samedi 25 mai 2019

Superstudio ça existe

Alors même que le F.R.A.C Centre rend hommage avec justesse au groupe Superstudio, je vous propose de voir quelques vrais Monuments Infinis.
Car, oui, il faudra bien un jour chanter aussi la beauté de cette architecture. Il faudra bien un jour y voir l'absolue radicalité de sa proposition, preuve sublime que l'orthogonalité, la puissance politique et même une forme d'ordre ont su donner une forme architecturale et urbaine non pas digne des utopies rêveuses d'artistes-architectes en mal de critiques sociétales mais bien digne d'une conception originale et surtout lisible d'un désir de logements pour tous.
Ceci n'est pas une utopie, ceci n'est pas une erreur :


Cette forme que l'on nomme barre avec dédain est un ensemble de lignes courant dans la perspective, offrant à l'œil la croyance en sa perte, là-bas, au loin, dans l'étonnement du chatoiement génial de sa régularité.
L'œil aime être ainsi tenu, puissamment guidé, irrémédiablement conduit par une architecture qui ne fait rien d'autre que de tenir sa promesse. Admirable la lecture possible de la mécanique de sa structure, admirable comment les redents des balcons construisent des tours accolées, admirable le jeu des ouvertures, admirable la succession des parallèles, admirable le socle en creux de la galerie marchande.
Admirable et réelle, cette Cité Bénoni Eustache à Villemomble par l'architecte oublié A. Sorin.
Rendons-lui hommage.
Silence.
Merci.
Merci les éditions DL.
Et puis :


Dans un noir et blanc sérieux, voici une autre continuité. Elle se plie un peu, prend un angle, semble épouser la géologie des pentes.
Là encore la structure est visible grâce à son léger dégagement de la façade donnant le rythme, le tempo sériel.
C'est ici non pas la mélodie qui est mise en avant mais bien le battement répété d'un marteau sur une tôle sourde.
Et dedans, loin des moqueries joliesques des intellectuels hippies, on y habite.
On y habite et on s'y situe.


















On barre d'une croix la fenêtre de sa vue, sa place dans la grille non pas monotone, ici on dit égalitaire.
Vous ne regardez pas l'architecture si vous ne vous mettez pas à ses fenêtres pour voir ce que l'on y voit. Quelle vue cette machine sublime donne à voir, quelle voisinage s'y constitue, quelles histoires s'y racontent.
C'est un Domaine, c'est le domaine de Ménival à Lyon, c'est même précisément le Bâtiment 4.
Et maintenant, c'est tellement infini que cela ne rentre pas dans le cadre.


C'est bon signe ce désir de s'échapper.
Ce désir de fuir.
Ce désir de partir du cadre.
La blancheur des lignes continue d'un bout à l'autre de faire glisser le regard, de lui interdire de choisir un lieu ou même d'être tenté par une rupture.
Ça file à l'égal.
Avez-vous remarqué que cette continuité n'est en fait qu'une gigantesque percée ? Qu'elle n'est construite quasiment que de fenêtres ?
Avez-vous remarqué comment la structure donne l'occasion aux arbres de s'exprimer ?
Mireille n'a pas peur de son architecture. Mireille n'en dit rien de négatif, elle regrette même les arbres qui lui empêchent de montrer ses fenêtres à ses amis. Elle fait un point rouge dans le vert des arbres.
Un point rouge.
C'est là, au milieu d'un infini qu'elle habite.
Et c'est de la poésie pure.
Comme un enfant qui dessine à la craie sur les murs de la Cité Radieuse, comme une feuille de cerisier qui ombre un mur à Venise, comme l'usure délicate d'une marche à Talmont.

C'est une poésie que l'on doit aux éditions Tardy venues photographier Super-Marseille, "La Rouvière" et son bâtiment D.

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