Je me suis demandé combien d'entre vous se rappelleraient avoir lu un article sur la Bibliothèque François Mitterand dessinée par Dominique Perrault, article publié il y a... dix ans !
Même moi, je fus surpris de cette décennie passée comme ça, l'air de rien, sur un article et donc sur une architecture.
Une décennie ce n'est pas rien, pourtant, si je m'écoute, je n'ai pas le sentiment autant que ça que nous nous éloignons à grand pas de la naissance de cette très belle architecture. Cela démontre bien que c'est compliqué de faire histoire et que la proximité contemporaine que l'on a avec une construction est bien plus profonde qu'on le croit et maintient le bâtiment dans une proximité temporelle étrange comme si la naissance de ce bâtiment restait très proche, très familière.
Les trois cartes postales datent de 1998. Ce qui est bien loin des productions ici, sur ce blog, habituellement présentées. Mais on est déjà en 2023, cela fait donc 25 ans. Ces cartes postales ont déjà 25 ans, c'est fou.
Me dois-je ici faire une analyse de cette architecture ? Me dois-je de dire encore, dix ans après, que j'aime ce lieu, sa pensée, sa poésie ?
Qu'ajouterais-je donc à la masse des esprits critiques ayant exprimé leurs opinions sur ce bâtiment ? Pas grand chose sans doute.
On notera tout de même qu'en 1998, on faisait donc éditer des cartes postales de la Bibliothèque Nationale de France, site François Mitterand. Y en a-t-il encore des cartes postales de cette bibliothèque ? On notera que ces cartes postales sont toutes éditées par la Bibliothèque elle-même et qu'elles se refusent, ces cartes, de vraiment jouer le jeu de la carte postale puisque leur dos n'est pas divisé. Comme s'il fallait pour faire plus chic et moins populaire, graphiquement digne du lieu (et de son rôle) se refuser à imiter et jouer la carte postale traditionnelle...Tout de même, c'est la B.n.F ! On ne peut pas tomber aussi bas ! Déjà on vous propose une carte postale, ne vous plaignez pas...
On mettra de beaux bords blancs pour encadrer ces photographies de photographes. So chic.
On note aussi l'effort éditorial des photographes de ces cartes postales à faire des photographies qui ne soient pas des photographies de cartes postales. On fait d'abord une oeuvre, on propose un regard, on invente un sentiment sur le lieu en ne voulant pas tomber dans le cliché du cliché. Au risque de produire une photographie de photographe, de vouloir absolument faire une représentation distanciée comme si le regard des photographes sur l'oeuvre de Perrault était plus important que l'objet lui-même : on appellera ça le syndrome Lucien Hervé.
Peut-être que la photographie d'Alain Goustard montrant la salle de lecture est la plus objective même si, on sent que l'obturateur, laissé un peu trop longtemps ouvert, a permis de faire fuser les points blancs des luminaires et monter le fond du jardin. On invente une ambiance feutrée, délicate, tendue et même un peu mobile. On peut au moins admirer le design de la décoration intérieur très sobre, très classique, sans extravagance. L'objet c'est le livre et l'étude, pas le lieu.
Les photographies de l'extérieur sont de Marcus Robinson et sont prises de nuit. Ça fait beaucoup de bleu ! Un peu trop ? L'ambiance se veut étrange, entre chien et loup, un mystère du surgissement urbain, un mystère de la forêt bruissante en ville. C'est très beau.
On pourrait dire qu'on ne voit pas l'architecture. On pourrait bien reprocher cela au photographe. On dira que l'architecture de Dominique Perrault au travers des images de Marcus Robinson permet d'exprimer un sentiment d'étrangeté, que, peut-être, dans la construction de son vide intérieur, cela démontre la difficulté de faire de cette architecture hardie une image. Que c'est une expérience plus qu'un lieu. Sans doute.
La carte postale a souvent joué le rôle du retour possible sur l'objet. Elle propose souvent un registre d'une objectivité améliorée, plus idéalisée. Ici, il s'agit d'un travail de fiction, de narration s'appuyant sur une construction et une pensée architecturale. Je ne suis pas certain de comprendre qui y gagne et quelle valeur ajoutée est censée apporter ce genre de vision artistique.
Qu'importe ! Attendons encore dix ans et sans doute qu'alors j'aurai compris !
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