lundi 13 juin 2016

Dirty Harry is a brutalist cop

Une belle carte postale de nuit nous montre un monstre brutaliste superbement éclairé (et donc dessiné) par son intérieur :



Cette fusée que n'aurait pas renié Owen Luder est (comme son blason l'indique) un Holiday Inn, un hôtel ici situé à San Francisco. Depuis ce point de vue, l'hôtel semble isolé, posé d'un coup au milieu du tapis de la ville beaucoup plus basse. Le brutalisme est surtout affiché et déterminé par le profil de l'hôtel avec le dessin en pente de son socle et la fermeture de ses pignons laissés bruts de décoffrage et donnant à voir une massivité puissante.







Seul sur le toit, le petit carré bleu de la piscine éclairée comme il se doit depuis le bassin lui-même, apporte une touche céleste donnant à rêver à des bains joyeux "on the top of the world".
On trouve rapidement le nom des architectes de ce beau, très beau bâtiment brutaliste américain : John Carl Warnecke et associés, Clement Chen et associés. Il faut croire Wikipédia...
John Carl Warnecke est bien référencé car il eut son moment de gloire avec le Mémorial pour Kennedy à Hawaï. On trouve quelques entrées dans l'Architecture d'Aujourdhui dont l'écriture n'est pas toujours aussi brutaliste. Nous aurons donc sans doute l'occasion d'en reparler. Je vous propose de voir une autre de ses réalisations que j'ai trouvée dans l'excellent ouvrage Architecture Hôtellière et de Loisirs publié par le Moniteur en 1978. On y trouve un Domaine dont le style fait bien plus penser à Frank Lloyd Wright et donc pour nous à Edmond Lay... Quelque chose de la ferme des bois américaine modernisée. On aime.









Mais...
Mais si vous êtes cinéphile, amateur de Justice rendue au nom des armes de gros calibre, amateur d'une raideur morale à toute épreuve, vous aurez peut-être reconnu cet hôtel Holiday Inn de San Francisco car il apparaît comme décor dans le film Dirty Harry avec Clint Eastwood.
Il est toujours intéressant de retrouver une architecture dans un film, de voir comment les réalisateurs fabriquent des points de vue, comment ils se servent de ces propositions comme décor et image du film.
Notre hôtel est le premier décor. Une femme se baigne seule dans la piscine sur le toit comme si elle était non pas dans un hôtel mais dans un penthouse. Elle est tuée par balle depuis un autre immeuble que l'inspecteur Harry identifie tout de suite comme le point de vue du tireur. On ne s'attardera pas plus sur l'hôtel. Une scène d'un toit à l'autre en quelque sorte, comme si l'assassinat était induit par le vide entre les toits, comme si le tueur pouvait y trouver une sécurité pour son forfait, la certitude d'être tranquille. On peut tout de même s'amuser que le toit du tueur soit encombré, sale, fumant, absolument pas fait pour une visite ou un point de vue mais seulement le lieu de l'abandon des objets techniques comme les ventilateurs et les gaines en tous genres alors que celui de la victime est un toit du plaisir, de la volupté, et même du privilège de pouvoir depuis le haut d'un hôtel de luxe vivre pleinement la joie des corps. Et Pan !
De l'un à l'autre le tracé sans faille d'une balle de plomb.
L'inspecteur Harry tuera le vilain, mais ça vous le savez déjà.

 



 





 

2 commentaires:

  1. ce Holiday Inn est maintenant un Hilton et à chaque fois que je me rends à Chinatown, je ne manque pas d'admirer cette beauté brutaliste !

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    1. Des photos ! Des photos !
      Heureux de voir que mes lecteurs ont de beaux points d'attache !

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