vendredi 14 août 2020

Ça se Corse

 


Oh, je sais que l'on pourrait bien passer notre tour, ne finalement pas trop s'attarder sur ce type de constructions que nous aurions vite fait de classer dans un dossier brutalisme de promoteur ou bétonnage de style.
Certes, c'est vrai que moi aussi, je n'ai d'abord pas cru nécessaire de vous montrer cet Hôtel des Calanques à Ajaccio, sur le bord de la Route des Sanguinaires. J'ai mis longtemps même à m'apercevoir que j'avais deux vues différentes de cet Hôtel dans ma collection mal rangée. Mais quoi ? N'est-ce pas la vocation de ce blog de nous obliger à regarder aussi ce type de constructions peu ambitieuses, seulement désireuses d'être dans son temps, jouant des codes de ce qui est contemporain à son époque pour croire qu'elles font œuvre... N'est-ce pas là aussi la suite amusante de la réception des idées et des styles internationaux que de finir  dans quelques signes architectoniques sans prendre l'ampleur des vrais mouvements, des vrais radicalités ?
Et est-ce si grave de les aimer aussi pour ça, pour l'usure en quelque sorte des aspérités modernes ? Car, tout de même, par deux fois, dans les milliers de cartes que j'ai regardées, j'ai sélectionné cet Hôtel. Ce qui avait dû me plaire pourrait bien vous plaire aussi. D'abord la masse contre le paysage, l'Hôtel oppose son volume, s'impose, dur et minéral comme s'il croyait faire partie par sa couleur et son ampleur de la roche de la côte. J'ai toujours aimé les architectures qui poussent du coude le paysage et qui, dans leur boursouflure, tentent de l'inventer de nouveau. C'est bien le cas ici. Bien entendu, toute la réalité de cette construction sera d'offrir la plus large ouverture maritime, le plus grand dégagement sur la mer. Ce n'est pas tant une architecture qui doit être regardée mais bien plus sûrement une architecture pour offrir la vue sur l'horizon maritime.
Le caractère de cet Hôtel tiendra donc tout entier dans sa masse définie, étirée, affirmée par les coursives sculpturales dans un dessin raide et imposant, coursives un rien lourdes, un rien épaisses qui offriront l'impression générale du bâtiment et de l'ombre aux habitants. Mais qui a dessiné ce morceau ? Je ne sais pas. On notera le traitement du rez-de-chaussée en grosses pierres agissant comme un socle, un contre-fort donnant à l'ensemble une sensation de solidité ou aussi, certainement, comme une citation obligée à la roche environnante. Il faut bien dire la nature quelque part. Edmond Lay était-il venu en Corse ? À moins que l'architecte de cet hôtel n'ait même rêvé d'un peu loin à Franck Lloyd Wright...
Je sens que vous me trouvez un peu dur, un peu aride alors que non, vraiment, j'ai de la tendresse pour cette belle tentative presque brutaliste en Corse. Et comme la vue doit être belle ! Je n'ai aucun mal à m'imaginer posant mes coudes sur le parapet, à regarder la mer, et, là-bas, sur un autre balcon, au même étage que moi, un autre homme fait de même. La peau du bras prendra alors l'empreinte de ce béton corse tout comme le sable sur la plage prend l'empreinte de mes pas. Il fait beau. Arrêtons donc de parler d'architecture. Il y a mieux à faire le long de la Route des Sanguinaires.
Informations pratiques : la première carte postale est une édition Ape Genova datée par le correspondant de 1983. Aucun photographe nommé, aucun architecte nommé. La seconde carte postale est une édition Papecor avec un cliché provenant de l'Atelier de Photographie d'Ajaccio. Cette carte nous donne les informations suivantes : 230 chambres avec salle de bain et douche privée, toutes avec loggia, vue sur mer et mini-bar. Cela doit suffire à notre bonheur. Pourquoi nous donnerait-on le nom de l'architecte Mais si vous l'avez...
dernière minute, dernière minute, dernière minute :
Daniel Leclercq nous trouve l'architecte qui serait Jean-Rémi Eyssautier en 1975. Merci.

 

4 commentaires:

  1. il existe d'autres cartes postales de cet hôtel...mais évidemment dans le nom de l'architecte...nous avons interpellé l'hôtel le CAUE et l'ABF...LES REPONSES TARDENT

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  2. Selon l'ABF de CORSE, l'architecte est Jean Remi EYSSAUTIER EN 1975

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