lundi 8 mai 2017
Tuning de la Mort
Je vais vous laisser chercher un peu, non pas, le lieu mais l'objet de cette architecture. Nous sommes à Villeneuve Saint Georges.
Alors ?
À quoi peut bien servir ce beau volume franc comme posé sur un socle dont les ouvertures verticales sont repoussées sur les arêtes de cet octogone ?
Quelle occupation humaine peut avoir besoin à la fois d'une telle volumétrie aveuglée, d'une rampe d'accès et aussi d'une représentation par les cartes postales ?
Ici c'est l'éditeur Raymon qui envoie devant ce bâtiment son photographe, à croire que Villeneuve Saint Georges devant autant de nouveauté et de modernité pouvait avoir besoin pour ses concitoyens et visiteurs de passage d'une telle représentation par la carte postale ! Il faut l'avouer, ce genre de programmes architecturaux, nous sommes je crois assez nombreux, à ne pas aimer les fréquenter trop souvent...
Alors ?
Commissariat de Police ? Prison ? Banque de crédit ? Hôpital ? Clinique ? Monument à une histoire violente ?
Il s'agit du funérarium...
Oui.
Les éditeurs de cartes postales ont bien, dans cette période, photographié tout ce qui pouvait représenter une modernité, une nouveauté, une particularité.
Notre étonnement d'aujourd'hui dit bien notre époque. Après tout, si une architecture est assez étonnante, assez moderne dans son usage et dans sa forme, ne mérite-elle pas en effet une image et aussi d'être achetée et diffusée auprès de ceux qui n'ont pas la chance de la voir ?
Imaginons la scène :
Alors que le corbillard apporte le cercueil, que la famille attristée se réunit dans le funérarium, un cousin venu de Limoges exprès pour la cérémonie ne peut s'empêcher de jeter un œil stupéfait sur la modernité du lieu. Pendant l'éloge funèbre et émouvant, les yeux levés vers le plafond, regardant les détails des ouvertures, le cousin de Limoges se perd dans ses pensées et se dit que c'est bien dommage que la Grande Tante, trop âgée pour faire le voyage, ne puisse pas voir ce bel endroit. Il est bien évident que l'on ne fait pas de photographies de ce genre de cérémonie. Si seulement... Si seulement il existait une carte postale !
Mais oui !
En redescendant du cimetière, reprenant un dernier café, le cousin de Limoges trouvera au bar-tabac, avant son retour en Renault 16, ladite carte postale. Il n'écrit pas au dos, non, c'est trop dur de recevoir ça par la Poste mais il donnera la carte postale, de la main à la main, à la Grande Tante qui ne manquera pas de lui demander comment s'est passée la cérémonie.
Malheureusement, tout comme le cousin de Limoges nous ne pourrons pas savoir qui a dessiné ce funérarium. On pourra juste voir comment une corniche idiote a été posée sur ce beau volume, corniche qui lui retire toute sa force et sa rigueur. On remarque aussi que le changement d'entrée a amené à dessiner un auvent. Ce qui avait de la tenue est devenu laideur sous un ravalement, une reprise faussement enjoliveuse. Du tuning sur la Mort.
Une fois encore, remercions les éditions Raymon d'avoir bien enregistré ce moment architectural.
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