On finira par regretter qu'elles existent. On finira par ne plus avoir envie de les défendre, de les voir, de les visiter. Les Piscines Tournesol sont devenues un écran à la Patrimonialisation de l'Architecture du Vingtième siècle, une sorte de minimum requis pour amateur. Un arbre qui cache la forêt. Et les transformations, les "requalifications" des Piscines Tournesol deviennent alors aussi la démonstration de la réhabilitation possible que devrait subir l'ensemble du Patrimoine, comme un point de qualification et un exercice obligé des architectes d'aujourd'hui laissant croire qu'ils préservent, qu'ils participent à leur maintien alors que, bien souvent, il ne reste de la Piscine Tournesol, après leur intervention relevant du Tuning que l'espace creux de leur coupole.
Et la chasse est ouverte et la chasse aux regrets aussi, chaque DRAC devant montrer sa position patrimoniale face à la ou aux Piscines Tournesol de son territoire. Ici on protège, là on réhabilite, ici on détruit...Oh mince !
Pendant ce temps-là des oeuvres vraiment particulières sont détruites sans remords. Faire écran. Les Piscines Tournesol font maintenant écran à la politique de sauvegarde du Patrimoine du Vingtième siècle. C'est assez.
Le Vintage prend la place du Patrimoine, c'est à dire que le sentiment prend la place de la science.
Ainsi, sur une page Facebook d'amateurs de Patrimoine du Vingtième on lit des commentaires sur la mocheté du château d'eau de Le Corbusier à Podensac mais on applaudit à l'apparition de chacune des Piscines Tournesol de notre territoire jusqu'à l'écoeurement. Comment peut-on aller sur un site de Patrimoine du Vingtième pour n'avoir comme commentaire à faire que la mocheté d'une oeuvre ? Pourquoi venir là ? Pourquoi se croire ainsi habilité à faire un commentaire uniquement basé sur un ressenti esthétique ?
L'inventaire des Piscines Tournesol on le connait. On sait qu'aujourd'hui certaines sont protégées, d'autres sont menacées et bien nombreuses furent détruites. On pourrait se demander alors s'il ne faudrait pas penser au sens qu'aurait un classement groupé de toutes les piscines par exemple. Pourrait-on envisager qu'une architecture éditée dont l'édition et la multiplication font en partie son sens historique ne mérite pas d'être protégée dans l'ensemble de cette édition ? Comment expliquer que si une oeuvre a une valeur patrimoniale ici, elle peut être détruite là-bas ? Comment penser cela en terme de politique patrimoniale nationale ? Faut-il toujours croire en la rareté, en l'unicité pour produire du sens historique ? Voilà des questions à poser en lieu et place d'une nostalgie infantile s'appuyant sur l'effet plastique de l'objet architectural au détriment du sens profond de sa multiplicité, de son don d'ubiquité.
Là, il y a moins de monde.
Le coup à coup de la politique patrimoniale permet au moins de voir l'indécision suspecte des responsables nationaux de la patrimonialisation. Chacun dans sa baronnie...gère sa baronnie.
Le fétichisme qui s'appuie aujourd'hui sur ces Piscines Tournesol devrait donc être étudié comme un mauvais signe de l'avenir de nos belles architectures du Vingtième Siècle car, étrangement, je crois qu'il est le signe d'une bien mauvaise manière de considérer ce que Patrimoine veut dire et surtout sur qui a la responsabilité finale de le définir. L'amour nostalgique des souvenirs de famille ? Le Vintage du jour ? La maîtrise historique des constructions ? Une certaine aristocratie du Patrimoine allant des agents d'état dans les collectivité à des associations ou page Facebook menées par des personnes ayant portes ouvertes et cartes de membres dans les deux mondes ? Juges...et Parties...Et l'indépendance du jugement patrimonial ? On s'assoit dessus ?
Et comme ce blog est fautif puisque cela fait des années maintenant que je vous propose un inventaire le plus exhaustif possible des Piscines Tournesol représentées en carte postale, je me dois de maintenir à jour ma folie. Mais j'aimerais bien qu'on parle d'autres choses, choses moins reconnues à tort ou à raison et que l'on sauve une bonne fois pour toutes les Piscines Tournesol et cela dans l'entièreté de leur exceptionnalité et non comme un prétexte de la réhabilitation écrasant tous les signes de leurs particularités.
Celle-ci est à Ecommoy.
L'éditeur est la maison d'édition Diffusion 2000. Sans date, sans nom de photographe ni de l'architecte Bernard Schœller.
On s'amusera de comment le photographe comprend et signale la rotation de la Piscine Tournesol en mettant au premier plan de son cadre le tourniquet de l'aire de jeux.
Ça tourne !
Au fait...Celle-ci fut détruite. Oui... oh la la c'est si triste...
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