Il fait bien frais ce matin à Oissel. Un seul stand me propose des cartes postales modernes perdues au milieu de plusieurs classeurs de cartes anciennes. La conversation s'engage avec un monsieur qui cherche des cassettes audio et qui veut savoir "si ça vaut le coup d'apporter des cartes postales sur un vide-grenier". Le vendeur-collectionneur et moi-même lui répondons que oui ! On s'amuse alors de mes recherches, les deux messieurs ont l'air intrigué de me voir ramasser les cartes postales qui suivent. Je tente une explication rapide. "Faut de tout pour faire un monde" me rétorque alors mon vendeur. Un euro plus tard, je glisse mes cartes dans ma poche. Oh...rien de bien rare mais, par contre, d'assez typique d'une certaine production architecturale et éditoriale qui d'ailleurs par son esthétique laisse croire à mon vendeur qu'il s'agit de la banlieue parisienne. Cette reconnaissance d'une certaine typologie m'intéresse et elle est la preuve d'un certain partage culturel entre la France des années 50 et 60 et la même période en Pologne, puisque ces cartes postales viennent bien de ce pays. Il y a donc chez tout le monde des images-types qui font vibrer un commun des images et de l'architecture. Il faut être assez clair d'ailleurs sur le fait que ces modèles architecturaux et les conceptions qui s'y rattachent furent bien diffuser dans l'Europe entière et ailleurs également. En ce sens, le chemin de grue et la préfabrication lourde (système Camus par exemple) furent bien une orientation générale au lendemain de la seconde guerre mondiale. Il n'y a donc rien d'étonnant qu'on s'y retrouve, qu'on s'y perde, qu'on aime se faire avoir sur la localisation de ces typologies (pour parler comme un artiste contemporain ).
Il fut une époque aussi où on trouvait régulièrement et assez facilement sur les vides-greniers des cartes postales du bloc de l'Est. Il était aisé, il y a dix ou quinze ans de faire une collection de ce genre de cartes. Sans doute qu'il y avait eu des agences de voyages, des échanges, des séjours organisés qui voulaient montrer l'essor des pays de l'Est en en montrant les qualités de sa Modernité. On a du mal à croire que aujourd'hui la Pologne se laisserait ainsi représentée...
Mais qu'importe ! Régalons-nous de ces beaux blocs, de ces belles façades géométriques, de ce Plattenbau soviétique si cher à mon ami Nicolas Moulin ! Il me faudra finalement faire un classeur pour les ranger toutes ces cartes postales qui sont, pour l'instant, dans une boite Ikea, agissant comme un retour amusant de l'Histoire.
On commence avec cette magnifique carte postale de Poznan dont la photographie est de Jablonskie. La vie semble radieuse...Et comment ne pas remercier la chance de vivre une époque où, en deux cliques sur un moteur de recherches, on trouve le nom des architectes de cette superbe façade : Jan Weclawski et Jan Ciezlinski. La carte non écrite et non datée est une édition Ruch. On aime aussi la tour-signal qui serait du même duo.
Allez faire un tour sur ce beau blog (Louis, tu devrais adoré) :
Des mêmes architectes, le très graphique et moderne hôtel Mercury dont rien que l'auvent de l'entrée donne envie d'y aller dormir. On note que c'est le même éditeur et photographe qui travaillent. On imagine dans le milieu des années soixante l'arrivée en bus à cet Hôtel dans la Pologne soviétique. Ça devait être quelque chose comme expérience. La façade courbe avec son damier fait toute l'écriture de cette beauté. On adore.
Et voilà la pureté du Plattenbau, de la préfabrication lourde, tout ce que j'aime. Les dalles ont gardé la lecture de leurs joints, la répétion des petits blocs (quatre étage seulement), le bleu qui pourrait bien être en carreaux de céramiques, les petits balcon très Bauhaus, tout cela m'enchante. J'aime la colorimétrie générale que la qualité un peu pauvre de l'édition tire sur le bleu. Nous sommes toujours à Poznan, toujours avec le même éditeur et le même photographe.
Comment ne pas se régaler ainsi de cet héritage moderne de la Pologne qui semble donc, si on en croit l'existence du blog nommé plus haut, bien étudié et surveillé. Ouf...Espérons que l'ANRU ne s'installe pas en Pologne...
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