jeudi 1 août 2024

définissons le Patri-washing, Les Olympiades cette fois.

 Construit exactement sur le modèle de Green-washing, le Patri-washing est l'acte de faire croire par quelques interventions ou intentions à un égard patrimonial et social sur des constructions en cours de "réhabilitation" laissant penser que les propriétaires, bailleurs et entreprises auraient été sensibles avant toutes modifications à la valeur patrimoniale et humaine d'un bâtiment, en l'occurence, souvent du logement collectif populaire.
Depuis longtemps maintenant, il existe une méthode qui se veut gentille et qui consiste à prouver à ceux qui vivent-là que l'on est sensibles à leur histoire, à leur lieux avant bien évidemment d'éradiquer ces lieux d'une manière parfois directe (destruction totale) ou indirecte ("remodelage"). On se souvient de Roland Castro qui a fait sa carrière dans ce genre d'attention politique.

Le Patri-washing commence toujours par l'envoie  de sociologues en goguettes, de philosophes (on l'a vu au Mirail avec son université et l'instrumentalisation consciente de Michel Serres), d'écrivains et d'artistes contemporains venant à "la rencontre des habitants" pour en comprendre leurs attentes et leurs modes de vie.
On fait acte de mémoire par la publication d'un livret (Haut du Lièvre par exemple), d'une exposition où, toujours, on recueille la parole des habitants. On est sensibles vous comprenez.
Puis un historien viendra dire qu'il faut faire attention à bien préserver tout cela.

La suite est malheureusement toujours la même : on détruit, on écrase, on dissimule, on fait semblant, on maquille mais avec l'excuse de l'attention portée en amont. Une forme de désolation impuissante qui n'est pourtant rien moins qu'une mécanique de l'éradication.

Le modèle-standard de ce Patri-washing est l'exemple archétypal et ridicule des Tours Nuages de Aillaud à Nanterre. On sait comment l'ANRU fut la boite à outils pendant des années de ces déqualifications épouvantables toutes tenues sous ses égards pour les habitants. On a donc des exemples maintenant évidents de ce travail partout sur notre territoire.

En voici un nouveau.

Je lis ce matin un petit article de Paris-Habitat sur les Olympiades de Paris dont on sait l'importance patrimoniale. Je vous donne donc cet article, cela pourrait nous faire pouffer de rire si ce n'était, une fois de plus, l'application d'une méthode dont on sait malheureusement ce à quoi elle va et veut aboutir :






Vous aussi vous vous marrez ?
Moi je n'en peux plus de rire.
Tout le monde y l'est beau, tout le monde y l'est gentil. Ah...cette sensiblerie communicationnelle et ses complices si gentils, si prompts à recevoir la parole des habitants. Ils viennent de loin les anthropologues ? De quel exotisme social et géographique viennent-ils et vers quel exotisme croient-ils aller ?

On notera que Monsieur Stéphane Juguet ne vient pas "habiter un logement" non non...il investit un logement vide avec son équipe pour observer comment on vit. Non mais ? C'est une blague ? C'est quoi cette position de regardeur ? Et toute l'équipe, en surplomb, est dans "leur tour d'observation"...réduisant ainsi l'acte anthropologique à une caméra de surveillance du bien vivre ?
On observe, je cite sans rire : les us et coutumes...
Toute la boite à outils de la communication est en place. Et ils ont faits des études supérieures, ils ont surement lu Levi-Strauss, Descola, Bourdieu et Guy Debord. Sont tellement sensibles, tellement à l'écoute des vrais gens depuis leur hauteur sociale et architecturale... Un peu honte ? Non...même pas. Il y a un contrat. Faudra rendre des comptes, faire un bilan autour d'un café équitable. On vit de ce qu'on peut. On veut être utiles à la société.
Et puis le bailleur fera...exactement ce qu'il veut avec toute la certitude d'avoir donné aux gens qui vivent là la parole filtrée par des gens qui n'y vivent pas et qui repartiront vers une autre aventure anthropologique. C'est un errant permanent l'anthropologue, un citoyen du Monde vous comprenez.
Des anthropologues qui font, je cite encore sans rire : des entretiens flash...La profondeur, je vous dis.

On notera aucune présence d'agents patrimoniaux, de critiques et historiens de l'architecture dans cette Great Team de la sensiblerie communicationnelle.

C'est ça le Patri-washing. C'est cette méthode.

Pour revoir les Olympiades avec des vrais gens dedans :

Sur Michel Serres et son rôle :

Et pour se rappeler l'histoire de l'observation amusée des zoos urbains :

Pour voir comment on a déjà fait ça avec le Haut du Lièvre avant...sa destruction :

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