lundi 2 juillet 2018

Le Mans est Open à l'horreur architecturale

Il y a vraiment peu de chefs-d'œuvre architecturaux du Vingtième siècle au Mans et ceux qui auraient pu être soutenus, défendus par les autorités locales sont soit abandonnés à leur sort soit sacrifiés.
La gare routière dite Autogare, petit bijou endormie d'Art Déco pourrit lentement dans une indifférence générale, elle n'a pas la chance d'être dans la muraille. La Sécurité Sociale et son auvent de Jean Prouvé ont été démontés depuis longtemps et l'auvent du génial ingénieur a quitté Le Mans qui n'a pas compris son importance, un marchand a fait le travail de sauvetage. Merci.
La Barre Le Couteur est en cours de reDÉqualification et il ne restera pas grand chose de ses particularités modernistes, son mobilier dessiné par Charlotte Perriand et Jean Prouvé a évité la benne de justesse, sauvé là encore par des particuliers, au courant, eux, de l'existence de ce Patrimoine exceptionnel au Mans. On sait les menaces qui pèsent sur le très beau bâtiment administratif et ses auvents superbes en béton, bâtiment idéalement situé, trop sans doute... pour que sa valeur patrimoniale ne soit maintenue. Il semble que Le Mans ne supporte que ce qui concerne le Vieux Mans, que l'on doit appeler Cité Plantagenêt, pour échapper par la communication à sa réalité. Ah les vieilles pierres et le vrombissement pendant 24 heures des autos, voilà tout ce que nous devrions garder comme image de cette ville qui s'endort dans son enceinte d'ailleurs somptueuse !
Et, voilà que le massacre du Patrimoine Moderne et Contemporain continue dans cette ville avec l'annonce de la défiguration haussmanno-parisiano-proprette de l'un des bâtiments phares du Mans : son central téléphonique, véritable pièce essentielle de la construction moderne dans cette ville qui fait la joie des manceaux par son articulation sur les axes routiers, souvent comparé au Flat Iron par Claude Lothier. La Ville du Mans et ses responsables des permis de construire (qui sont ces gens aveuglés ?) ont donc accordé à Open Partners (l'anglais c'est plus chic et plus sérieux) le permis de défigurer ce bâtiment. Open Partners... moi, rien que ce nom ça me fait marrer, mais pas longtemps quand on voit la réalisation pondue par cette agence. Le collage d'un toit de zinc façon boulevard parisien qui augmente bien entendu la surface et surtout le retour sur investissement est d'un comique architectural représentatif de ce que ce genre d'agences sait faire. En créant ce type de collage, on flatte l'ego conservateur des municipalités et des investisseurs en croyant faire disparaître ce qui serait, bien entendu, l'insupportable modernité de ce beau bloc. Le quartier Courboulay, entièrement nouveau, tourné vers la modernité doit donc passer sous le fil de l'épée du retour en grâce de cette audace moderniste en camouflant partout sa modernité sous les imaginaires creux d'agences d'investisseurs. Pauvres étudiants, venant vivre là, dans le rêve conservateur d'une société faible, d'une municipalité qui semble ne rien comprendre à son Patrimoine Moderne et Contemporain...
Voilà comment se définit sur son site, Open Partners, cherchez le mot architecture : 

La société :
À propos du groupe Open Partners – Investisseur & développeur urbain
Open Partners est une société d’investissement indépendante, structure de tête d’un groupe d’entités spécialisées qui développent, pilotent et accompagnent des projets d’entreprises dans le domaine immobilier ou dans des secteurs où l’immobilier est un facteur stratégique. Soucieux du développement économique du territoire et conscient des enjeux liés aux besoins résidentiels, notamment des jeunes et des seniors, Open Partners s’attache à investir plus particulièrement dans des projets innovants et cherche à apporter une réponse efficace à ces enjeux de société,par une approche ensemblière de talents et d’expériences humaines partagées. Entrepreneur de l’immobilier, Open Partners se positionne à travers son Open Lab comme un « incubateur» spécialisé dans un processus d’innovation ouverte avec ses partenaires.


On voit ce que l'Open Lab peut fabriquer... Trop rigolo.

Je vous laisse juge, sur leur site, de leurs réalisations, au bout de trois, on n'en peut plus, tellement c'est l'invention d'un anonymat urbain, mélange de brun foncé café au lait et de propreté sympa, pour les vieux et pour les jeunes qui sont leur public et surtout... leurs clients. Ne pas leur faire peur sans doute, laissez-les dormir... Chuuuuuttt.....


On peut également, une fois encore, se poser la question des avis et des connaissances en histoire de l'architecture des mairies et de ses personnels chargés de l'urbanisme et du Patrimoine. Comment, sur de telles constructions, peut-on sans interrogation et conseil de professionnels de l'architecture et du Patrimoine laisser passer de tels permis de construire ? Comment la Mairie du Mans travaille-t-elle avec le CAUE et avec la DRAC et sa conservation du Patrimoine ?
Ou pas...
Qu'en pensez-vous Madame Catherine Gouhier ?


Je vous donne une carte postale où l'on ne voit que très peu et très mal le central téléphonique mais, par bonheur, on voit aussi la barre Le Couteur au fond de l'image, ainsi que la Sécurité Sociale et son auvent de Prouvé disparu... Tous trois formaient un ensemble moderne superbe... La carte postale est une édition Jipé, la photographie est de Georget-Dobleau.






































Je vous donne aussi une carte postale du Bâtiment Administratif, annexe de la Préfecture, si remarquable dans sa volumétrie et sa composition, et aussi par le jeu entre le bâtiment et ses auvents en béton absolument merveilleux, très proches de Prouvé également. Il FAUT CONSERVER cela. La carte postale est du même éditeur Jipé et du même photographe.



Nous reviendrons sur cette construction et son avenir malheureusement menacé.
Pour la Barre Le Couteur, vous pourrez retourner ici, nous reviendrons également sur cette construction emblématique du Mans qui est malheureusement, en quelque sorte, aujourd'hui, en train de disparaître :
https://archipostalecarte.blogspot.com/2017/03/charlotte-perriand-au-mans.html
https://archipostcard.blogspot.com/2010/03/le-couteur-encore.html
https://archipostalecarte.blogspot.com/2013/07/hum-hard-french-on-radio-on.html
https://archipostalecarte.blogspot.com/2016/09/le-mans-modeste.html
https://archipostcard.blogspot.com/2010/06/hommage-jean-le-couteur.html 



On notera que, d'après le dessin publié, les ouvertures larges et généreuses semblent réduites...
On notera que l'agence communique sur la proue du bâtiment en inventant une sorte de bulbe sur son toit. Bien entendu, la part essentielle de cette construction passe par ce dessin inscrit dans l'urbain, générant l'événement architectural par la plasticité de cette articulation. Bien entendu, le coiffage de cet événement urbain le nie de fait et en éteint la force architecturale. Une vraie erreur de compréhension des enjeux architecturaux de ce central téléphonique parfaitement inscrit dans son îlot. Sans doute, par contre, s'agit-il d'une vraie stratégie commerciale pour gagner sur ce toit des mètres-carrés.



1 commentaire:

  1. Bonjour, je suis, entre autres choses, photographe et promeneur urbain, amateur d'architecture, tout cela au Mans. Bravo et merci pour votre blog. Si besoin, je peux collaborer... bonne continuation.

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