lundi 31 août 2015

Corbusier's Cloister and new brutalism

Je ne vais pas faire d'histoire, du moins je ne vais pas vous faire l'histoire du couvent de la Tourette de Le Corbusier. Premièrement (et c'est le plus important) parce que je la connais mal mais surtout parce que la richesse critique est immense et que vous trouverez rapidement toutes les informations nécessaires.
Nous allons ici prendre plaisir à croiser les sources et les regards en retrouvant des cartes postales et également un article paru dans un numéro de la revue Horizon que nous avons découvert il y a peu.
Voici donc trois cartes postales du couvent de la Tourette, trois cartes en couleurs, toutes trois des éditions Combier et toutes trois datées de 1961. Aucun nom de photographe ne nous est donné.
Commençons :



C'est bien le réfectoire que nous retrouvons ici. Cette fois il est "meublé" pour recevoir les moines et les invités. Le photographe se place au milieu de sa largeur et pointe la chaire depuis laquelle une lecture sera faite pendant le repas.



On devine déjà ici un goût certain pour une forme fruste bien entendue réglée par l'architecture même mais appuyée par un mobilier paysan, simple, franc. On pourrait à tort regretter que les amis designers Charlotte Perriand et Jean Prouvé soient restés dehors. Les meubles sont ceux des fermes alentour, des bistrots et des salles des fêtes ou des églises. Les couleurs viendront des rideaux, des pans de couleur mais surtout du paysage largement offert par les grandes baies. Il ne s'agit donc pas d'une sécheresse mais au contraire de la mise en scène d'une nature devant se fracasser dans un intérieur se laissant surprendre. La lumière et ses ombres et la vue généreuse sont les points d'appui de la méditation de ce moment de partage. L'œil pourra aussi se réjouir d'une solidité affirmée de la structure laissée à voir, apparente, finalement à l'égale des poutres de chênes immenses visibles dans le bâti ancien. Le génie civil appliqué au religieux.



La couleur ! La couleur !
La carte postale Combier nous propose là une traduction étrange de ce grand moment d'architecture qu'est la crypte du couvent. Lieu iconique de l'œuvre de Le Corbusier, les canons de lumière découpent dans le plafond des auréoles de couleurs pures venant travailler contre celles des murs et du béton brut. La succession des autels ressemble à de petites tombes posées en gradin. Les genoux sur le sol, le regard obligé à l'aplat de couleur, le crâne exposé aux tirs des canons de lumière, ici le moine reçoit l'essentiel. Un éclat de lumière étrange vient irradier l'image. On va vite comprendre qui il est.



L'autre point de vue édité nous permet en effet de saisir ce qu'est cet éclat. Il s'agit de spots électriques venant apporter à leur tour une lumière qui, rasante et blanche, fait monter le grain du banchage du béton un peu comme les restaurateurs de peintures éclairent les surfaces des tableaux pour en saisir les repentirs. On pourra se poser la question de la nécessité d'un tel ajout de lumière comme si l'architecture n'en distribuait pas assez. Trois sources de lumière donc dans ce lieu : les canons de lumière, les spots et n'oublions pas les cierges qui brûlent d'une lumière jaune et fragile et qui sont bien plus des images sur lesquelles appuyer les prières que des sources d'éclairage. Mais ces deux cartes postales proposent des champs colorés que l'on devine un rien retravaillés par l'éditeur. On aperçoit des saturations et même des chevauchements d'aplats qui ne sont pas naturels au lieu. Il y a eu là sans doute un peu de retouche. Qu'importe ! Quel espace ! On oscille entre une rigueur froide et cryptique et la jubilation parfaite de la couleur pure. James Turrell sait-il d'où il vient ?
Mais voici que la revue Horizon datée de mars 1961, même année donc que nos cartes postales, consacre un article très illustré sur le couvent de la Tourette. Écrit par Cranston Jones, l'article est très positif et fait un travail didactique pour faire saisir l'opportunité de cette architecture. Certains passages feront plaisir au Comité de Vigilance Brutaliste car très vite cette terminologie est utilisée sans d'ailleurs nommer sa source : Reyner Banham. Ce qui prouve bien que dès le début des années soixante, ce vocabulaire est d'usage autour de l'œuvre de Le Corbusier et même tente d'en faire l'un des natifs. Comment ne pas être d'accord avec Cranston Jones ?
On remarquera que l'iconographie de l'article provient de plusieurs sources photographiques allant de l'inévitable Lucien Hervé à Jean Marquis ou encore J. Caps, ces deux derniers photographes m'étant encore inconnus. Il semble donc que l'auteur ait pioché dans une banque d'images pour faire son article. Le choix se porte sur des cadrages serrés, tendus, durs dont seules les silhouettes des moines permettent de donner vie et échelle. C'est bien les clichés de Jean Marquis qui révèlent la vie du couvent de la Tourette. La revue Horizon fait le choix d'un article entièrement en noir et blanc ce qui durcit aussi l'aspect brutaliste de l'œuvre de Le Corbusier que tente d'adoucir le texte en évoquant par exemple les couleurs manquantes ou l'intégration dans le paysage. La mise en page est solide, belle et offre parfois des photographies en pleine page associées à des détails. De nombreuses citations de le Corbusier sont utilisées pour lui permettre aussi d'expliquer le sens de son travail. Il donne même en quelque sorte la définition de ce que l'article appelle The new brutalism : " avec des matières brutes, établir les rapports émouvants." Malheureusement, Cranston Jones ne nous donne pas l'origine de cette citation...
Bonne lecture !

On pourra revoir et relire les articles sur le couvent de la Tourette en allant là.


























dimanche 30 août 2015

Foncillon réconciliation

Malgré une nuit difficile où les images de la journée d'hier revenaient en boucle, au matin, au petit déjeuner, Jean-Michel et Mohamed avaient fait tout deux bonne figure. Jean-Michel savait décrypter dans une politesse trop appuyée, dans des petits gestes attentifs de la part de Momo les excuses qu'il ne dirait pas. Ces deux-là fonctionnaient ainsi sur le mode du silence bavard.
Lorsque Gilles descendit à son tour pour prendre le petit déjeuner dans la salle de l'Hôtel Beau Rivage, il s'assit à côté de son frère, lui aussi, comme si de rien n'était. Il faudra maintenant toute la patience de Yasmina et de Jocelyne pour faire chauffer à nouveau, entre ce trio masculin, la complicité qui les reliait.
Momo taquina un peu Gilles, histoire de le faire rire et de briser ce silence. Gilles se laissa ainsi un rien moquer sur sa tenue, et Jean-Michel, dans une complicité soudaine avec Momo, ajouta une petite pique en levant les yeux de son journal. Gilles se laissa faire, tous et surtout lui, savaient bien qu'il s'agissait là d'une stratégie familiale et non d'une vraie attaque.
Il faisait beau.
Momo osa même exprimer une envie. Il voulait absolument aller se baigner dans la piscine de Foncillon. Il savait pourtant que Jean-Michel ne comprenait rien à ce désir de bain en piscine alors que la mer elle-même était au pied du bassin, gratuite, vivante, joyeuse.
Momo essaya d'argumenter sur la température, la propreté, les plongeoirs et la tranquillité d'un espace privilégié. C'est bien ce privilège qui exaspérait Jean-Michel.
Gilles regarda Momo dans les yeux et lui demanda pourquoi il n'évoquait pas tout de suite la seule et vraie raison du désir de Momo d'aller à cette piscine.
Momo resta bouche bée.
Jean-Michel demanda à Momo des précisions que celui-ci fit semblant de ne pas comprendre.
"Les filles." finit par dire Gilles.
"Et surtout une."Ajouta-t-il.
Jean-Michel comme soutenu par le rempart de son journal qui le cachait à moitié regarda fixement Momo qui détourna les yeux puis, comme à son habitude, Momo reprit la parole immédiatement pour prendre position, argumenter, occuper l'espace de ses mots et désavouer Gilles.
Mais la surprise vint de Jean-Michel qui lui coupa la parole.
"C'est une excellente raison. Pourquoi ne pas l'avoir dite de suite ?"
Jean-Michel savait parfaitement que Momo serait bien plus gêné en trouvant en son père un allié exigeant une parole vraie plutôt que des mensonges sous-entendus et complices.
Momo et Gilles restèrent stupéfaits.
"Je suis d'accord, vous allez à la piscine de Foncillon. Gilles tu decideras de la fin de la baignade qui ne devra pas excéder 18h30. Vous rentrez directement, vous ne quittez pas la piscine sans nous dire où vous allez. Je passerai vous voir dans l'après-midi par surprise. Momo tu fais exactement tout ce que te dit ton frère. C'est à prendre ou à laisser comme proposition."...........



.............Comme convenu, Jean-Michel laissa Yasmina et Jocelyne sous les voûtes du port pour aller jeter un coup d'œil à ses deux fils laissés à la piscine de Foncillon. Et comme à son habitude, Jean-Michel jeta d'abord un regard général sur les lieux,  admirant la belle tour de Foncillon et le Palais des Congrès. Il s'étonna aussi que depuis cette hauteur, légèrement en surplomb, on puisse voir Notre-Dame de Royan dépasser un rien de l'hôtel Beau-Rivage.







Il ne mit pas longtemps à trouver ses garçons qui occupaient symétriquement les plongeoirs. Ils avaient tous les deux des maillots de bain du même rouge vif achetés ensemble comme un signe de ralliement. Mais dans leur attitude, dans leur geste, Jean-Michel pouvait aussi reconnaître leurs différences de caractère. Gilles était seul sur le plongeoir, il regardait à sa droite son frère Momo juché sur le dos d'un autre adolescent, complice et camarade de jeu d'un après-midi comme savait en trouver Momo partout où il allait ce que ne faisait jamais Gilles dont semble-t-il la proximité avec son frère lui suffisait toujours. Gilles voulait là faire un beau plongeon, propre, bien dessiné, sportif. Momo, lui voulait faire un énorme splash, une bombe la plus bruyante et spectaculaire possible.






Jean-Michel les regarda sans intervenir assez fier de ses deux garçons. Il vit aussi que deux jeunes adolescentes étaient elles aussi au spectacle. Gilles s'élança le premier, parfaitement tendu et entra dans l'eau sans aucun frémissement de la surface. Momo et son copain tombèrent dans l'eau dans des hurlements stridents juste avant un silence puis l'énorme geyser attendu. Les trois nagèrent vers le bord et Jean-Michel décida d'aller les rejoindre. Jean-Michel comprit immédiatement à l'attitude de Momo que celui-ci avait peur que son père ne désapprouvât ce plongeon bruyant et viril.
"Tout va bien ?" demanda Jean-Michel aux deux têtes mouillées dépassant du bleu de la piscine.
"Oui, on va bientôt rentrer Papa, il est presque l'heure non ?"
"Vous avez encore une demi-heure, Gilles. Aucun retard, vous entendez. Aucun retard."
"Et si on rentrait maintenant puisque tu es là ?"
Cette proposition de Momo d'écourter ainsi la baignade était le dernier geste de réconciliation que celui-ci voulait offrir à son père. Gilles approuva, il était un peu lassé des jeux puérils de son frère dans cette piscine même s'il avait bien apprécié la compagnie de son camarade d'un après-midi.
"Parfait, je vous attends dehors."
Jean-Michel entendit alors l'une des filles, celle au maillot blanc, s'adresser à Momo.
"Oh dis donc il est pas marrant votre père, venir vous chercher comme ça !"
"Notre père il est génial et ce que t'en penses, on s'en bat l'œil." Lui rétorqua aussi sec Momo.



vendredi 28 août 2015

La meilleure série américaine : premier épisode, les cartes postales

Dans la série How I met your mother, Ted Mosby le héros principal qui est architecte, nous raconte que l'un de ses désirs les plus chers est de marquer la skyline de New York de l'une de ses créations. Cette ambition fut réussie par une équipe internationale d'architectes pour l'un des emblèmes de la ville de New York, le siège des Nations Unies.
Lorsqu'on demande à un groupe d'architectes de travailler ensemble sur un projet, on peut souvent s'attendre à avoir le moins bon de chacun d'eux avec le désir ensuite de ses protagonistes d'obtenir la paternité de la réalisation... La médiocrité nait souvent du consensus.
Mais, voyez-vous, étonnement, ce n'est pas le cas ici, même si bien sûr, Le Corbusier fut le premier à demander un peu plus de reconnaissance. Le siège de l'ONU est une réussite aussi certainement parce qu'il permet d'un coup de faire entrer la skyline dans le style international. C'est sans doute cela qui détermina sa richesse iconique et qui poussa les éditeurs, en plus du programme, à réaliser une quantité incroyable de cartes postales et de continuer d'en produire. Avec sans doute feu le World Trade Center, New york s'est reconnu par cette construction.
J'ai plus d'une vingtaine de cartes postales de ce siège des Nations Unies dans ma collection et je suis très loin d'avoir la totalité de ce qui a été produit. Je vous propose donc ce qui sera, par la quantité des cartes, l'un des plus longs articles de ce blog !
On notera que le bâtiment fut photographié selon presque tous les angles, de l'extérieur et de l'intérieur, de jour comme de nuit. La nuit ayant d'ailleurs été pour les éditeurs une vraie alliée. On trouvera dans les revues quelques compléments à cette série américaine. On notera également que dans cette série aucun éditeur ne prend le temps de nommer les architectes !
Faisons-le maintenant :
Directeur des plans : Wallace K. Harrison
Directeur des plans adjoint : Max Abramovitz
Architectes-conseils : G-A. Soilleux (Australie), Gaston Brunfaut (Belgique), Oscar Niemeyer (Brésil),
Ernest Cormier (Canada), Ssuch'eng Liang (Chine), Le Corbusier (France), Howard Robertson (Royaume-Uni), Sven Markellus (Suède), N-D. Bassov (U.R.S.S.), Julio Vilamajo (Uruguay).
Experts-conseils particuliers : Hugh Ferris (U.S.A), Vladimir Bodianski (France), John Antoniades (Grèce), Mattew Nowiki (Pologne), Josef Havlicek (Tchécoslovaquie), Peter Noskov (U.R.S.S.), Ernest Weissmann (Yougoslavie).
Ouf ! On notera la présence de Hugh Ferris...

Si dans le plan général, on peut tout à fait admettre que les idées de Le Corbusier sont majoritaires, il ne faut pas oublier l'influence certaine d'Oscar Neimeyer dans le dessin de la salle de l'Assemblée Générale. Nous dirons que par ce brassage d'architectes qui a fait que la France a eu l'idée magnifique de proposer pour la représenter de choisir un architecte franco... suisse, (ce qui s'accorde d'ailleurs avec l'idée même de nations unies), ce bâtiment est une forme de déclaration du style international. Pour la photographie, c'est évidemment la grande façade s'élevant sur l'horizon qui fait la figure de la construction. Par son échelle et sa proportion, un parallélépipède fin à la grille régulière, ce morceau prend le potentiel d'un signe. Il apparaît moins dogmatique que les pointes ahurissantes de ses compagnes venant enfoncer des aiguilles gigantesques dans le ciel américain. Sa neutralité symbolique, presque une froideur narrative permettent bien de ne donner aucune chance à une récupération nationaliste. Cela sert parfaitement le lieu et sa fonction et sur le sol américain il est déjà à lui seul une déclaration d'unité. On le rêverait sans doute plus efficient dans sa réalité politique...
Dans l'ensemble on ne remarque rien de très particulier dans les prises de vues de la construction. On oscille entre désir de fixer l'ONU dans son paysage urbain et le saisir plus serré dans le cadre pour mieux le définir. C'est là un dilemme fréquent d'autres objets architecturaux. J'aime tout particulièrement quelques cartes postales non pas tant pour l'audace artistique de leur cadrage que pour une douce charge sympbolique. J'aime tout particulièrement celle des éditions Manhattan Post Card Pub qui cadre au premier plan le très beau drapeau américain flottant flou. Sa fragilité agitée s'oppose à la fermeté du bâti. Par ce plan, il semble bien que le photographe replace l'orgueil de la Nation américaine au cœur de la question internationale des enjeux politiques, réaffirmant là le territoire de ce combat. Ce drapeau, quoique vous en pensiez, je le remercie.



Sur cette édition, on remarque le chantier sur la droite de l'image, édition Alfred Mainzer, datée de 1963, photo de Trans World Airlines :



Prises au fil de l'eau, voici d'abord l'édition  Alfred Mainzer, photo de A. Devaney puis l'édition Manhattan Post Card Pub, datée de 1964 :




















L'une des plus belles, des plus radicales, encore une édition Alfred Mainzer :

Une édition Alfred Mainzer avec oblitération dans le ciel :



Directement éditées par le bureau de l'information au public, une série de l'intérieur des Nations Unies :










Toujours une édition Alfred Mainzer mais curieusement imprimée en Espagne !
Au dos le correspondant précise avec humour : "Architect is the more difficult job in the world."

























Maintenant, la nuit va tomber, à moins que ce ne soit le jour qui se lève sur New York !
Par ordre d'apparition : édition Alfred Mainzer expédiée en 1980, édition Manhattan Post Card pub. expédiée en 1967 photo de la Free Lance Photographers Guild, édition Nester's Map, photo de la trans World Airlines. Pour finir un éditeur inconnu, la carte fut expédiée en 1977.



lundi 24 août 2015

La Vierge des pauvres a trouvé son abri

Revenons sur le projet d'église à Nancy au Haut-du-lièvre.
Nous allons voir que parfois les projets et le réel donnent bien à voir un écart certain dont la réalité finale peut même être un rien décevante.
Commençons :



Cette carte postale est du type de carte de souscription pour alimenter et défendre la prochaine érection de l'église de la Vierge des pauvres du Haut-du-lièvre. On y voit dans le noir profond du studio la maquette de cette église, maquette incroyable pour une architecture étonnante. L'image et l'architecture, avouez-le sont saisissantes !
On notera que l'architecte est nommé au verso : D. A. Louis.
Que proposait l'architecte ? Sur un socle dont l'entrée est enterrée devait être posée une succession de couronnes se réduisant vers le ciel pour former une coupole couronnée d'un treillis métallique pouvant faire penser à une couronne d'épines. Le cinétisme de l'ensemble provient de la répétition du module et de l'ouverture dont on imagine que la lumière devait apparaître après la descente de l'entrée comme une révélation spatiale.



On note à gauche un petit édicule supportant la croix qui devait avoir le rôle de signal pour ne pas dire de campanile, nous ne voyons pas de cloche. La lumière sur la maquette étant particulièrement dramaturgique comme des phares de voitures venant en éclairer l'entrée, la photographie de cette maquette apporte si ce n'est un grand champ esthétique au moins la certitude d'un événement architectural, d'un geste. Le photographe n'est nommé que par ses initiales : J. V.
On attend donc à la vue de ce projet une réalisation audacieuse et originale mais :



Cette carte postale multi-vues de cette même église va nous permettre de relativiser cette audace. D'abord réjouissons-nous de retrouver notre Vierge ici abritée enfin dans son église. Puis à sa droite une image de l'intérieur de l'église et notamment de sa charpente nous permet de saisir l'écart entre la maquette et le réel !







Si la charpente en lamellé-collé est d'une grande beauté, le moins que l'on puisse dire c'est bien qu'elle s'est assagie par rapport au projet. Que s'est-il passé entre la projection du rêve et la réalité ? Difficulté technique ? Discorde esthétique ? Manque de moyens financiers ? On se retrouve donc avec un plan circulaire dont s'élève une couverture reprenant l'image de la tente si chère à Vatican 2 mais ayant abandonné le cinétisme de la première version. On retrouve un peu l'histoire de l'église Saint Jean de Grenoble. Mais ne soyons pas trop déçus et admirons tout de même le reste de cette église que nous donnent à voir les autres détails. D'abord son espace circulaire extrêmement chaleureux grâce à son ciel de bois et dont la lumière court tout le long de la jointure entre son socle de béton (?) et son toit. Puis le mobilier et l'ensemble décoratif et les surprenants reliefs sculptés des murs donnent à l'ensemble une vraie modernité, une beauté un rien naïve parfois. L'éditeur Combier nomme bien l'architecte D. A. Louis, elle fut expédiée en 1967.
Pour finir cette visite du moment, voici un espace incroyable :



Nous sommes bien dans cette même église de la Vierge des Pauvres. Les éditions de l'Europe ne précisent pas l'objet de cet espace particulier mais nous pourrions facilement identifier le baptistère. L'effet cryptique dont surgit une lumière circulaire rebondissant sur le bleu du point d'eau est vraiment surprenant. Comment ne pas être également surpris et séduit par les murs en très haut relief granuleux qui m'évoquent quelques temples mayas ! Il s'agit en tout cas d'une vraie expérience spatiale, d'un vrai moment architectural dont l'image sert sans doute, dans la perte de l'échelle, le mystère. Quels autres lieux que nos églises modernes et contemporaines ont ainsi pu nous offrir des espaces architecturaux aussi abstraits, déterminés, curieux ?
Si nous faisons un petit tour sur Google Earth nous retrouvons notre église de la Vierge des pauvres. Et comme souvent, quelque chose de ce réel objectif d'une Google Car sans jugement nous serre le cœur. Pourtant, elle est là, la Vierge des pauvres, ouverte, offerte si j'ose dire. Et dans ce lieu, semi- enterrée, elle offre encore sans doute son rôle premier, un espace à part, hors du monde mais aussi en son cœur. J'aimerais y faire un tour.