mardi 18 août 2020

Aître ou ne plus être avec beaucoup de mépris

C'est comme ancien étudiant d'une école que j'ai beaucoup aimée que je me fais le relais de cette lettre ouverte adressée à Monsieur Mayer-Rossignol, lettre que j'ai bien entendu signée.
L'Aître Saint-Maclou de Rouen est un lieu exceptionnel, cela ne fait aucun doute pour personne.
Lorsque en 1988 je suis entré dans ce lieu qui était alors encore l'école des Beaux-Arts de Rouen, il était déjà question de sa restauration et chaque année, nous regardions notre magnifique école pourrir doucement, sans aucune intervention des élus d'alors. En étions-nous, nous étudiants, responsables ?
Les étudiants pris dans un espace aussi fort culturellement et historiquement ont toujours fait attention à ce lieu tout en l'animant de leur jeunesse, certes parfois iconoclaste, mais toujours attentive et même souvent fière de cet ossuaire devenue leur École des Beaux-Arts.
Alors, quand une revue* qui doit aux institutions qu'elle représente une certaine retenue se permet, sans aucune raison, d'attaquer l'héritage de cette présence (de 1940 à 2014 !) c'est la honte qui m'envahit. Nul doute que Messieurs Gossent et Randon les rédacteurs ont dû rencontrer des dizaines d'anciens élèves et enseignants pour produire le contenu éditorial de ce magazine.
 
Pour satisfaire qui ? Quel donneur d'ordre politique ?

Pour ma part, lorsque je parle de cette école, j'évoque ma chance. Ma chance d'y avoir vécu avec mes camarades un moment de vie important, d'y avoir rencontré certains enseignants qui m'ont offert mon autonomie. Toute cette histoire est ainsi perdue et oubliée par ces messieurs. Ils n'ont pas eu la chance de profiter de la vie culturelle de ce lieu. Les conférences, les colloques ? Sont-ils venus y assister ? Les expositions ? Les ont-ils visitées ? Il faut croire que non. Tant pis pour eux...
Il est grand temps que la Métropole de Rouen rende hommage à cette histoire au lieu de l'accuser, de la moquer, de l'ignorer ainsi. 74 ans d'histoire rayés d'un trait de plume mal informé...
Car si nous pouvons tous nous réjouir de la superbe restauration de l'Aître, doit-on pour ce faire trouver un coupable à son tardif intérêt ? Alors, cherchons-le, le coupable. Qui était en charge de ce bâtiment et de son état entre 1940 et 2014 ? La Ville de Rouen ? La Région ? Les Institutions Patrimoniales (DRAC etc...), la Métropole... ou les... étudiants, les enseignants, les agents techniques et administratifs de cette école ?

Monsieur Mayer-Rossignol puisque Monsieur Robert est parti sur ce geste de mépris.... peut-être pourriez-vous, vous, nous donner votre avis sur le contenu éditorial d'un magazine qui représentera votre futur politique et qui se doit, au minimum, au respect d'une histoire commune.

Voici ce courrier, n'hésitez pas à le diffuser, à le signer et l'envoyez ici :
mag@metropole-rouen-normandie.fr
 

Lettre ouverte à Monsieur Nicolas Mayer-Rossignol
Président de la Métropole Rouen Normandie

Monsieur Michaël Gossent, rédacteur en chef de le Mag Métropole Rouen Normandie et Monsieur Dominique Randon, directeur de la publication ont pris une énorme responsabilité.

Le numéro 54-Juillet-Août 2020 de cette revue consacrée en grande partie à l’Aitre Saint Maclou laisse tristes et surtout en colère toutes les personnalités qui ont participé à l’histoire de l’École des Beaux-Arts de Rouen depuis 1940.

Les sous-entendus et même les affirmations sur les conséquences de la présence de cette école sur l’état du bâtiment et sa nécessaire renaissance (sic !) sont insupportables et surtout totalement faux eu égard à ce qui s’est passé dans ce lieu sous l’impulsion des directeurs successifs, des équipes pédagogiques et techniques et bien entendu des étudiant-e-s qui ont animé et valorisé cet espace.

Comment peut-on écrire dans un magazine culturel et institutionnel page 9 :

«En 1940, l’école des Beaux-Arts récupère ces locaux de la Ville après l’incendie de la Halle aux Toiles. L’école quitte les lieux en 2014, laissant l’Aître dans un piètre état.»,

mais aussi page 5 : « Puis, il était devenu au XXe siècle un lieu enfermé et isolé. »,

et « l’espace redevient pour certains un petit havre de paix au milieu de la ville. Mais aussi le théâtre d’évènements culturels. Des spectacles, des concerts, des lectures… »

Comment peut-on laisser croire aussi que ce serait l’école (agents municipaux, personnels administratifs, enseignant-e-s, étudiant-e-s) qui seraient responsables de l'état de ce bâtiment ?

Avaient-ils en charge sa restauration ?

Bien au contraire, pendant toutes les années de cette occupation, aucun accident n’a été à déplorer alors même que la fréquentation y était dense. L’école étant habitée par les personnels, les visiteurs, les étudiant-e-s, les enfants et les adultes des cours du soir, et cela avec des ateliers techniques dont la maitrise des sécurités y fut contrôlée et maintenue grâce à une grande vigilance et une attention de tous à ce patrimoine. 

Comment peut-on à l’occasion de la sortie d’un tel magazine ne pas raconter l’importance pédagogique et l’écho culturel d’un tel lieu ? A-t-on oublié les nombreuses expositions qui y furent montrées et construites ? A-t-on oublié les interventions, les colloques et les conférences d’artistes organisés dans cette école? A-t-on oublié les centaines d’étudiant-e-s y ayant obtenu leur diplôme national ?

Quand la Métropole rendra-t-elle hommage à ce travail, aux artistes qui y ont enseigné, à ceux qui sont maintenant disparus ? Quand la Métropole décidera-t-elle de regarder aussi ce que sont devenus les étudiant-e-s venus ici dans ce quartier qu’ils ont aussi largement contribué à vivifier et dont nombre d'entre eux sont professionnellement inscrits dans la vie culturelle de l'agglomération ?

Nous sommes nombreux à avoir dans cet espace des souvenirs d’une émancipation culturelle forte qui font que, des années après, nous sommes encore attachés à ce temps, à ce lieu.

Réduire ainsi l’histoire de l’École des Beaux-Arts à un oubli méprisant en lui faisant porter des responsabilités patrimoniales qui ne furent pas les siennes est particulièrement déplacé et grave.

Vive l’avenir de l’Aître Saint-Maclou avec ceux qui y ont vécu, étudié, enseigné et surtout Monsieur Mayer-Rossignol, avec ceux qui ont aimé et continueront à aimer ce lieu.
 
Signataires :
Patricia Duflo, professeure à l’ESADHaR et à l’ENSA Normandie
David Liaudet, ancien élève de Jacques Ramondot
Anne Devillepoix, galeriste
Kacha Legrand, artiste plasticienne, enseignante ENSA Normandie
Jakob Gautel, artiste plasticien, enseignant à l'ENSAP La Villette
Laurie Lefebvre
Myriam Chaïeb Nairi, artiste
Fabien Persil, restaurateur de livres
Philippe Martin, artiste et professeur à l’ERBA
Guy Chaplain, professeur de dessin
Guy Lemonnier, artiste et professeur à l’ESADHaR
Eric Boucourt, ancien élève et membre du personnel technique du Guggenheim- NY
Dominique Le Gac, professeure de céramique
Jean-Claude Carpentier, technicien multi-media à l’ESADHaR
Julien Kuhn, styliste
Elisabeth Vaissaire, professeure d’Arts Plastiques
Sylvie Tocque
Virginia Mastrogiannaki, artiste
Vincent Victor Jouffe, artiste
Marc Hamandjian, sculpteur
Narek Voskanian ancien élève de l’école, artiste, réalisateur, photographe
Miguel-Angel Molina, artiste et professeur à l’ESADHaR
Marie Arrateig
Dominique Constantin Weyer, professeure d’arts plastiques
Mathieu Andrei, musicien
Thibault Le Forestier, administrateur de la Fraap, enseignant
Charlotte Baudet
Gérard Diaz, artiste, professeur à l’ERBA
Jean Rault, artiste et professeur à l’ERBA pendant une vingtaine d’année
Jean-Christophe Bailly, écrivain
Benjamin Frizon de Lamotte, Développeur pour la DGD à la recherche, à l'expertise, à la valorisation et à l'enseignement
Sébastien Blanchot, ancien élève
Jeremy André, animateur spécialisé à l’école TUMO, forum des images, Paris
Julien Binet, plasticien musicien
Jason Karaïndros, artiste et professeur à l’ESADHaR
Maxime Verdier, artiste
Victoria Selva,  artiste plasticienne
Sophie Roger,  artiste, professeure d’art Lycée Jean Prévost Montivilliers
Julie Lesage, directrice artistique
Maxime Fauvel, enseignant Arts Plastiques
Karl Thiriot, style maker
Sophie Grassard, plasticienne
Jean-Philippe Paumier, artiste (élève de 1998 à 2003)
Bernard Lallemand, artiste et professeur à l’ERBA
Philippe Janssen
Bérénice Duflo, professeure de lettres
Fanny Brianchon, professeure d’Arts Plastiques
Alice Delarue, peintre, accessoiriste
Martine Leclercq, professeur d’Arts Plastiques, Montréal Québec
Jean-François Raymond, peintre et enseignant
Emmanuelle Owen
Pascale Landais
François Audemar, peintre
Cécile Tombarello, élève à l’ERBA de 2001 à 2006- Responsable de Communication
Léo Martin
Marie-ange-le-rochais,   Auteure, peintre, illustratrice
Gilles Respriget, artiste
Magali Decaen
Florence Chevallier, professeure et artiste
Sophie Mari
Marielle Manteau, responsable Tiers-Lieu Numérique à l'Atelier 17 CCPOH Communauté de Communes des Pays d'Oise et d'Halatte
Stéphane Pichard, artiste
Julien Brunet, artiste plasticien diplômé 1998-2003 ERBA
Elodie Boutry, artiste
Olivier Nottellet, je suis artiste et professeur à l'ENSBA de Lyon
Dominique Debeir, artiste et professeure à l’ESADHaR
Lucile Encrevé, professeure d'histoire de l'art à l'Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs, ancienne enseignante à l'ERBA de Rouen
Eric Helluin, professeur à l’ESADHaR
Julie Faitot
Marie-Christine Leclercq
Martine Bavent
Catherine Bernard, artiste plasticienne
Tsuneko Tanuichi, artiste
Philippe Bergoin, musicien
Sébastien Pugna
Béatrice Cussol, artiste et professeure à l’ESADHaR
Claude Lothier, artiste professeur à l’Ecole des Beaux-Arts du Mans
Martine Goupil, artiste
Erwan Venn, artiste
Nicolas Moulin, artiste
Antonio Gallego, artiste, maitre de conférence à l’Ecole Nationale Supérieure  d’Architecture de Strasbourg
Stéphane Carrayrou, professeur d’histoire de l’art à l’ESADHaR
Paatrice Marchand, artiste
Robin Parcelier, artiste
Arnaud Caquelard, artiste
Edwige Brocard
Alexandrine Bonicki
Baptiste Gateau
Philippe Ripoll, écrivain
Claude Delafosse, dessinateur
Sabine Krawczyk, graveur
Lise Lecoq
Jean-Marie Dallet, artiste, professeur des Universités Paris Sorbnne
Xiaogang Huang, artiste, professeur de langue
Lison De Ridder, artiste, dessinatrice




3 commentaires:

  1. j'ai connu ce lieu en un temps où il y était donné de multiples formations et apprentissages, lieu d'excellence et de rigueur, de confrontation à la matière, de réponse à l'exigence. Y être était être formé et non formaté. Y être était acquérir la liberté par la maîtrise du savoir faire .... Ce lieu était devenu une devanture de foire, un coquillage vide dont il est difficile de se plaindre qu'il soit occupé par une autre sorte de vide qui semble être une continuité plus qu'une trahison.

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  2. j'ai connu ce lieu en un temps où il y était donné de multiples formations et apprentissages, lieu d'excellence et de rigueur, de confrontation à la matière, de réponse à l'exigence. Y être était être formé et non formaté. Y être était acquérir la liberté par la maîtrise du savoir faire .... Ce lieu était devenu une devanture de foire, un coquillage vide dont il est difficile de se plaindre qu'il soit occupé par une autre sorte de vide qui semble être une continuité plus qu'une trahison.

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  3. j'ai connu ce lieu en un temps où il y était donné de multiples formations et apprentissages, lieu d'excellence et de rigueur, de confrontation à la matière, de réponse à l'exigence. Y être était être formé et non formaté. Y être était acquérir la liberté par la maîtrise du savoir faire .... Ce lieu était devenu une devanture de foire, un coquillage vide dont il est difficile de se plaindre qu'il soit occupé par une autre sorte de vide qui semble être une continuité plus qu'une trahison.

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