jeudi 27 août 2020

Paul Vimond caché derrière une Tournesol

 

Voilà qui est amusant et qui prouve qu'il faut travailler et pas se contenter des icônes. Sur une carte multi-vues, bien entendu, je suis attiré immédiatement par celle qui me montre une piscine Tournesol, ne faisant que peu de cas de ce qui se trouve autour. Le fruit cache le feuillage. Il ne faudrait pas non plus regretter trop vite de découvrir une nouvelle piscine Tournesol à ajouter à sa collection et se dire qu'avec un peu de chance, nous finirons par trouver une carte la montrant toute seule. Mais l'esprit curieux va regarder autour et le mot Z.U.P au verso va me pousser à en savoir plus sur cet espace de Cherbourg Octeville, d'ailleurs nommé par l'éditeur Le Goubey Communauté Urbaine de Cherbourg, ce qui est déjà une manière de raconter l'urbanisme d'Octeville.

En quelques recherches rapides, il est aisé alors de trouver un nom d'architecte (manquant sur la carte) : Paul Vimond. Le voilà donc le responsable de cette Z.U.P d'Octeville. Élève de Perret, Grand Prix de Rome en 1949, il pourrait être en quelque sorte le pur produit de la formation des architectes des Trente Glorieuses appliquant alors les leçons du chemin de grue, le style Hard French, la rationalité affirmée que l'on condamne aujourd'hui souvent à tort.

 

Alors je cherche dans mon classeur Hard French et je me retrouve devant cette carte postale affichant avec fierté l'acronyme Z.U.P sur son recto, preuve à l'époque que tout le monde reconnaissait cette dénomination et qu'elle ne posait pas de problème. Le Quartier des Provinces d'Octeville est donc décliné en 6 petites vues permettant d'en voir son ciel bleu et ses roses rouges. Bien entendu, il s'agit aussi d'en vanter les modernités. La carte Emy par Le Goubey ne donne pas le nom de l'architecte et urbaniste Paul Vimond. Nous n'aurons pas grand-chose à dire sur cette architecture. Il y a là bien quelque chose d'archétypal qui, du moins, depuis ces images, ne donne rien d'autre que l'attendu du genre. Sans doute que Paul Vimond mériterait mieux de ma part. Et de la vôtre ?

Voilà aussi que dans la revue L'Ardoise (merci L'agence Lestrade*)  consacrée à l'Art Sacré, je trouve une double page sur l'église Saint-Pierre-et-Saint-Paul d'Octeville qui est bien l'œuvre de Paul Vimond et de Burckart. On sait même que c'est l'entreprise Breton qui réalisa le chantier de couverture et au vu de la forme de cette église, on comprendra la fierté de l'entreprise à avoir posé des ardoises sur cette tente réifiée pour l'église. On y reconnaît bien là aussi un certain style des trente Glorieuses, aux volumes très marqués, presque baroques, voulant ménager à la fois l'image de l'église comme un toit et le désir de faire moderne au milieu de cette Z.U.P. Cela produit un machin moderne d'une grande beauté plastique que l'on dirait construit pour la photographie et la jubilation de l'abstraction. Aujourd'hui on dirait un geste fort posé sur le tapis urbain (un truc comme ça...)



 

Mais me manquent des cartes postales de cette église. Voilà bien une déception ! Comment est-ce possible ? Il me faudra rapidement combler ce vide et sans doute aussi aller visiter celle-ci dans ce Cherbourg si loin et pourtant si normand. Que voulez-vous, l'exotisme n'est pas toujours là où on le cherche. Mais maintenant je dois choisir dans quel classeur ranger la première carte postale. Celui du Hard French, celui des Piscines Tournesol, celui des architectes ?

* Merci Walid Riplet


dernière minute ! dernière minute ! dernière minute !

Voilà que m'arrive, gentiment envoyée par notre ami Daniel Leclercq la carte postale manquante à cet article ! Merci Daniel de nous fournir de la came de cette qualité. Alors, regardons. Nous avons bien notre église que l'éditeur Éditions Normandes Le Goubey qualifie de moderne et il n'oublie pas non plus de nous informer de l'architecte Vimond bien noté au verso de la carte. Figure aussi l'annotation d'un mariage qui y a eu lieu le 30 août 1975 ! Voilà qui est touchant.  La carte postale en couleur met bien en avant les qualités plastiques de l'ensemble et le jeu incroyable des triangles et des pointes qui la composent. On note la présence de matériaux traditionnels comme l'ardoise bien entendu mais aussi le bois sur ce beau socle de béton très clair, presque blanc. Voilà donc un bel objet éditorial que nous garderons d'autant plus précieusement qu'il arrive de notre ami Daniel !












En 2019, la piscine Tournesol était toujours en place à Octeville :




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