Il est toujours délicat d'expliquer pourquoi on a (ou pas) une émotion spatiale dans un lieu. Certainement aussi parce que le mot émotion est toujours un peu douteux, galvaudé, usé par l'émotivité ambiante, contre-carré par la raison et débouté de toute intelligence.
Alors quand un objet de peu se permet, par son image, de vous donner un sentiment de plénitude, d'espace on est souvent dépités devant sa propre émotion.
Quel est donc ce mystère ?
Nous avions déjà ressenti ça académiquement un peu ici et nous avions tenté de l'expliquer :
Mais là, l'objet est assez loin de mes préoccupations puisqu'il d'agit d'un manège d'équitation pour un club de sport : l'UCPA de Segonzac.
J'ai immédiatement aimé cet espace, la lumière qui le baigne, la demi-lune qui encadre le paysage au fond et, comme le font les échos d'une pierre lancée dans l'eau, les courbes en lamellé-collé qui couvrent cette espace tranquille.
La tonalité chaude qui baigne ce lieu est servie par des lumières crues en ligne tombant du haut, le rai de lumière accentuant la perspective et la fuite du regard vers l'ouverture : arbres, ciel.
Mais que raconter architecturalement de ce genre de lieu ? Que dire ? On note que l'éditeur APA-Poux ne nomme pas d'architecte car il est possible que ce soit surtout une architecture d'un constructeur bien plus que d'un architecte. On imagine la fierté de l'entreprise ayant produit les arches en lamellé-collé pour ce lieu, les joies du chantier, voir l'espace, arche après arche se définir.
On note d'ailleurs la finesse de chacune des arches, leur maigreur. Est-ce pour cela qu'elles furent ainsi multipliées et que cette répétition régulière rythme si bien ce ciel de bois ?
J'entends aussi l'architecture. Je veux dire que l'image produit une certaine idée du son qui l'habite, un son fait d'échos, de profondeur, de gravité où les pas des chevaux feutrés par le sable et la sciure font une musique tranquille.
L'architecture c'est pourtant bien aussi ces objets simples, pratiques, pragmatiques. Un terrain à couvrir pour une activité quelconque : pas ici de désir d'image de soi pour un architecte vaniteux, juste le besoin et la fonction : tout est en ordre.
Et sans aucun doute que ce qui prend le plus d'importance dans cette superbe carte postale c'est le vide parfaitement dessiné, le vide parfaitement tenu à sa place.
C'est bien ce qui fait les grandes architectures ou, au moins, les belles images d'une architecture.
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