lundi 8 février 2016

Grosses pierres, altitude et Toute-Prudence

Pour un architecte, pouvoir construire sur l'un des points les plus hauts mais aussi les plus fréquentés, doit être une chance et un honneur.
Je suis persuadé que c'est bien ce que Monsieur Novarina a pensé lorsqu'on lui confia la construction de la chapelle Notre Dame de Toute-Prudence du Col de l'Iseran.
Car, ce petit édifice tout en grosses pierres grises est bien une construction moderne. Pourtant, c'est vrai qu'il affiche une forme un peu éternelle, reconnue, presque modeste qui pourrait nous faire croire à une construction vernaculaire. C'est bien là que réside sans doute sa modernité, presque... post-moderne puisque donnant à voir une complète assignation aux signes de la typologie des petites constructions religieuses de montage et d'Art Sacré.
D'abord la pierre sombre, grise, lourde, taillée en blocs rugueux qui affirment le caractère montagnard et même montagneux de la bâtisse. Puis une forme de plan simple, en croix mais comme coupée en son abside dont le clocher monte soudainement, prenant un élan un rien court, modeste, pour ne pas trop vouloir faire de concurrence à la montagne. Enfin, des contreforts solides et visibles, un ensemble un peu écrasé sur lui-même, n'affichant qu'une seule ambition, vouloir tenir face aux éléments d'un lieu si exposé aux intempéries et donnant l'impression tout autant d'une chapelle que d'un refuge de montagne solide et vigoureux où rien ne pourra vous arriver.
Toute la modernité tiendra dans la disproportion de la statue blanche de la Sainte-Vierge d'Edgar Delvaux posée au-dessus de l'entrée et dont le dessin longiligne semble vouloir se faire une place entre les pierres. Rien d'autre, pas de décoration ostentatoire, pas de démonstration de modernité par des formes en zig-zag ou des machins bizarres, non. Monsieur Novarina prend la mesure de sa chance, bâtit avec rigueur et même modestie, un lieu de culte qui sait qu'il est d'abord un lieu d'accueil où chacun, la porte franchie, trouvera le silence, l'ombre, le creux nécessaire à la joie de son ascension. A-t-il dessiné aussi l'hôtel que l'on voit à l'arrière plan ?
On reconnaît bien là l'architecte, sachant maintenir dans son dessin les spécificités d'une architecture locale tout en jouant, transformant, s'appropriant celle-ci non pas pour dire Je suis architecte mais Nous sommes architecture. Ce qui est rare encore aujourd'hui en architecture. Merci Monsieur.
On notera que les éditeurs nomment bien Maurice Novarina comme architecte mais oublient de préciser Notre Dame-de-Toute-Prudence.

Par ordre d'apparition :
 - éditions JANSOL, collection du Châlet-Hôtel
 - Collection de l'Hôtel Refuge du Col de l'Iseran
 - éditions JANSOL, Italclor
 - éditions Combier




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