhabilitation (on reparlera de ça....) seraient bientôt mis en route. Il fallait faire vite pour sauver cet héritage dont je savais qu'il finirait dans la benne, ignoré de tous. J'essayais vainement tout seul de prendre contact avec les responsables de ce chantier mais en vain. Une seule personne pouvait faire ce sauvetage, une seule pouvait avoir l'habitude, la patience et l'organisation : mon ami Clément Cividino.
Il fallait faire vite.
Enfin le démantèlement de cet héritage moderne, son sauvetage ont pu être organisés de main de maître. J'entends déjà les sirènes de la contestation et de la crainte.
Oui.
Démantèlement n'est pas un gros mot quand institutions et responsables s'organisent pour que ce qu'ils jugent obsolète puisse, par la valorisation du marché, être sauvé simplement de la destruction. Au Mans, on a l'habitude... L'auvent de la Sécurité Sociale dessiné par Jean Prouvé fut aussi sauvé de la casse par Patrick Seguin... On notera donc d'emblée qu'une Ville possédant sur son territoire l'héritage de la Modernité par deux de ses plus grands noms a su les laisser partir... Tant mieux pour nous amateurs, tant pis pour l'histoire locale. Alors, aujourd'hui que l'ensemble de ces aménagements a trouvé une nouvelle vocation, nous avons décidé qu'une partie de celui-ci serait visible par tous à Piacé dans le parcours d'art et d'architecture contemporaine. En effet, une partie de ces aménagements sera bientôt réutilisée dans le parcours d'architecture et de Design de l'Association Piacé-le-radieux Bézard-Le Corbusier. Charlotte Perriand retrouvera donc une belle proximité avec des panneaux de ses amis Jean Prouvé et Le Corbusier. Ces morceaux de vie et d'habitats collectifs resteront donc à disposition des amateurs, des étudiants, des passionnés. Il était important pour moi comme pour Clément Cividino et Nicolas Hérisson que cette histoire puisse être partagée par tous. Et ceux qui veulent contempler et vivre chez eux avec un beau morceau de cette Modernité pourront en faire l'acquisition auprès de la Galerie Clément Cividino. La valeur des choses c'est l'attention qu'on y porte. Entre la benne oublieuse et l'antiquaire de mobilier du Vingtième Siècle, j'ai choisi le deuxième. Clément Cividino est porté par la passion, le désir d'en vivre, le respect de ce mobilier et surtout par sa valorisation par des collectionneurs.





Cette histoire est aussi celle de chercheurs, d'amoureux qui passent des heures dans des vieux papiers, des archives, qui épluchent, visitent, reconnaissent le potentiel historique de ces architectures du Logement Social aujourd'hui réhabilitées pour rester poli.
Nous ferons bientôt un article sur cette transformation.
Voici les coordonnées de la Galerie Clément Cividino  :
https://www.clementcividino.com/charlotte-perriand

Je vous informerai dès que le mobilier sera valorisé à Piacé.
La photographie de Charlotte Perriand provient d'un documentaire datant de 1985 pour Antenne 2 et on la doit à F. De Lafosse pour Interpress. Je l'ai chinée récemment.
Je vous donne quelques images du chantier produites par Clément Cividino, merci de ne copier et diffuser aucune image ou document sans mon autorisation ou celle de la Galerie Clément Cividino.



 

mercredi 15 mars 2017

La déconstruction

Nous allons refaire un article transversal allant du site de cartes postales à celui de lithographie car, aujourd'hui, je vais à nouveau évoquer le grand David Macaulay.
Cette fois, il s'agit de son ouvrage La déconstruction ou la mort d'un gratte-ciel, publié en France en 1981 au éditions du Coq d'Or.
Comme pour l'ouvrage La civilisation perdue, naissance d'une archéologie, David Macaulay s'amuse avec nous du futur. Ici, l'idée est simple : un prince saoudien très riche décide d'acheter et de démonter l'Empire State Building pour le reconstruire chez lui dans le désert et en faire le siège de son entreprise de pétrole ! Oui...
Cette idée drôle et bien évocatrice de la manière dont on pensait les relations internationales avec les nouveaux riches du pétrole va avoir un intérêt pédagogique puissant. Il s'agit de nous raconter à la fois la construction et la déconstruction d'une architecture et donc d'en comprendre par le menu la manière dont elle est construite, de saisir toutes les particularités car l'auteur, David Macaulay, pour ce qui est de la précision ne fait aucune concession à la fantaisie. Mêlant ainsi habilement humour, fiction, histoire et réalité d'un monument, il nous le donne à voir avec un tout autre regard dont, bien entendu, la très belle qualité de son dessin, soutient l'idée. Chaque page est superbe et la composition claire et très blanche laisse le trait fin et précis prendre le dessus. C'est vraiment très beau et surtout très sérieux et didactique. Les plongées, les perspectives audacieuses, la récurrence de certains points de vue montrant la descente de la tour ajoutent encore au plaisir de la lecture.
Un glossaire technique vient même clore l’ouvrage. On notera aussi une connaissance poussée des modes réels de démontage. On imagine notre auteur faire toutes les recherches possibles pour ajouter de la crédibilité. L’entreprise de déconstruction se nomme en français Lecasseur...
Malheureusement, une fois démonté, l’Empire State Building est empaqueté dans un navire qui viendra s’échouer contre...un iceberg venu apporter de l’eau douce au dessert et sombrera corps et biens dans le golfe persique...Titanic au soleil...Il ne restera rien d'autre du géant qu’une épave au fond de l’eau, bien loin de New-York.
Aujourd’hui, on regarde le dessin de Manhattan de David Macaulay avec un autre œil. Au loin, au bout de la presqu'ile new-yorkaise, David Macaulay avait dessiné les tours jumelles du World Trade Center. Un peu frêles, un peu lointaines, à peine ombrées, elles racontent dans le drame de l’histoire que nos belles architectures peuvent bien pour une réalité ou pour une fiction disparaître pour de bon.
Étrange prémonition, le livre se termine sur l'érection d'un monument dédié à la tour disparue...
Et, saurez-vous trouver la main de King Kong ?

la déconstruction ou la mort d’un gratte ciel
David Macaulay, éditiond deux coqs d’or
traduction de Nelly et Roger Hanoune
isbn-0-395-29457-6

5 euros chez un bouquiniste.























Comme nous sommes aussi sur un site de cartes postales, je vous propose quelques cartes postales de l'Empire State Building.
D'abord une image trompeuse et aussi amusante par son auteur :



Cette carte postale en noir et blanc n'est effectivement pas ancienne. De plus son auteur serait...Battman lui-même ! En effet c'est bien le nom de l'éditeur qui propose aussi une adresse internet www.Battmanstudio.com dont je retiens surtout cette édition :
https://battmanstudios.com/product-category/nycfirefighterscalendar/
Une autre ?



Cette carte postale est une édition Nester's Map and Guide Corp. Non datée, elle doit avoir été imprimée dans les années cinquante. Elle donne peu d'informations à part la hauteur de 1472 pieds et la date d'érection, 1931.
Encore ?



Cette fois c'est la Manhattan Post Card qui s'y colle avec cette belle carte postale venant d'une photographie de James F. Doane. La carte fut éditée en 1961.
Du même éditeur, non datée et la nuit venue :



Comme les plaisirs ne viennent jamais seul, mon ami Olivier Bobe m'offre ce très beau dépliant de L'Empire State Building datant du milieu des années soixante. J'aime son plan en fish-eyes, sa typo et surtout, surtout qu'il fut Lithographed in the U.S.A ! Comme quoi la transversalité entre mes blogs est bien respectée !