J'ai hésité longtemps à publier cette carte postale des éditions Gaby. J'ai hésité car je me demandais bien ce qu'une vue de plus ou de moins de Royan pourrait bien vous apporter. N'ai-je-pas, en quelque sorte, fait le tour de la question de la représentation de cette ville par ce moyen populaire ?
Pourtant je l'ai achetée cette carte parce que son point de vue est peu usité. Laissant le marché sur la droite, presque inutile signe de la modernité, le photographe cadre l'esplanade et l'enfoncement du point de vue vers l'horizon d'un Royan tout neuf mais peu représenté.
La carte postale nous indique deux choses. La première c'est l'architecte dont seul le nom de Ursault apparait comme s'il en était le seul. L'autre c'est le nom de la rue Pierre Loti. Voilà qui est précis. Avant même de passer cette carte postale sous les feux du scanner, je regarde les détails au compte-fil comme à mon habitude. Mon œil fouille d'abord les affiches pour, bien entendu, en comprendre leurs informations mais aussi toujours à l'affut d'une date permettant de replacer peu ou prou l'image dans l'Histoire. Ici, beaucoup d'affiches sur les courses de chevaux ou l'équitation, rien de très intéressant pour moi. Ouf ! Une affiche du salon nautique nous donne juillet et août 1962.
Nous voilà à peu près situés dans le temps. Mais alors que je quitte les affiches je tombe sur ce détail :
Ce petit groupe nous regarde et même ce monsieur nous fait signe. Cela me touche incroyablement ce signe, comme si la Ville, ma Ville me faisait depuis ce temps un signe particulier, à moi seul réservé, car, qui d'autre aujourd'hui, loupe en main, a ainsi la chance d'une rencontre avec une personne qui le salue depuis ce lieu, depuis ce temps ?
Comment ne pas être touché par cette urbanité qui a traversé le temps et vient me pointer le cœur ? Je regarde ce monsieur, le sourire du garçon à côté de lui qui s'amuse de l'espièglerie de son père ou de son oncle. J'imagine alors leur conscience d'être ensemble enregistrés à jamais sur une image. Ont-ils gardé cette certitude cinq minutes, cinq ans, le petit garçon s'en souvient-il encore ? A-t-il, un jour compris qu'il figurait ainsi sur cette carte postale ?
Je me pose aussi la question de la visibilité du photographe depuis le point de vue du groupe. Car ils sont bien loin les uns des autres. Une chambre photographique, de par sa grandeur, pourrait-elle expliquer sa lisibilité comme outil photographique ?
Mais je le sais, il y a fort à parier que le monsieur est maintenant mort, disparu. Il tenait fièrement une bouteille de vin. Je suis certain qu'il a acheté des nougats et que, l'après-midi trop chaude, il a emmené, main dans la main le garçonnet à la plage. Chemise à manche courte, cravate mal choisie, il a regardé ce dernier sauter dans les vagues, crier, revenir couvert de sable. Il a dégusté un à un les nougats, n'en laissant que quelques-uns pour le garçon. Le sel sur la bouche donnera alors à la dégustation une drôle de sensation, un souvenir impérissable.
Tout coule. Le sable aussi.
Et la photographie m'autorise à fermer le poing sur ce moment retenu.
C'est mon œil qui l'a construit ce moment et aussi la lumière palpitante sur l'argent d'une photographie véritable.
Royan ?!
Attends-moi. Attends-moi. Attends-moi.
Pourtant je l'ai achetée cette carte parce que son point de vue est peu usité. Laissant le marché sur la droite, presque inutile signe de la modernité, le photographe cadre l'esplanade et l'enfoncement du point de vue vers l'horizon d'un Royan tout neuf mais peu représenté.
La carte postale nous indique deux choses. La première c'est l'architecte dont seul le nom de Ursault apparait comme s'il en était le seul. L'autre c'est le nom de la rue Pierre Loti. Voilà qui est précis. Avant même de passer cette carte postale sous les feux du scanner, je regarde les détails au compte-fil comme à mon habitude. Mon œil fouille d'abord les affiches pour, bien entendu, en comprendre leurs informations mais aussi toujours à l'affut d'une date permettant de replacer peu ou prou l'image dans l'Histoire. Ici, beaucoup d'affiches sur les courses de chevaux ou l'équitation, rien de très intéressant pour moi. Ouf ! Une affiche du salon nautique nous donne juillet et août 1962.
Nous voilà à peu près situés dans le temps. Mais alors que je quitte les affiches je tombe sur ce détail :
Ce petit groupe nous regarde et même ce monsieur nous fait signe. Cela me touche incroyablement ce signe, comme si la Ville, ma Ville me faisait depuis ce temps un signe particulier, à moi seul réservé, car, qui d'autre aujourd'hui, loupe en main, a ainsi la chance d'une rencontre avec une personne qui le salue depuis ce lieu, depuis ce temps ?
Comment ne pas être touché par cette urbanité qui a traversé le temps et vient me pointer le cœur ? Je regarde ce monsieur, le sourire du garçon à côté de lui qui s'amuse de l'espièglerie de son père ou de son oncle. J'imagine alors leur conscience d'être ensemble enregistrés à jamais sur une image. Ont-ils gardé cette certitude cinq minutes, cinq ans, le petit garçon s'en souvient-il encore ? A-t-il, un jour compris qu'il figurait ainsi sur cette carte postale ?
Je me pose aussi la question de la visibilité du photographe depuis le point de vue du groupe. Car ils sont bien loin les uns des autres. Une chambre photographique, de par sa grandeur, pourrait-elle expliquer sa lisibilité comme outil photographique ?
Mais je le sais, il y a fort à parier que le monsieur est maintenant mort, disparu. Il tenait fièrement une bouteille de vin. Je suis certain qu'il a acheté des nougats et que, l'après-midi trop chaude, il a emmené, main dans la main le garçonnet à la plage. Chemise à manche courte, cravate mal choisie, il a regardé ce dernier sauter dans les vagues, crier, revenir couvert de sable. Il a dégusté un à un les nougats, n'en laissant que quelques-uns pour le garçon. Le sel sur la bouche donnera alors à la dégustation une drôle de sensation, un souvenir impérissable.
Tout coule. Le sable aussi.
Et la photographie m'autorise à fermer le poing sur ce moment retenu.
C'est mon œil qui l'a construit ce moment et aussi la lumière palpitante sur l'argent d'une photographie véritable.
Royan ?!
Attends-moi. Attends-moi. Attends-moi.
TOUJOURS LE REGARD AFFUTE...Merci beaucoup
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