Une fois encore, hier, je n'ai pu m'empêcher d'aller regarder les travaux impressionnants du Palais des Consuls de Rouen. Comment dire ?
D'abord, et même si cela semble contradictoire, toujours aimer voir une construction ainsi ouverte, montrant ses organes et son squelette, avoir aussi l'impression que nous pourrions, non pas nous croire au moment de sa réhabilitation mais au moment de sa construction. Il y a toujours un moment du chantier où nous pourrions en effet nous penser dans une machine à remonter le temps, face au Palais des Consuls en train de naître. Mais... la rêverie tombe rapidement et c'est bien à une restructuration totale à laquelle nous assistons, médusés par la cure radicale qui semble en cours.
Soyons rassurés sur la préservation du bâtiment puisque la communication sur le chantier nous indique que ce chantier se fait en concertation avec les Bâtiments de France et que les ferronneries de Raymond Subes et les bas-reliefs de Maurice de Bus seront restaurés et conservés dans le nouveau projet comme si la préservation d'un sens architectural ne dépendait que des décors de cette architecture. Au moins, réjouissons-nous que les architectes des Bâtiment de France soient venus donner leur avis. C'est déjà ça.
On voit donc ce Palais des Consuls réduit à une immense carcasse béante, montrant sa structure et à l'arrière de celui-ci un trou immense est en formation.
La communication du chantier est comme à son habitude pour ce genre de travaux : faussement chic, honteusement enrobée de typos majestueuses et d'images idylliques où, le moins que l'on puisse dire, c'est que l'audace et l'originalité manquent terriblement au profit de représentation de décors qui pourraient convenir à un centre de congrès de province (parfait on y est), un hôtel bon marché à Biarritz. C'est affligeant. Affligeant. On aime que le "design soit contemporain"...
Mais le mot Patrimoine est bien là, inscrit, comme une excuse, une profession de foi. Passons. Finalement c'est à l'image de la politique rouennaise en terme de Culture et de Patrimoine : du faux-semblant.
Faux-semblant de chic, faux-semblant d'attention au Patrimoine, faux-semblant d'une politique culturelle réelle, faux-semblant de design. On a vu ce que cela donne à l'Aître St-Maclou devenu une foire. Pourrions-nous proposer de mettre une sculpture de Gisèle Halimi dans le hall de ce nouveau Palais des Consuls pour être complet et en adéquation avec la politique culturelle et patrimoniale de la ville de Rouen ?
Mon frère Christophe m'apporte alors un numéro de la revue de Rouen entièrement consacré à ce Palais des Consuls, à son histoire, sa construction, sa livraison. La revue propose même un plan en coupe ! Je vous en propose quelques extraits. Le ton est sérieux, heureux aussi du relèvement de Rouen après les désastres des bombardements, un ton un rien notable. Toute une époque.
Dans ma collection, une seule carte postale de ce Palais des Consuls de Rouen. Ce qui est fort étonnant au vu de la popularité et de l'importance de cette construction. Je m'étonne même de n'en avoir jamais vu de l'intérieur. Le bâtiment serait-il en quelque sorte trop sélectif d'un point de vue social pour que la reconnaissance d'image ait lieu ?
La carte postale est une édition Cap qui ne précise pas le nom des architectes mais replace le Palais des Consuls sur les bords de Seine de la Reconstruction de Rouen. Il apparaît presque anonyme ainsi, presque perdu.
Je vous donne enfin quelques photographies du chantier actuel. On y admirera la qualité structurelle du béton armé et sa simplicité relative.
Sur l'une des palissades du chantier, un inconnu a écrit un slogan. J'en aime à la fois sa démagogie lucide, sa clarté analytique et la tendresse de l'intervention. Rien à redire à cette vérité quatre étoiles. J'aurais pu ajouter petit à bourgeois ou... étriqué, ou pire... rouennais.
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